Du 1er au 3 février, le salon danois de la mode et de l’accessoire fêtera son 30e anniversaire avec une nouvelle édition au Bella Center de Copenhague. Cet événement professionnel s’est imposé comme l’un des rendez-vous incontournables de l’industrie scandinave. Encore une fois, il aura lieu en même temps que la Fashion Week de la capitale et que le salon Revolver. Mais dès l’été prochain, les deux événements fusionneront: Revolver a récemment été racheté par le CIFF.
FashionNetwork.com a rencontré la toute nouvelle directrice du CIFF, Sofie Dolva, qui a pris la suite de Christina Neustrup après la dernière édition du salon. Lors de cet entretien, elle revient sur cette 60e édition de l’événement qui commence, évoque ses nouvelles responsabilités, l’unification des salons danois, l’évolution du secteur et les nouveaux formats, avec une première incursion dans le secteur de la beauté. Pas si étonnant lorsque l’on connaît le parcours de Sofie Dolva, qui a notamment occupé des postes à responsabilité chez L’Oréal et Lulab, deux entreprises leaders sur le marché des cosmétiques.
FashionNetwork.com: Vous avez pris la direction du salon CIFF l’été dernier. Comment ces premiers mois à votre nouveau poste se sont-ils déroulés et quelles sont vos responsabilités?
Sofie Dolva: Je suis passée par une étape d’atterrissage. J’ai consacré les premiers mois à me familiariser avec l’équipe et avec la plus grande partie des marques et des acheteurs avec lesquels nous travaillons, pour pouvoir comprendre leurs besoins et déterminer ce que nous devons améliorer dans ce contexte d’inflation. Une fois tout ces retours récoltés, nous avons pu détecter ce que nous devions changer avant cette édition d’anniversaire. Nous avons aussi déterminé la direction à prendre à long terme.
De plus, nous avons beaucoup renforcé notre équipe avec de nouvelles embauches, notamment au sein des départements digital et commercial. Il ne s’agissait pas seulement de motiver nos équipes: nous devions pouvoir compter sur la mentalité et les compétences adéquates pour mieux collaborer avec les marques. L’un de nos principaux axes de travail a été l’étude de stratégies de marketing pour comprendre si les marques peuvent vraiment compter sur un ROI (retour sur investissement) satisfaisant quand elles investissent de grosses sommes dans leur participation au salon.
FNW: Quelles sont les nouveautés de cette édition anniversaire?
S.D: Nous bénéficions d’une surface énorme, donc nous avons eu la place suffisante pour diversifier notre offre. Un commentaire qui revenait souvent de la part des exposants concernait l’intérêt de ne pas présenter uniquement les marques qui participent à la Fashion Week et qui ont un positionnement premium, mais aussi d’intégrer des entreprises moins haut de gamme mais capables de générer un bon volume de chiffre d’affaires. Les acheteurs et les clients recherchent tous cette fusion.
Et justement, nous disposons d’une grande expérience de la mode à destination des consommateurs. Nous avons présenté certains défilés au Bella Arena avant l’inauguration officielle de la semaine de la mode. Nous attirons plus de 12.000 personnes et plus de 60 marques féminines, masculines et enfants qui, en général, ne figurent pas au calendrier officiel de la Fashion Week. Nous avons même des griffes d’accessoires et de chaussures. C’est important pour créer une mise en scène vendant les marques aux clients et aux acheteurs scandinaves et internationaux, ainsi qu’à la presse et aux invités VIP.
L’objectif principal du CIFF est de générer une activité commerciale. Nous allons disposer d’un nouvel espace très soigné pour mettre en valeur la mode danoise. Nous avons réalisé que le salon met beaucoup l’accent sur les marques internationales, et que les marques locales sont parfois un peu oubliées. Nous voulons soutenir les talents nationaux avec un décor rappelant un petit appartement, présentant les collections d’une façon différente. Nous allons aussi dédier un corner aux talents émergents et un autre aux griffes reconnues ou spécialisées dans la slow-fashion.
Nous allons inaugurer une nouvelle zone dédiée à l’art de vivre, où nous présenterons une sélection soignée de marques de cosmétiques nordiques. Il n’y aura que des labels susceptibles de bien s’intégrer dans la feuille de route des participants, c’est-à-dire des marques de lifestyle au caractère indie.
“La mode peut créer de nombreuses synergies avec la beauté et l’art de vivre“
FNW: Ce projet est-il lié à votre expérience dans le secteur de la beauté?
S.D: Oui, d’une certaine façon. Cela a surpris quand nous avons commencé à parler de ce projet, mais c’est quelque chose qui manque à l’industrie de la beauté depuis déjà longtemps. Il y a des salons de beauté ou de coiffure qui ciblent clairement les clients professionnels. Mais il y a aussi une niche en lien avec la mode scandinave qui se diversifie vers le secteur de la beauté. C’est un style de vie complet qui doit avoir son propre nom au CIFF. Je crois que nous allons pouvoir créer beaucoup de synergies et apprendre énormément ensemble, car actuellement, les marques de mode tendent à entrer dans cette catégorie. En même temps, les points de vente évoluent vers un style plus proche du concept store. Le CIFF pourra proposer à beaucoup de petites marques de beauté d’accéder aux plus grands distributeurs internationaux. Nous avons réalisé une sélection très soignée de 81 marques, où seront présentes les plus belles marques nordiques.
FNW: Comment toutes ces nouveautés ont-elles été accueillies?
S.D: Avec beaucoup d’optimisme, je crois. De plus, la cosmétique nordique bénéficie d’une grande reconnaissance à l’étranger et est bien positionnée. Je crois que cela contribuera à avoir un impact très positif sur les marques présentes.
FNW: Qu’attendent les exposants de cette édition après la reprise de l’été dernier?
S.D: Le feedback que nous recevons est toujours très diversifié. Mais beaucoup de participants nous ont souligné que les journées de travail sont très compactes, et qu’il est très difficile de faire des affaires durant le salon en lui-même, en réduisant la participation à une présence durant ces quelques jours où les marques attendent que les acheteurs passent sur leur stand. En tant que salon, nous devons fournir un service professionnel et accompagner le travail des marques pour fixer des objectifs réalistes, définir une stratégie concrète d’expansion par marché, par canal… Ainsi, nous savons que les acheteurs que nous invitons correspondent à la feuille de route des marques. Le principal défi que doivent relever les salons est de ‘matcher‘ les marques et les acheteurs. Et nos équipes travaillent beaucoup en ce sens. Les acheteurs que nous invitons peuvent signer des contrats intéressants.
D’autre part, nous devons aider les marques à identifier leur cible et collaborer avec elles pour leur fournir un lookbook afin de se présenter différemment. Nous devons proposer des présentations courtes et intéressantes pour que les acheteurs comprennent l’histoire des marques et leur positionnement. C’est important de soigner la communication pour éviter la perte de temps et chercher des liens logiques.
Nous organisons aussi des réunions de suivi avec les marques pour les accompagner et les orienter afin qu’elles exploitent au maximum toutes les possibilités que leur offre le salon. Par exemple, chaque jour, nous proposons une ‘social hour‘ où les marques peuvent entrer en contact avec tous les acheteurs. Les marques doivent faire des recherches et préparer une présentation pour les acheteurs pour que ces rencontres soient utiles et portent leurs fruits. Petit à petit, nous essayons de simplifier et de faciliter les rencontres qui débouchent sur des contrats.
FNW: Et pour les marques plus petites?
S.D: Les petites marques doivent soigner leurs relations publiques. Parfois, c’est même plus important que de conclure des contrats pendant le salon. C’est la raison pour laquelle nous avons lancé la zone “d’appartement“, afin que la première impression soit plus favorable.
FNW: Comment définiriez-vous la période actuelle et quels sont vos principaux défis à relever en tant que nouvelle directrice de l’événement?
S.D: Nous sommes dans une période de transition. Il y a des choses que nous n’allons pas pouvoir changer rapidement d’une édition à l’autre, mais si nous mettons en place une stratégie de test empirique, nous nous améliorerons progressivement. Ma priorité, c’est d’arriver à renforcer notre structure pour mieux collaborer avec les marques et les aider à faire des affaires. C’est le but principal de leur présence sur le salon.
FNW: La place des salons a été beaucoup remise en question durant la pandémie. Comment cette industrie va-t-elle évoluer, selon vous?
S.D: La réaction des marques après la pandémie m’a paru très positive. Elles savaient toutes qu’elles devaient revenir. Évidemment, elles se sont toutes adaptées à la digitalisation à marche forcée, mais la partie physique reste fondamentale. Un salon, c’est aussi une communauté, un lieu de rencontre avec des professionnels venus du monde entier. Clairement, c’est aussi une source d’inspiration. Je ne crois pas que les salons vont perdre de leur intérêt à l’avenir, mais j’ai conscience de la nécessité de s’adapter et de s’améliorer pour fournir des services en accord avec ce que recherchent les marques.
La mode scandinave sous les feux des projecteurs
FNW: Comment le profil des marques participant au salon a-t-il évolué?
S.D: Après la pandémie, les marques habituées du salon sont revenues. Et nous avons remarqué une montée en puissance des acheteurs scandinaves, étant donné que nous sommes le seul salon d’envergure de la région. Petit à petit, nous allons tenter de faire travailler les quatre pays scandinaves ensemble pour attirer à nouveau les acheteurs de la région. S’ils reviennent, certaines marques qui présentent actuellement leurs collections via des showrooms seront incitées à participer au salon. Nous devons unir nos forces pour être compétitifs.
FNW: Qu’en est-il des marques du reste de l’Europe? En particulier de celles qui viennent des pays du Sud, pour lesquelles le calendrier estival n’est pas vraiment propice?
S.D: Je pense qu’à partir de la fusion entre le CIFF et Revolver, il sera beaucoup plus facile pour ces marques de venir et de participer au seul salon scandinave du marché. D’un point de vue logistique, ce sera bien plus simple. Évidemment, nous savons que l’édition estivale n’est pas la plus pratique pour elles, mais nous sommes disposés à faire tout ce qu’il faut pour répondre aux demandes des marques et des acheteurs. Nous devons continuer à travailler dans ce sens à l’avenir, sans aucun doute, afin de développer le nombre d’exposants et de visiteurs.
FNW: Quelles sont vos prévisions pour cette édition?
S.D: Nous tablons sur une croissance de 10% par rapport à l’édition d’août. Pour le moment, les chiffres de participation invitent à l’optimisme. Mais pour moi, il y a une grande différence entre les résultats chiffrés et la qualité. Je préfère donner la priorité à la qualité, même si les prévisions sont pour le moment satisfaisantes et encourageantes. Nous ferons le bilan à la clôture du salon, mais nous avons de grandes attentes.
FNW: Comment créez-vous des synergies avec la Copenhagen Fashion Week, qui a lieu en même temps que les salons?
S.D: Nous collaborons étroitement et nous nous entendons sur le calendrier. De plus, le CIFF héberge même quelques-uns des défilés au Bella Center. Nous aimerions en accueillir plus à l’avenir, et pour ce faire, nous devons simplifier la partie logistique. Nous travaillons aussi ensemble sur les invitations ou les critères de développement durable. L’objectif, c’est de donner la plus grande envergure possible à cette semaine et nous espérons qu’à l’avenir, notre partenariat sera encore plus étroit.
FNW: Revolver travaille depuis des années avec le Pitti Uomo. Le CIFF a-t-il des projets de collaboration internationale?
S.D: Pour le moment, nous voulons vraiment asseoir notre présence à Copenhague. Évidemment, nous allons poursuivre l’alliance avec le Pitti Uomo. Si nous continuons à nous développer à l’avenir, le plus logique sera probablement de rechercher une alliance avec Pitti Bimbo. Et une fois que nous en serons là, nous pourrons imaginer d’autres projets. Mais pour le moment, ce n’est pas à l’ordre du jour.
FNW: Quels engagements de développement durable prenez-vous? Le CIFF est reconnu comme un salon leader dans ce domaine.
S.D: Nous devons poursuivre la réflexion pour améliorer les choses. C’est un sujet très complexe et nous en parlons en permanence pour trouver des solutions, en étroite collaboration avec la Copenhagen Fashion Week. Pour moi, imposer beaucoup de critères et d’exigences aux marques ne suffit pas pour faire mieux. Je crois qu’il faut les aider et essayer de proposer une plateforme où des spécialistes pourront fournir des outils et des connaissances aux marques pour les accompagner, et ce à chaque édition.
Beaucoup de petites marques ou de marques émergentes n’ont pas la capacité ou les ressources pour être à la pointe dans ce domaine et cela ne doit pas nous paralyser: nous devons leur tendre la main pour les aider à aller plus loin et à s’améliorer. Nous ne voulons pas mettre certaines marques de côté, mais avancer ensemble vers cet objectif en créant des espaces où les marques pourront partager leurs connaissances et leurs succès dans le domaine du développement durable. Nous soutiendrons et appuierons toujours les marques qui sont déjà en avance sur ce point, mais nous avons conscience du fait que ce processus demande du temps et de l’argent. C’est pourquoi je pense qu’il faut offrir de l’espace et inciter les marques à s’améliorer.
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