Sur un terrain, ce serait un magistral coup tactique, le genre d’action où une équipe en cueille une autre là où elle ne l’attend pas. Au lieu de plaider pour le boycott de la Coupe du monde au Qatar, comme elle l’avait fait en 1978 pour celle organisée par la dictature militaire argentine, Amnesty International tente le contre-pied. Depuis mai dernier, l’organisation de défense des droits humains demande le prélèvement de 420 millions d’euros dans les finances de la Fifa, pour constituer un fonds d’indemnisation des familles des travailleurs décédés ou exploités sur les chantiers du Mondial
« S’il est désormais trop tard pour effacer les souffrances induites par les violations passées, la Fifa et le Qatar peuvent et doivent agir pour éviter de nouveaux abus, mais aussi allouer des réparations à tous ceux et celles qui ont rendu la Coupe du monde possible », écrit l’ONG dans un rapport sur le sujet. Amnesty souligne que la Fifa a officiellement souscrit aux principes directeurs des Nations unie relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme. Sa responsabilité est donc susceptible d’être invoquée un jour devant les tribunaux. Même s’il n’est pas encore question de procès, c’est peu dire que le monde du ballon rond est embarrassé. Les éléments de langage avaient plutôt été préparés contre le boycott. À la Fifa, on avance qu’il faudra voir d’abord les conséquences positives de l’épreuve sur les réformes législatives concernant les travailleurs migrants au Qatar. C’est sur ce ton d’ailleurs que l’organisation a communiqué lors des entretiens consentis avec Amnesty, durant lesquels elle est restée très prudente.
L’idée du fonds fait pourtant son chemin et, lors des derniers rassemblements des équipes nationales en septembre 2022, les Anglais ont ainsi apporté leur soutien à l’initiative.