Trois jours de télétravail au minimum sont désormais obligatoires : un nouveau défi pour les managers qui doivent motiver leurs équipes par des objectifs réalistes et à court-terme.
Un nouveau protocole "un nombre minimal de trois jours de télétravail par semaine". Lorsque c'est possible, "ce nombre peut être porté à quatre jours par semaine".
– (c) Getty Images
Bienvenue en 2022. Dans le bus ou le métro, lire ses mails. Ne pas pouvoir détacher ses yeux d’une carte de voeux numérique en mode paysage idyllique “coquillages et crustacés” et déjà cocher ses vacances d’été sur l’éphéméride tout neuf. Prochain arrêt : le bureau. Stop. On rembobine. Retour chez soi. C’est reparti pour des conditions de travail hybride car se profilent “trois jours de télétravail au minimum” dès le 3 janvier 2022, pour trois semaines. “Obligatoire” a insisté le Premier ministre le 27 décembre 2021, “dans toutes les entreprises et pour tous les salariés pour lesquels [le télétravail] est possible” – dans les secteurs privé et public sans toutefois dresser la liste des secteurs d’activités concernés.
Ils sont revenus, les rendez-vous virtuels qui scandent l’agenda. Des tunnels de réunions qui s’enchaînent à d’autres tunnels, à un train fou. Ressentir un épuisement sans même avoir bougé de la journée. Bref, l’intrusion du professionnel dans le privé, matin, midi et soir. On redécouvre les joies et les déboires du bureau à la maison, de la caméra qui filme le salon, la cuisine, la chambre ou les trois à la fois. Du café et des apéros improvisés à distance. Un vortex temporel s’est ouvert : bienvenue en mars 2020.
En octobre dernier, 54 % des dirigeants s’inquiétaient d’une possible hausse des burn out sur la fin 2021 et au-delà, avec pour causes principales le manque d’équilibre vie pro-vie perso (32 %), la pression accrue en termes de résultats (29 %), une charge de travail importante (25 %), les difficultés de communication entre employés et employeurs, et le fait de travailler de la maison avec des enfants (24 %) – étude Robert Half. Une analyse prophétique ? Depuis plusieurs mois pourtant, le travail hybride progressait, des accords de télétravail étaient négociés et le retour au bureau encouragé. Même les salariés éprouvés par le “syndrome de la cabane” retrouvaient prudemment les locaux professionnels et le collectif en présentiel. Patatra. Arrivée du nouveau protocole qui encadre le variant Omicron et sa contagiosité. Il va falloir faire montre de ruse pour que les plus fragiles ne décrochent pas et disparaissent à tout jamais dans leur coquille d’angoisse.
Cette permanence de l’état d’exception qui fêtera bientôt ses deux bougies atteint les plus optimistes. La routine de l’incertitude quant à la pandémie fatigue, le doute progresse et le mot “obligatoire” n’augure rien de bon. Quel roulement adopter ? Pour combien de temps ? De quoi alimenter les discussions autour de la machine à café à distance et aggraver le phénomène d’anxiété individuel et collectif : 57 % des membres de la génération Z (moins de 25 ans) et 49 % des milléniaux français (25-35 ans) déclarent se sentir stressés en permanence ou la plupart du temps (Deloitte, “Millenials survey” novembre 2021).
Pour éviter le risque d’une déprime contagieuse, les managers sont les premiers de cordée. Leur mission : accompagner le changement, préserver la productivité de l’équipe en suivant ses membres à distance et les faire évoluer vers un but commun en dépit d’un contexte de crise. Un défi compliqué.
Christophe Nguyen, psychologue du travail et des organisations, également président, associé du cabinet Empreinte Humaine, estime néanmoins que la situation n’est pas la même qu’il y a un an : “Il y a eu un apprentissage, des ajustements”. Il recommande de se souvenir des acquis et de faire le bilan à la fin de chaque journée. “Etre réaliste et se dire : c’est comme ça”. Pour autant, insiste l’expert, “le manager ne doit pas rester seul”. Il doit conserver impérativement un lien avec le support RH et avec les autres managers. Il faut déléguer à une équipe proactive et, même si elle est plus éclatée, créer de nouveaux rôles. Un responsable de la convivialité, par exemple. Redécouper les tâches, “se recentrer sur du court terme”. Se forcer aussi à faire ce que l’on aime le moins en premier, conseille Christophe Nguyen : “la procrastination est anxiogène”. Et pour éviter le “blurring”, la confusion entre ses vies, “commencer et finir la journée par autre chose que du travail”. Lire la presse est un bon début.
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