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"La sélection aveugle imposée par Parcoursup met en danger les … – Marianne

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Professeurs de mathématiques dans des classes préparatoires scientifiques ou commerciales de l’enseignement public, nous constatons avec regret que la sélection dans nos filières est chaque année plus difficile. Dès la création de la procédure Parcoursup, qui réglemente l’accès des lycéens à l’enseignement supérieur, une dynamique insidieuse s’est mise en place dont la conséquence est de dégrader la qualité de l’information transmise aux formations. Compte tenu de la gravité de la situation actuelle, il n’est pas inutile sans doute de faire connaître quelques-uns des obstacles auxquels nous sommes confrontés.
Premier point : nous observons depuis cinq ans une inflation inouïe dans la notation des bulletins du dossier scolaire. En écrivant cela, nous ne cherchons pas à stigmatiser nos collègues du secondaire : nous savons qu’ils sont l’objet de pressions irrésistibles pour aligner les notes toujours à la hausse, dans un contexte où à présent, l’intégralité de l’enseignement supérieur est concernée par la sélection. L’inflation dans les notes à laquelle nous assistons partage sans doute quelques traits, dans son mécanisme, avec une inflation monétaire : chacun anticipe l’augmentation à venir.
Aussi, chaque professeur (et on doit bien reconnaître dans cette bienveillance une part de légitimité) cherche à protéger ses élèves, chaque proviseur son établissement. Et chacun, en augmentant encore un peu la note, participe à la spirale infernale… Course folle. Signe des temps : certains lycées privés ont choisi de s’adapter à la frénésie ambiante par la pratique du double-bulletin. Dans chaque matière et à chaque trimestre, une « note-vitrine » destinée à Parcoursup, et sur un document séparé (et confidentiel), une « note véritable », faite pour informer l’élève de son niveau réel et des progrès à accomplir.
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Second point : toute appréciation inscrite par un professeur sur la fiche Avenir – première page du dossier Parcoursup – est automatiquement visible par l’intégralité des formations demandées par le futur étudiant. Dans ce cadre, avouer une fragilité ou faire part d’un doute pour un enseignant, c’est exposer un candidat à un risque d’échec non seulement sur les formations les plus exigeantes mais également sur les vœux de « sécurité ». Le résultat est une surenchère dans l’emphase : le dithyrambe est devenu la règle.
C’est beaucoup… Mais ce n’est pas encore tout car une ultime folie se prépare. Selon une rumeur persistante très crédible, à partir de 2024 le lycée d’origine du futur étudiant ne sera plus indiqué dans son dossier Parcoursup ! Notre expérience nous faisait utiliser cette donnée cruciale pour corriger des biais ou tenir compte de situations particulières. Elle nous était très précieuse. Si cette réforme sidérante a effectivement lieu, la France pourra se vanter de disposer du seul système de sélection sur dossier au monde, à notre connaissance, dans lequel aucune donnée de contextualisation des résultats scolaires n’est fournie. L’anonymat sera total : candidats, professeurs donnant leur évaluation, lycées d’origine. Qui de sensé peut croire qu’il sera possible de classer des candidats dans de telles conditions ?
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Quand la fiabilité de la sélection sur dossier est à ce point affaiblie, il n’y a logiquement plus qu’à se tourner vers des épreuves nationales anonymes. Et la version 2023 de Parcoursup, dans laquelle les notes des épreuves terminales de spécialité du baccalauréat seront prises en compte, paraît s’inscrire dans cette logique. Mais ce changement aura en réalité, dans notre discipline, un impact dérisoire. Les notes du baccalauréat ont en effet subi une inflation galopante depuis vingt ans. Ce point est bien connu de tous. Afin de l’illustrer, que chacun prenne conscience du sommet où nous sommes à présent rendus, cette simple statistique, édifiante : dans une académie, le pourcentage d’élèves ayant obtenu 18, 19 ou 20 à l’épreuve de spécialité mathématiques du bac 2022 a dépassé les 30 %. Oui : trois élèves sur dix ont obtenu l’une des trois meilleures notes possibles ! Une conclusion s’impose : cette nouvelle mesure a un coût réel – puisque les épreuves de spécialité ont lieu en mars, elle conduit à une large stérilisation du troisième trimestre de terminale – et un bénéfice quasi-nul.
En fait, et au vu de l’exposé de ce qui précède, il est permis de se demander s’il y a une réelle volonté politique de nous aider. Et pour nous exprimer avec un peu plus de franchise, il est permis de penser que non. Car la recherche de la « mixité scolaire » – qui n’a rien à voir avec la mixité sociale – c’est-à-dire de l’hétérogénéité des niveaux scolaires à l’intérieur d’une classe ou d’un établissement, est dans l’Éducation nationale une lubie qui a le vent en poupe. Pour preuve, la sidérante réforme du système Affelnet d’affectation des élèves en seconde qui a eu lieu en 2021 dans l’académie de Paris : un des objectifs affichés sans la moindre honte était d’abattre les dernières citadelles d’excellence dans l’enseignement public. L’évaluation réalisée il y a un an de ce grand chamboule-tout donne des frissons, le sentiment de vivre en Absurdistan : on s’y réjouit d’être parvenu à baisser, statistiques à l’appui, le niveau des lycées Charlemagne, Condorcet, Chaptal… Bientôt donc, tous les bons établissements seront privés : champagne !
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Durant trente ans, on a lutté avec une belle constance contre les classes de niveau dans l’enseignement public, en les traquant dans leurs ultimes recoins : choix des options, des langues etc. Et on a produit le désastre qui commence à être solidement documenté et reconnu par tous. Affelnet 2021 est le digne prolongement de cette politique qui ne peut qu’engendrer une fuite vers l’enseignement privé ; la Banque publique d’investissement (Bpifrance) a d’ailleurs fait preuve d’un remarquable sens du timing en participant à la création de quatre classes de lycée par niveau dans un institut privé hors contrat parisien, l’année même de mise en place d’une réforme affaiblissant l’enseignement public.
Pourtant, la pratique de notre métier nous a convaincus qu’une certaine homogénéité scolaire est absolument nécessaire dans notre discipline et au niveau où nous enseignons. Pas seulement pour les meilleurs, mais également pour les « moins bons », les élèves en difficulté, ceux qu’il faut suivre à la trace ou « repêcher ». La raison est au fond très simple, on ne peut plus facile à saisir pour qui n’est pas muré dans l’idéologie : même avec deux mains, deux craies, et sauf à posséder deux cerveaux, il est impossible d’écrire au tableau deux démonstrations en même temps. Aussi, une classe c’est un rythme. Un peu de rubato est certes autorisé et fait sans doute partie du plaisir de l’enseignement. Mais on ne peut pas, quelle que soit sa bonne volonté, faire inlassablement la navette entre plusieurs étages : c’est une perte de temps pour tous.
Chacun le sait : l’enseignement des mathématiques et plus généralement l’enseignement scientifique subissent une crise. La soigner par l’affaiblissement systématique de ces enseignements, comme cela a été tenté récemment vis-à-vis des mathématiques au lycée, comme cela continue à l’être par la mise à l’écart des compétences scolaires des élèves, par les attaques contre des filières aussi importantes que la filière ECG (Enseignement commercial voie générale) ou contre les classes préparatoires des villes moyennes n’est une solution que pour ceux qui n’en espèrent aucune.
Vu l’absence de volonté des pouvoirs publics pour répondre aux défis auxquels nous sommes confrontés, des initiatives voient le jour. Déjà, pour les langues, des tests internationaux existent mais ils ont le défaut d’être coûteux et donc socialement discriminants. Quant à nous, nous tenons compte depuis longtemps des résultats d’épreuves extrascolaires (concours Kangourou, épreuves Animaths, Olympiades de Première etc.). Mais ces éléments objectifs de repérage des talents sont rares, ne concernent qu’une petite élite et ne sont donc pas à la hauteur du défi auquel nous sommes confrontés. Certains de nos collègues en sont alors venus à imaginer un test de mathématiques national indépendant appelé TeSciA (Test scientifique avancé).
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L’entité qui l’organise est une association à but non lucratif reconnue d’intérêt général, si bien que le faible coût du test n’est pas facteur de rupture d’égalité. Le TeSciA présente certes des défauts (mais qui peut prétendre être parfait ?). Cependant, au point où nous sommes rendus, et dans le cadre de la crise des mathématiques, il nous paraît opportun d’apporter ici une forme de soutien à cette initiative et d’indiquer notamment qu’une utilisation éclairée de ses résultats est tout à fait légitime dans l’examen des candidatures dans nos classes. Puisse à l’avenir l’Éducation nationale s’en inspirer ou y apporter son concours.
***
Signataires :
Professeurs de mathématiques de l’enseignement public :
Violaine Aubert, professeur à Henri IV (Paris, ECG option Mathématiques Approfondies)
Anne-Laure Biolley, professeur à Louis-le-Grand (Paris, MP*)
Serge Dupont, professeur à Condorcet (Paris, MP*)
Denis Favennec, professeur à Montaigne (Bordeaux, MP*) et membre de l’AORES, qui organise le TeSciA
Marie Girard, professeur à Henri IV (Paris, ECG option Mathématiques Appliquées)
Max Hochart, professeur à Blaise Pascal (Clermont-Ferrand, PC*)
Nicolas Tosel, professeur à Louis-le-Grand (Paris, MP*)
Emmanuelle Tosel, professeur à Henri IV (Paris, MP*)
Johann Wattiez, professeur à Charlemagne (Paris, MPSI)

Nicolas Choquet, professeur à Charlemagne (Paris, MPSI)
Jeunes retraités, anciens professeurs de mathématiques de l’enseignement public :
Jean-Pierre Barani, ancien professeur au lycée du Parc (Lyon)
Jean-Denis Eiden, ancien professeur au lycée Fabert (Metz)
Marianne Roland-Billecart, ancien professeur au lycée Chaptal (Paris)
Richard Antetomaso, ancien professeur au lycée Saint-Louis (Paris)
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