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En Haute-Marne, Yannick et sa sœur Estelle transforment le lait de leurs vaches en yaourts, fromages blancs, faisselles et fromages qu'ils vendent en direct, principalement en grandes surfaces et restauration collective. Comment réussir, d'après eux, cette diversification ?
Cliquer sur le curseur pour lancer la vidéo, réalisée en mai 2022 et publiée par la chambre d’agriculture du Grand Est en décembre.
Yannick et Estelle sont à la tête de la fromagerie Laistelle, à Graffigny-Chemin en Haute-Marne, à une trentaine de kilomètres de Contrexéville. Frère et sœur se sont associés pour créer cet atelier, « artisanal et fermier », de transformation laitière en yaourts, fromages blancs, faisselles et fromages.
Pour cela, ils ont choisi la Jersiaise, une race « bien spécifique », de « petite taille » et surtout qui « produit peu de lait, mais très riche en matières grasses et protéines », ce qui donne de « l’onctuosité » sans nécessiter « aucun additif », explique Yannick.
Et pour avoir de « bons produits finis en bout de chaîne, il faut qu’au début on soit irréprochable au niveau du bien-être animal », ajoute-t-il. C’est pourquoi l’élevage teste un certain nombre d’équipements pour le confort des vaches : tapis en caoutchouc anti-dérapant sur le béton des aires d’exercice, matelas en mousse sous la paille sur les couchages, filets brise-vent ajustables en fonction du vent, de la température et de la pluie. « Des choses relativement simples, qui changent le quotidien des animaux ! », fait remarquer le jeune éleveur.
De même, les producteurs sont « intransigeants » sur la traçabilité, pour pouvoir remonter du produit en magasin jusqu’à la traite d’où il provient. « C’est assez complexe. Heureusement que ma sœur a fait des études en qualité, ça nous a bien aidé », reconnaît Yannick. Lui et Estelle savent précisément ce que leurs vaches ont mangé, grâce au système d’alimentation, une « cuisine automatique », qui indique la quantité de chaque ingrédient, l’heure de distribution, etc.
Et les éleveurs sont très organisés : la fromagerie est divisée en « deux pôles, correspondant aux champs de compétences » de chacun. La production pour Estelle, dès 6 h du matin après la traite pour que « le lait soit transformé directement, sans stockage, et qu’il soit le plus frais possible », jusqu’aux environs de 16 h. L’unité de transformation étant de petite dimension, une journée est dédiée à la fabrication de chaque produit. Quant à Yannick, il s’occupe de la commercialisation et de l’expédition/livraison.
Tous les matins, entre 4h30-7h et 12-12h30, un camion part livrer les commandes (préparées et chargées l’après-midi qui précède) en circuit court, dans les grandes surfaces et la restauration collective (établissements scolaires, hôpitaux, maisons de retraite…). « Nous n’avons pas de problème avec la grande distribution. Les enseignes sont justes avec nous et nous sommes justes avec elles. Un échange de bons procédés : les produits locaux les intéressent pour l’image, l’intérêt de notre côté est de pouvoir travailler ».
Autre priorité : les normes d’hygiène. « Primordiales dans l’alimentaire », en particulier quand une partie des consommateurs sont des enfants et des personnes âgées. Alors peu importe « le profil et les compétences » des employés, insiste le producteur, l’important est la « rigueur vis-à-vis des consignes et process », qui doivent être « écoutés avec attention et respectés ».
Parmi les qualités essentielles recherchées chez ses salariés agricoles : la « capacité à s’adapter », parce qu’au sein d’une petite entreprise on est amené à effectuer différentes tâches dans la journée, ainsi que « l’autonomie » tout en sachant « travailler en équipe ». Autrement dit, il faut « avoir le réflexe de toujours vouloir se rendre utile, prendre exemple, demander, apprendre ». « Nous sommes sept. Il importe que l’atmosphère soit bonne, que tout le monde d’entende bien, soit bienveillant, s’entraide mutuellement », conclut Yannick.
Après ce témoignage d’éleveur sur les clés de succès d’un projet de transformation/vente directe, retrouvez le point de vue de l’expert :
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Transformer à la ferme est souvent « une nouvelle activité sur une structure existante, et donc un nouveau métier qui nécessite des compétences techniques et de gestion spécifiques (définition des coûts de revient et des prix de vente entre autres) auxquelles on peut se former même si aucun diplôme n’est exigé », estime Gratienne Edme-Conil, responsable territoires et filières à la chambre d’agriculture de Haute-Marne.
Cela implique fréquemment « de s’associer à quelqu’un ou d’installer une autre personne sur l’exploitation », son conjoint par exemple. D’où « des créations d’emploi », souligne-t-elle, ou un moyen pour « fidéliser la main-d’œuvre ». Car le principal avantage est d’apporter un complément de revenu, en « donnant de la plus-value à ses productions ». En se diversifiant, on peut aussi « amortir des bâtiments », ajoute la spécialiste.
Elle liste ensuite les conditions requises pour créer un atelier de transformation à la ferme : avoir un local aux normes sanitaires, et le déclarer aux autorités compétentes ; ou « contractualiser avec un artisan ou collectif d’agriculteurs » à proximité pour « louer les bâtiments et équipements » nécessaires à cette diversification ou « faire faire à façon ».
Dans tous les cas, il faudra respecter plusieurs règles : « marche en avant, maîtrise de la température, aménagement d’un endroit dédié au stockage, de sanitaires, vestiaires… » « Il y a un peu de surface à prévoir. Sans foncier ou bâtiment disponible, ce n’est pas toujours simple », prévient Gratienne Edme-Concil alors pour de petites quantités, la location et/ou la contractualisation peut être une bonne solution. Car l’investissement, qui « dépend des volumes qu’on veut transformer mais aussi de la saisonnalité des produits », peut vite être substantiel et « les banques ne vont pas forcément suivre ».
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