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Hommage au Professeur Said CHIBANE : Un savant musulman des … – El Watan

Le drapeau national est en berne, saluant pour la dernière fois le départ vers la vie éternelle de notre grand ami et maître, le professeur Said Chibane. Partagée par tous ceux qui ont eu le privilège de le rencontrer ou de le connaître, notre tristesse est immense. De nombreux et vibrants hommages lui sont rendus, témoignant des valeurs culturelles, intellectuelles et morales, du professeur en ophtalmologie, penseur en islam et militant dévoué pour la cause nationale. 
Au-delà des nombreux titres honorifiques qui ont couronné un parcours lourdement chargé de défis liés au contexte historique de notre pays, nous avons choisi d’exprimer notre hommage en évoquant les conditions dans lesquelles l’homme de science et de foi est devenu un homme d’exception.  
De la noblesse…
Si en temps de paix et de progrès, toutes les sciences sont enseignées à l’âge d’or de la civilisation arabo-musulmane, et si en temps de guerre et de récession le repli culturel est manifeste, au moins un enseignement est toujours préservé, celui du Coran. Par souci d’exactitude, celui-ci doit être appris et récité par cœur afin d’assurer fidèlement sa transmission de génération en génération. C’est le rôle des écoles coraniques ou des medersas dont la noble famille Chibane avait saisi l’importance, honorant ainsi le caractère sacré du Livre Saint et la primauté de la Science. Aussi prenait-elle soin de confier l’éducation de ses enfants aux imams de la mosquée de Chorfa, leur ville natale. 
C’est là, que l’enfant Saïd Chibane mémorise les premières sourates, dont celle qui exhorte tout musulman à la recherche de la connaissance, sourate «Al-Alaq» qui commence par «Iqra’», ou «Lis, lis au nom de ton Seigneur, qui a créé, créé l’homme…», renforcée sciemment par la seconde sourate «Al-Qalam» (la plume).
«C’est l’ordre d’apprendre, par l’expérience et la compréhension, le sens de Sa création. C’est aussi la certitude que la création peut être lue et qu’elle est intelligible.» (Fethullah Gulen).
Plus tard, le Pr S. Chibane se remémorera avec émotion un souvenir personnel : «A la fin de l’année scolaire au lycée d’Alger, mon père, que Dieu l’ait en Sa Miséricorde, a tenu à me faire suivre un stage de langue arabe et d’études islamiques dans une medersa libre de Béjaïa, à la place des vacances scolaires pour faire en sorte que l’enseignement reçu à l’école française ne me fasse perdre le capital le plus précieux : celui de mon âme  musulmane» (Pr Said Chibane, revue de la Sahm, Tarikh Ettib, n°0, 2004). 
Une invitation à la science et aux significations du texte sacré, à laquelle le Pr Said Chibane  répondra avec passion jusqu’aux derniers jours de sa vie. 
Sur les bancs de cette première école, la référence identitaire religieuse et nationale se détermine et c’est à juste titre que les medersas seront considérées comme étant «des foyers de résistance et de nationalisme» par le pouvoir colonial.
De l’héritage des langues
Très tôt, le jeune Said Chibane  saisit l’intérêt de l’apprentissage des langues, convaincu que «les limites d’une langue sont les limites d’un univers» (Ludwig Wittgenstein).
La maîtrise des langues va progressivement lui permettre d’assimiler ce que les époques phares de l’histoire de l’humanité proposent de meilleur en cultures, en littérature, en sciences, en idées politiques et en religions.
La maîtrise des mots, quant à elle, sera l’instrument par excellence pour ses travaux futurs de lecture critique et de traduction.  
Quel choix étrange cependant, que de vouloir apprendre, en dehors du français (obligatoire à l’époque), l’arabe, le latin, l’allemand !
Notons que ces langues ont toutes été des langues de science aujourd’hui détrônées par l’anglais, auquel le Pr Said Chibane  s’est également initié.
De plus, elles ont traditionnellement servi de langues de traduction durant les phases de transition intellectuelle scientifique et religieuse de l’histoire de l’humanité en général, de notre pays en particulier. 
En effet, l’empire romain de langue latine domine l’Afrique du Nord près de 800 ans. Puis, lorsque le latin n’est plus en mesure d’exprimer des sociétés en pleine évolution, phase concomitante à la chute de Rome, il laisse place aux langues d’Etat : le français, l’espagnol, l’italien, l’allemand… 
Nous connaissons le passé colonial français dans notre pays couvrant la jeunesse du Pr Said Chibane , ainsi que les convoitises allemandes de cette même époque. 
L’expansion de l’Islam portée par la langue arabe fait de l’Afrique du Nord, non des colonies, mais des provinces quasi autonomes en terre d’Islam, sur lesquelles vont régner les dynasties musulmanes berbères.
Le Pr Said Chibane garde le souvenir de son professeur d’arabe Hamza Boubekeur, qui recommandait de lire l’ouvrage «Al-Ayam» du célèbre homme de lettres égyptien Taha Hussein. Traduite dans de nombreuses langues, l’intérêt de cette autobiographie au rayonnement universel est double, littéraire et philosophique. Luc-Willy Deheuvels la décrit, en effet, comme un «itinéraire, une succession de jalons proposés à la société pour renaître à elle-même et passer d’un âge d’imaginaire mythique figé sur sa propre mémoire à la maturité d’un regard scientifique et rationnel sur le monde».
Si les prémisses de l’érudition s’annoncent tôt chez le jeune Said Chibane, la prise de conscience qui en résulte est si profonde qu’elle l’engage à se consacrer entièrement, comme nous allons le voir, à la nation, la science et la foi.
Des études médicales et des voyages.. 
Lors de ses études médicales à Strasbourg et ses nombreux déplacements en Europe et en Orient, l’expérience scientifique est aussi riche que l’expérience humaine. L’étudiant Said Chibane s‘exprime et traduit déjà en plusieurs langues. 
Ils sont européens, irakiens, syriens, libanais, égyptiens, maghrébins, ses enseignants et ses amis, des personnalités marquantes et d’éminentes tètes grises qu’il croise dans sa vie et avec lesquelles une relation privilégiée s’établit. Elles vont avoir une influence considérable sur sa vision de la vie, de la culture et du monde.
Cette double expérience lui fait pressentir le rôle auquel il est prédestiné et la finalité dans laquelle ce rôle doit s’inscrire. 
L’étude de la médecine et de l’ophtalmologie est en effet l’accomplissement d’une vocation authentique, car l’étudiant Said Chibane est déjà doté des qualités humaines du véritable médecin, conscience, dévouement, compassion, bonté et une extraordinaire humilité.
La médecine est pour lui le moyen, tant attendu, pour faire le bien, répondre aux besoins sanitaires urgents de son pays,  œuvrer pour le développement d’une des premières écoles d’ophtalmologie de l’Algérie indépendante, partager son savoir et former, initier les uns et les autres au mérite de l’effort et du travail bien fait, exhorter au perfectionnement et au dépassement de soi et progresser en permanence. 
Ses élèves se remémorent les journées entières d’étude bibliographique à la recherche de diagnostics rares ou de questions qui s’y rapportent, jusqu’à parvenir enfin aux réponses adéquates, (témoignage du Dr Bengherbi). 
Des affaires religieuses
Le Pr Said Chibane va étendre ses efforts à l’information du grand public et son initiation à la signification du Coran, sa traduction et la biographie du Prophète à travers la diffusion d’une émission religieuse éducative télévisée qu’il anime avec la participation de Dr Amar Talbi, Dr Mahfoud Smati et Abdelouahab Hamouda, pendant cinq années consécutives. D’autres émissions sur Canal Algérie vont suivre animées par Kamel Chekkat. 
La participation du Pr Said Chibane à la préparation et l’organisation des séminaires de la pensée islamique sera également effective sous la direction de plusieurs gouvernements consécutifs.  
En tant que ministre des Affaires religieuses, le Pr Said Chibane nous informe qu’une de  ses principales réalisations est «l’institution Mosquée», (dont l’idée émanait du chef de gouvernement de l’époque, Mouloud Hamrouche). Elle devait être assistée par quatre conseils : un conseil scientifique, un conseil des voies de bienfaisance, un conseil «lis» pour l’apprentissage des enfants et la lutte contre l’analphabétisation et un conseil de l’édification et des moyens. Une nouvelle classification des imams était mise en place, ainsi qu’une nouvelle loi sur les legs «al-awqaf». 
De l’histoire de la médecine arabo-musulmane
A Milan, un 21 septembre 1972, se tient une réunion sur l’histoire de la médecine arabe et islamique. Sur une photo prise ce jour-là, on peut voir, le Dr Fausto Rimini, organisateur de la réunion, les Drs Busacchi, Pazzini, Tabanelli, Ben Miled, Riad, et pour la première fois, deux médecins algériens représentant notre pays, le Pr Said Chibane (en 2e position à partir de la gauche sur la photo) et le Pr Ahmed Aroua (en 1re position à partir de la droite).
 Le premier vient de présenter «Guide de l’oculiste d’al-Ghafiqui» et le second «Hygiène et prévention chez Ibnou Sina». 
Suite au succès rencontré de ce congrès, l’idée germe dans l’esprit du Pr S. Chibane, Pr A. Aroua et Dr M. Benhabyles, de créer la Société Algérienne d’Histoire de la Médecine (Sahm), encouragés par le Pr Omar Boudjellab, ministre de la Santé à l’époque.
Notons que l’intérêt commun du Pr Said Chibane et du Pr Ahmed Aroua pour l’histoire de la médecine arabo-musulmane, ainsi que leur amitié, précède de loin l’événement de Milan.
Les activités de la Sahm vont se poursuivre entre 1980 et 1990, au terme de laquelle la loi relative à l’autonomie de l’Union Médicale Algérienne est annoncée imposant aux associations qui en dépendent à se gérer elles-mêmes. La suspension consécutive de la Sahm ne va pourtant pas empêcher ses membres de poursuivre leurs recherches à titre individuel et de participer à de nombreux congrès internationaux sur l’Histoire de la Médecine. 
En l’an 2000, le Dr Mahmoud Aroua (fils du Pr Ahmed Aroua et actuel président de la Sahm), le regretté Dr Ahmed Amrouche et une vingtaine de membres se réunissent autour du Pr Said Chibane pour refonder la Sahm. Celle-ci est reconnue comme association à caractère social sans toutefois bénéficier d’aide financière. 
Le Dr Mahmoud Aroua aura de nombreuses séances de travail sur l’histoire de la médecine avec le Pr Said Chibane qui va l’aiguiller, l’éclairer et l’initier aux subtilités de la traduction des textes anciens, avec une parfaite maîtrise de la terminologie médicale dans les langues que sont l’arabe et le français et une indéniable expertise des anciens manuscrits arabes et latins.
De l’âge d’or des sciences arabes
L’expertise des anciens manuscrits et des langues dévoile au Pr en ophtalmologie Said Chibane des trésors longtemps occultés de savoir et de sagesse des savants de langue arabe de l’âge d’or arabo-musulman (VIIIe-XIIIe siècle). Il comprend que l’essor impressionnant des sciences, caractérisé par un métissage intellectuel inégalé, s’étendant depuis l’Espagne jusqu’aux confins de la Chine, est le fruit de méthodes originales d’observation, de réflexion, d’expérimentation, de recherche et application, marquées par un rationalisme révolutionnaire et un humanisme accompli.
Pendant près de trois quart de siècle, le Pr Said Chibane consulte et déchiffre les textes des précieux manuscrits. En les restituant à leur contexte historique, il en mesure la considérable portée intellectuelle et la contribution certaine dans l’évolution future des sciences en général et de la médecine en particulier.
Dans la préface de l’ouvrage «Hygiène et prévention chez Ibnou Sina» du Pr Ahmed Aroua, le Pr Said Chibane écrit : «Les livres des bâtisseurs de civilisations, sont des œuvres d’art, qui restent fidèles à elles-mêmes pendant des siècles. A chaque appel loyal et compétent, ils répondent de toute la fécondité et la richesse de leur source. Les œuvres des penseurs-réalisateurs de l’Islam, formés, inspirés par le Coran et la Sounna, nous en apportent l’illustration. Dans le domaine médical en particulier, grâce au principe islamique de primauté de l’observation et de la raison en science, ils ont assimilé, fécondé et dépassé les connaissances des anciens et le Canon d’Ibnou Sina (Avicenne), le Traité de Chirurgie d’al-Zahrawi, le Continents d’al-Razi, sont toujours transmetteurs de lumière (…).»
Avec clairvoyance et un esprit critique de la réalité de la pratique médicale, il ajoute : «Cette méthode d’étude pourfend les ignorants prétendant que la Médecine Islamique n’a fait que transmettre. Pour le monde de l’Islam, c’est un rappel à l’ordre pour cultiver la méthode scientifique et reléguer au passé, non seulement le charlatanisme ancien, séquelle de l’oppression et de l’obscurantisme, mais aussi le charlatanisme sophistiqué des temps modernes.»
Avec le Dr Ammar Talbi, philosophe algérien, le Pr Said Chibane consacre une édition critique à l’œuvre d’Ibn Rushd, Kitab al-kulliyat (le Colliget) –  édité par al-hay’a al-masrya al ‘amma lil kitab,  Le Caire, 1989  et la 2e édition par Dar el-Oumma, Alger 2013.
Dans le cadre particulier de l’ophtalmologie et l’optique, le Pr Said Chibane étudie l’apport déterminant à cette discipline du grand savant Ibn al-Haytham (Alhazen), (965-1039) philosophe, mathématicien et astronome. 
«Auteur de vingt et un ouvrages de physique dont seize consacrés à l’optique il a été le premier à exprimer l’idée que la lumière possède une existence propre, étrangère à l’individu qui la reçoit. Son fameux Livre de l’Optique est considéré comme l’ouvrage le plus important écrit sur le sujet entre le IIe siècle et le XVIIe siècle. Al-Haytham développe les idées contenues dans les travaux d’Euclide et de Ptolémée, mais fait table rase du ‘‘feu intérieur’’ d’Empédocle. Selon lui, la lumière vient de l’extérieur et entre dans les yeux et non pas l’inverse. Pour preuve, on ne peut fixer le Soleil, car l’intensité de sa lumière brûle les yeux. (…)» 
«Ce renversement de rôle oblige al-Haytham à réfléchir au mécanisme de la vision et la physiologie fait irruption dans le monde de l’optique (…). Pour la première fois, le rôle primordial du cerveau dans la vision est mentionné : c’est le siège de l’âme qui accomplit la synthèse des informations transmises par les deux yeux et nous permet de voir» (Trinh Xuan Thuan, Voyage au cœur de la lumière). 
Ayant parfaitement saisi l’importance de la pensée scientifique et l’œuvre d’Ibn al-Haytham, le Pr Said Chibane mentionne dans ses observations que les travaux d’Ibn al-Haytham ont dû attendre Newton et Keppler, quelques siècles plus tard, pour être utilisées au profit du savoir humain (Pr Said Chibane, revue de la SAHM, Tarikh Ettib,  N°0, 2004). 
L’étude critique du «Guide en ophtalmologie du savant al-Ghafiqi», permet également au Pr Said Chibane d’en tirer des observations très pertinentes en rapport avec les facteurs du progrès scientifique. Selon lui, ces facteurs sont essentiellement représentés par : «l’organisation des connaissances selon un plan rationnel et logique, l’expression selon un style clair et précis, une bibliographie critique, le souci de l’observation critique, l’expérience personnelle, la générosité d’esprit dans la communication, la transmission des détails et des techniques et enfin le rejet de l’argument d’autorité qui a tant fait de torts au développement des connaissances» (Pr Said Chibane, revue de la SAHM, Tarikh Ettib,  N°0, 2004).
Nous verrons par la suite les réflexions du Pr S. Chibane issues de l’étude comparative des œuvres de ces deux savants par rapport aux facteurs de déclin de la civilisation musulmane. 
De la traduction…
«La civilisation arabo-musulmane provoqua un véritable engouement pour la science dite profane des Arabes, et les traducteurs armés de leurs plumes ont joué à cette époque un rôle plus considérable que les armées bardées de fer de toutes les croisades réunies.» (Pr Ahmed Aroua, «L’Islam à la croisée des chemins»).
De l’étude de l’histoire de la médecine en général et arabo-musulmane en particulier, le Professeur chercheur Said Chibane prend conscience du rôle majeur de la traduction dans le transfert du savoir à travers l’histoire et la géographie. 
En effet, que saurions-nous, à titre d’exemple, de la civilisation de l’Egypte antique, sans la Pierre de Rosette, ce fragment de stèle sur lequel étaient gravées trois versions d’un même texte, en égyptien hiéroglyphe, égyptien démotique et alphabet grec. Sans la version grecque qui avait permis à Champollion de traduire les hiéroglyphes, un pan de l’histoire antique serait encore lettres mortes à l’image d’autres civilisations dont l’écriture n’a pu être déchiffrée.
La place de choix qu’occupent la traduction dans la pensée et la culture arabo-musulmane, son développement spectaculaire et sans précédent au cours des VIIe et IXe siècles permet non seulement l’essor de la civilisation arabo-musulmane, mais «servira aussi de base à la Renaissance de l’Europe, ou plus exactement au développement de la civilisation planétaire moderne» (Taieb Baccouche).
Cette tradition est déjà familière et connue du vivant du Prophète qui disait : «Adressez-vous aux gens dans l’idiome qu’ils comprennent.» 
Les traducteurs de culture arabe, dont les origines sont diverses, traduisent le latin, le grec, le persan et autres, vers l’arabe. Le premier ouvrage traduit (époque des Omeyyades), est un livre de médecine en langue persane (Taieb Baccouche).
L’activité scientifique atteint un niveau d’intensité et de développement inégalé en s’ouvrant sur l’universel, idée chère à Ibn Sina : «Se réjouir de la parure de sa propre essence en tant qu’elle appartient à celle-ci, bien que cette parure soit réelle, est une orgueilleuse erreur, mais se diriger par l’universalité vers le vrai, c’est le salut.» (Ibn Sina).
Le critère de l’universalité de la Science sera également prôné par Ibn Khaldoun : «Les sciences intellectuelles, étant naturelles à l’homme en tant qu’il est un être doué de réflexion, n’appartiennent pas spécialement à une seule nation ; on voit que tous les peuples civilisés se sont adonnés à leur étude et ont connu, aussi bien les uns que les autres, quels en étaient les principes et quelles étaient les questions dont elles traitaient. Ces sciences ont existé pour l’espèce humaine depuis qu’il y a eu de la civilisation dans le monde.» 
C’est bien dans la continuité de ses illustres prédécesseurs que le Pr Said Chibane évolue, en consacrant son temps tout entier à la profession médicale, la recherche, l’histoire, les lectures critiques et la traduction, avec une rigueur et une précision sans faille.
Il contribue au projet ambitieux de réalisation d’un dictionnaire ou lexique médical trilingue (arabe, français, anglais), qui sera édité en 1983 en Suisse.  
Il est également un des auteurs du Guide de la conversation médicale (arabe-français) édité par al-majlass al ‘ala’ li al-lougha al-arabya, Alger, 2006 (1re édition), 2019 (2e édition) (ouvrage collectif). 
Du déclin des sciences arabes 
L’attention du Pr Said Chibane ne porte pas uniquement sur l’âge d’or des sciences arabes, mais aussi sur les raisons de son déclin progressif à partir du XIIIe siècle. Nous savons qu’il est du fait de facteurs géopolitiques, économiques, d’idéologies philosophico-religieuses qui mettent fin à l’ijtihad (effort de réflexion), le libre exercice de la pensée, la curiosité scientifique et l’innovation en général.
La destruction de l’observatoire de Taqi al-din à Istanbul trois ans à peine après son édification en 1577, ainsi que le rejet de l’imprimerie illustrent la politique en place qui précipite le déclin de la civilisation arabo-musulmane.
-A propos d’un hiatus dans les connaissances en ophtalmologie 
Les facteurs de déclin des sciences arabes et la destruction ou perte des grandes écoles de médecine de Baghdad et d’Andalousie, ainsi que la perte des facteurs scientifiques de progrès tels que mentionnés par le Pr Said Chibane plus haut en lien avec le savant al-Ghafiqi, font que les livres restent les seuls éléments de formation médicale. 
Or, l’analyse comparative de l’œuvre d’Ibn al-Haytham et celle d’al-Ghafiqi révèlent au Pr Said Chibane, un événement scientifique déroutant qui va le conduire à formuler d’intéressantes hypothèses. 
L’événement proprement dit est un hiatus dans l’évolution des connaissances en ophtalmologie : il remarque qu’«Al-Ghafiqi n’a pas eu connaissance de l’explication révolutionnaire du savant Ibn al-Haytham, apportée vingt ans auparavant, montrant que la vision était possible grâce à l’action objective de la lumière sur l’œil (…)». 
Une seconde lacune est observée dans ce chapitre de physiologie, méconnue d’al-Ghafiqi : «C’est celle de la vision binoculaire telle qu’elle était conçue par Ibn al-Haytham qui a inventé un appareil pour l’examiner, appareil dont le grand savant Joval rapporte le dessin dans un de ses livres en 1896.» («Guide en ophtalmologie du savant al-Ghafiqi», Pr Said Chibane revue de la Sahm, Tarikh Ettib, N°0, 2004).
Comment expliquer ce «hiatus» dans l’évolution de la science en terre d’Islam à ce moment-là ?
Le Pr Said Chibane le relie à des facteurs de stagnation et de décadence palpables à travers cette étude, causée essentiellement par une «coupure dans le temps et l’espace» de l’information : 
«La coupure verticale, entre générations, qui se produit par la destruction de l’acquis des anciens (exemple des incendies tels que celui de Cordoue où près de 200 000 volumes sont détruits) ou leur méconnaissance (absence de diffusion des livres).
-Et la coupure horizontale, par manque d’échanges à travers la même génération, entre pays musulmans (coupures des relations scientifiques entre Le Caire et l’Andalousie dans cette période trouble de l’histoire).»
Savants  solitaires ?
Au XVIIIe siècle, les centres d’enseignements de médecine ont disparu, les médecins sont rares, la pratique de la médecine redevient empirique. Celui qui est considéré par le médecin historien Lucien Leclerc comme le «dernier représentant de la médecine arabe» est un Algérien : Abderezzaq Ibn Hamadush al-Jazairi. Celui-ci relate dans sa «Rihla» des fragments d’autobiographie édités et annotés en 1983 par l’éminent historien algérien Pr Abou Al-Kacem Saadallah, quelques aspects historiques du Maghreb et notamment d’Alger de son époque. 
Bien connu du Pr Said Chibane Ibn Hamadush, passionné de pharmacologie, médecine, sciences exactes, mathématiques, physique et même astronomie, cherche en solitaire, de ville en ville à défaut de centres d’enseignements, des ouvrages scientifiques auxquels se référer, : «A Tétouan, écrit-il dans « Rihla », j’ai cherché des livres d’astronomie, personne n’était compétent dans ce domaine. Quant à l’arithmétique, la médecine et l’architecture, je n’ai trouvé personne qui les maîtrisait…» 
A notre époque, où l’Occident a la mainmise sur les sciences et les technologies, que les réussites dans ce domaine sont rares et isolées dans le monde musulman, que les efforts ne convergent pas (encore) vers une volonté commune de réforme véritable de la pensée scientifique et son champ d’action, pourrait-on dire que le Pr Said Chibane est moins solitaire qu’Ibn Hamadush dans sa quête pour un renouveau scientifique et civilisationnel du monde musulman ? 
Les conditions d’un tel renouveau lui sont pourtant bien connues. Elles reposent prioritairement sur le progrès de la science dont le succès dépend de deux facteurs : 
«-Le premier est celui qui a été utilisé par les Arabes à Baghdad entre le Ier et le IIe siècle de l’hégire, puis par l’Occident trois siècles plus tard : lorsque chacun s’est intéressé à ce que l’autre avait comme trésors scientifiques et a pris les mesures nécessaires pour les assimiler et en profiter.
-Le second est l’édification d’une société dans laquelle le facteur le plus important d’innovation sera l’organisation de la connaissance théorique, et où les institutions intellectuelles deviendront le centre de la structure sociale. 
Ces deux facteurs, ouverture active pour la traduction dans les deux sens, et unité dans l’étude et l’action, assureront à l’Islam, un renouveau» («Guide en ophtalmologie», Pr Said Chibane, revue de la Sahm, Tarikh Ettib, N°0, 2004).
Le Pr S. Chibane lègue aux jeunes et moins jeunes un héritage unique : son propre exemple, une synthèse harmonieuse de ce que les civilisations antiques et récentes ont proposé de plus fécond en cultures, sciences, méthodes de recherche, pédagogie et actes de foi. Un savant musulman au savoir encyclopédique des temps modernes dont l’impact illuminera pour toujours l’histoire de notre pays. 
Nous partageons entièrement la douleur de sa famille, en particulier ses enfants et son neveu, et leur exprimons nos plus sincères condoléances.
Que Dieu l’accueille en Son Vaste Paradis auprès des bienfaiteurs
Dr Hayet Aroua pour Mme Veuve et enfants du Pr Ahmed Aroua

source

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