CASSE-TETE L’inflation et la hausse des matières premières ont obligé les collectivités à opérer des arbitrages pour contenir le coût des repas à la cantine et ne pas trop pénaliser les parents d’élèves
En cette rentrée scolaire, les collectivités se sont retrouvées face à un casse-tête : comment absorber la hausse du prix des repas à la cantine ? En un an, les tarifs des matières premières ont augmenté de 12 %, rappelle le syndicat national de la restauration collective. Ceux de l’alimentation ont suivi une courbe vertigineuse : +30 % pour la volaille, +25 % pour le bœuf, +70 % pour l’huile devenue une denrée rare. Sans parler de la sécheresse qui ravage le pays et qui pourrait faire craindre une pénurie dans les prochains mois. Résultat : les prix des repas à la cantine ont grimpé de 10 % en moyenne, estime l’AMF, association des maires de France. Et pour les communes, villes, métropoles ou départements, l’addition commence à être salée.
« Au prix des repas, il faut ajouter l’augmentation des tarifs de l’énergie et celle du point d’indice dans la fonction publique qui touche le personnel des cantines, soulève Gilles Pérole, membre de l’AMF et adjoint au maire de Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes). Il faut également tenir compte des recettes des collectivités qui sont en berne. Clairement, l’équation devient compliquée pour équilibrer le budget. »
La plupart des grandes villes, qui ont les reins suffisamment solides pour absorber les coûts, ont décidé de tout prendre à leur charge. C’est le cas à Lyon, où 26.000 repas sont servis quotidiennement. La municipalité planchait depuis dix-huit mois sur sa nouvelle offre de restauration scolaire : 50 % de bio et 50 % d’aliments issus de producteurs locaux. Les repas, que les familles paient entre 80 centimes d’euros et 7,30 euros, reviennent désormais à 13 euros. L’effort est loin d’être négligeable. « Cela représente un coût supplémentaire de 4 millions d’euros par apport à l’an dernier, indique Stéphanie Léger, adjointe en charge de l’Education. Mais nous avons fait le choix politique de l’assumer pleinement cette année. »
A Paris, où sont distribués 23 millions de repas par an, les prix n’augmenteront pas non plus. Malgré l’inflation, la Ville a « spécifiquement instruit » aux Caisses des Ecoles, qui assurent la restauration scolaire, de « ne réduire ni la quantité, ni la qualité » des assiettes servies. Pour cela, elle s’est engagée à augmenter la subvention qui leur est accordée chaque année.
Partout en France, des arbitrages ont dû être opérés pour absorber au maximum les coûts. A Bordeaux, par exemple, la municipalité a revu le contenu de ses plats, avant que les prix ne flambent. « On a mis plus de composants végétariens dans nos menus, indique Delphine Jamet, adjointe en charge de l’administration générale. L’inflation est moins importante sur les légumineuses que sur la viande. » Compte tenu de l’envolée des prix de la farine conventionnelle, la ville a opté pour le pain bio, bien moins cher à la fabrication. Elle a également délaissé l’huile de tournesol au profit de l’huile d’olive. Un pari qui pourrait s’avérant payant.
« On devrait le ressentir d’ici quelque temps. Ce qui nous sauve, c’est d’avoir noué des marchés publics avec des producteurs locaux, en bio, analyse l’élue. Comme c’est une agriculture moins mécanisée, avec moins d’intrants chimiques, les coûts ont moins augmenté. Cela conforte grandement notre démarche de relocaliser la production et la consommation. »
A Toulouse, on fait le pari de sensibiliser les agents et les élèves au gaspillage alimentaire. « Il s’agit d’un levier fort d’économie », souligne Marion Lalane de Laubadère, adjointe en charge de l’Education. La commune de Mouans-Sartoux, elle, a déjà réduit de 80 % le gaspillage alimentaire en dix ans. « Forcément, on ne pouvait pas jouer sur cette carte-là, soulève Gilles Pérole. On a donc cherché des solutions ailleurs. » Comme réduire la consommation de viande et utiliser des produits bruts plutôt que des produits transformés. « On introduit davantage de protéines végétales ou des œufs dans les menus, résume l’élu. On s’était déjà engagé à avoir la moitié des repas végétariens. Cela n’a fait qu’accélérer l’objectif final. » Pourtant, cela n’a pas suffi. Incapable d’assumer les surcoûts dans leur globalité, la commune a décidé de « couper la poire en deux ». « Le coût des repas a augmenté de 20 centimes. La moitié est à la charge des familles, l’autre à la charge de la mairie », indique Gilles Pérole.
Pour s’y retrouver, la commune de Caudebec-lès-Elbeuf (Seine-Maritime) qui recense 4.000 âmes, a opéré des choix plus drastiques. Les menus ne sont plus composés que de quatre éléments. Selon les jours, les enfants se passent d’entrée ou de fromage. Ce qui évite aux parents de débourser davantage.
A Limoges, la municipalité essaie « d’avoir une gestion plus souple » de la restauration scolaire en proposant des « menus plus génériques ». « On indique le plat principal et pour le reste, on est plus flou. Au lieu d’annoncer yaourts aux fraises, on annonce laitage, détaille Vincent Julby, premier adjoint en charge de la politique éducative. Cela nous permet de bénéficier de promotions sur certains produits, meilleur marché, ou de produits locaux, en circuit court, bio, qui sont souvent imprévus et auxquels on peut ainsi accéder plus rapidement. » Malgré cela, la mairie s’est résolue à réévaluer ses tarifs. « Les prix des cantines n’avaient pas évolué depuis 2013. Malgré la pandémie, durant laquelle beaucoup de familles se sont retrouvées au chômage ou sans activité, nous n’avons pas rehaussé les prix pour ne pas leur rajouter une contrainte, explique Vincent Julby. Mais là, les coûts ont vraiment augmenté. » La facture envoyée aux parents s’élève désormais à 27 centimes de plus par repas. Le prix à payer pour ne pas réduire en contrepartie la quantité dans les assiettes ou « restreindre certains produits ». Le tarif social, 1 euro, que les communes de moins de 10,000 habitants financent seules, est maintenu.
Si la plupart des collectivités ont trouvé un plan B pour cette rentrée, qu’en sera-t-il l’an prochain ? « On s’attend à une augmentation comprise entre 22 et 35 % en 2023, contre 12,5 % aujourd’hui », prédit Delphine Jamet. A Lyon, les interrogations sont les mêmes. « On ne sait pas encore comment la ville pourra assumer la suite. On ne sait pas si notre prestataire, qui est chargé d’acheter auprès des producteurs va augmenter ses prix, confesse Stéphanie Léger. Il reste toutefois des marges sur lesquelles négocier… »
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