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Une étude révèle que le méliphage régent, un passereau originaire d’Australie en danger critique d’extinction, est devenu tellement rare que les jeunes ne parviennent plus à apprendre le chant propre à leur espèce.
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Gazouillis, sifflements, piaillements,… Les oiseaux possèdent tout un répertoire pour s’exprimer et échanger avec leurs congénères. Mais tous n’ont pas le même langage sonore. Chaque espèce se distingue par des cris et chants particuliers qui peuvent aussi varier en fonction des régions et des individus.
Malheureusement pour le méliphage régent, un passereau originaire d’Australie, cette “culture sonore” pourrait devenir de l’histoire ancienne. C’est ce que révèle une étude publiée dans la revue Proceedings of the Royal Society B par des chercheurs de l’Australian National University et de l’organisation BirdLife Australia.
Selon ces travaux, le chant propre à l’espèce Anthochaera phrygia serait en train de disparaitre. En cause : sa très faible population. L’oiseau serait en effet devenu tellement rare que les jeunes individus ne parviendraient plus à apprendre leurs vocalisations caractéristiques.
Le méliphage régent est un passereau de taille moyenne reconnaissable à son plumage majoritairement noir parsemé de taches et de bandes jaunes. Endémique d’Australie, il évolue principalement dans les forêts d’eucalyptus du sud-est du continent mais il s’est fait considérablement rare ces dernières années.
Alors que la population était auparavant évaluée à 1.500 individus matures, elle ne s’élève désormais plus qu’à quelque 300 oiseaux dans la nature, dont peut-être 150 mâles. Et l’espèce est classée en danger critique d’extinction par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).
C’est en partant à la recherche du méliphage régent que les chercheurs ont commencé à s’intéresser à son chant. “Ils sont tellement rares et l’aire qu’ils peuvent occuper est si vaste – que c’était comme chercher une aiguille dans une botte de foin“, a expliqué à la BBC le Dr. Ross Crates, principal auteur de l’étude.
Durant cette recherche, il a constaté que certains oiseaux “chantaient des chants étranges“. “Cela ne ressemblait en rien à un méliphage régent. Cela sonnaient comme des espèces différentes“, a-t-il précisé.
Afin d’en savoir plus, les scientifiques ont collecté toutes les observations de l’espèce enregistrées entre juillet 2015 et décembre 2019 afin d’évaluer la distribution et la densité des populations sauvages. Ils se sont ensuite rendus sur le terrain pour enregistrer les vocalisations de plusieurs dizaines de mâles.
Parallèlement, ils ont également capté les chants de spécimens captifs et recueilli d’anciens enregistrements de mâles sauvages datés de 1986 à 2011. Verdict : l’équipe a mis en évidence de nettes différences entre les vocalisations de tous les individus. En particulier chez ceux évoluant dans les populations les moins denses.
Là où les A. phrygia étaient relativement nombreux, les mâles émettaient des chants riches et complexes propres à leurs régions. Certains en revanche, ont montré des vocalisations atypiques, similaires mais abrégées. D’autres eux, ont émis des chants complètement différents, imitant ceux d’autres espèces.
“Certains étaient des chants que l’on pourrait attendre d’un méliphage à gouttelettes ou d’un polochion criard“, a décrypté le Dr. Crates pour ABC. “Certains étaient farfelus… Les oiseaux chantaient comme une perruche omnicolore ou un grand réveilleur”. D’après l’étude, 18 mâles étaient concernés, soit 12% de la population totale.
En se penchant sur ces spécimens, les chercheurs ont constaté que tous se trouvaient dans des zones de très faible population. De leur côté, les individus captifs ont émis des chants complètement différents du reste des sujets étudiés.
Comme les humains apprennent à parler, de nombreux oiseaux apprennent à chanter grâce à l’intervention de spécimens plus âgés de la même espèce. Or, chez les jeunes méliphage régent, ce processus serait de plus en plus compromis en raison du déclin des populations.
“Quand les jeunes oiseaux quittent le nid et s’élancent dans le grand monde, ils ont besoin de s’associer à d’autres, des mâles plus âgés, afin de pouvoir les écouter chanter et répéter leur chanson au fil du temps“, a indiqué le Dr. Crates. Sauf qu’aujourd’hui, certains échouent à trouver des congénères pour leur servir de professeur.
“Ces juvéniles finissent alors par apprendre les chants d’autres espèces“, a-t-il poursuivi. “Si cette espèce commence à perdre sa culture sonore, nous craignons que cela ne soit un dangereux signal d’alarme indiquant qu’elle est littéralement au bord de l’extinction“, a-t-il déploré.
Car il ne s’agit pas d’une simple question de vocalisations. Cette disparition influence en effet directement les comportements et la survie des méliphages régents. Les résultats ont suggéré que les spécimens aux chants légèrement ou complètement différents des normes étaient moins susceptibles de trouver une partenaire et de se reproduire.
“De nombreux oiseaux chanteurs, y compris le méliphage régent, utilisent leur chant pour impressionner les femelles“, a rappelé le chercheur australien. Sauf qu’avec des vocalisations atypiques, il serait bien plus difficile pour les mâles de communiquer avec leurs congénères et d’attirer une éventuelle partenaire.
Les scientifiques redoutent que cette perte de “culture sonore” n’exacerbe le déclin de l’oiseau. D’après eux, ce serait la première fois que l’on documente chez un animal sauvage une telle incapacité à communiquer avec sa propre espèce. “Notre étude démontre qu’un important déclin érode la culture dans une population animale sauvage“, écrivent-ils dans leur rapport.
Si la découverte semble alarmante, les chercheurs ont trouvé une piste pour venir en aide au passereau australien. Un programme de réintroduction de spécimens nés en captivité a déjà été mis en place au Zoo de Taronga à Sydney pour booster les populations. L’idée consiste à apprendre aux jeunes le chant de leur espèce avant qu’ils ne soient relâchés.
“Nous utilisons nos enregistrements de mâles qui chantent correctement et que nous avons trouvés dans la nature au cours des cinq dernières années, et nous les diffusons à travers des hauts parleurs aux jeunes oiseaux en captivité“, a détaillé le Dr. Crates pour ABC. Avec l’espoir que ces derniers l’apprennent et en fassent ensuite bon usage.
“Nous espérons que […] s’ils chantent correctement, cela les rendra plus attractifs pour les femelles quand ils seront relâchés dans la nature“, a-t-il conclu.
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