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Rencontre Borne-Scholz : la défense, point de crispation dans la relation franco-allemande – L'Express

La Première ministre Elisabeth Borne, le 27 octobre 2022 à Matignon, à Paris
afp.com/Emmanuel DUNAND
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Il est plutôt mal vu de se présenter à un anniversaire les mains vides. Pour les soixante ans du traité de l’Élysée portant sur la coopération franco-allemande, le 22 janvier prochain, Emmanuel Macron et Olaf Scholz devraient éviter cet embarras. Paris et Berlin ont annoncé le 18 novembre un “accord politique” sur un programme commun jugé essentiel pour l’avenir de l’industrie aéronautique européenne, celui du Système de combat aérien du futur (SCAF), auquel participe également l’Espagne. Il manque toutefois encore un accord industriel entre Dassault et Airbus, dont la présidence française a assuré qu’il est “sur le point d’être conclu”. 
S’il s’agit bien d’une avancée substantielle, la progression du programme SCAF, appelé à succéder au Rafale à horizon 2040, sauve à peine les apparences. Lors de leur rencontre de ce vendredi, à Berlin, le chancelier Scholz et la Première ministre Élisabeth Borne ne manqueront pas d’en faire le constat : entre la France et l’Allemagne, censés être les meilleurs partenaires du continent, les dissensions sont nombreuses actuellement, surtout lorsqu’il est question de politique de défense. Pire, la guerre en Ukraine semble avoir éloigné les deux partenaires, dont les divergences en matière de conceptions sécuritaires éclatent au grand jour. 
Outre-Rhin, l’invasion russe a été vécue comme un choc. Elle a mené à la création rapide d’un fonds spécial de 100 milliards d’euros destiné à la Bundeswehr, l’armée allemande. Une occasion de lancer de nouvelles collaborations franco-allemandes ? Aucunement. Le premier réflexe des Allemands est d’acheter américain, en l’occurrence des avions de chasse F35, qui pourront transporter des missiles nucléaires des Etats-Unis, et assurer ainsi le partage de la dissuasion nucléaire, dans le cadre de l’Otan. 
Le fonds sert essentiellement à combler les trous d’une armée mal équipée et mal entretenue, après avoir été sous-financée. “Philosophiquement, les Allemands ne pensent pas en termes de développement de capacités propres, en se projetant vers une autonomie stratégique à 60 ans comme les Français, ils restent sur une vision opérationnelle, d’achats d’équipements”, constate Renaud Bellais, codirecteur de l’Observatoire de la défense à la fondation Jean-Jaurès. 
Le système SCAF doit succéder au Rafale à horizon 2040.
afp.com/ALAIN JULIEN
Les tensions entourant ces dernières semaines le projet de bouclier antimissile européen en sont un parfait exemple. L’Élysée n’a découvert qu’à l’occasion du grand discours européen d’Olaf Scholz, à Prague, fin août, que l’Allemagne allait investir “de manière très significative dans [sa] défense aérienne”, en permettant à ses “voisins” de rejoindre ce programme de bouclier anti-missile. Le 13 octobre, elle annonçait, sans la France, mais avec 14 autres pays (Belgique, Bulgarie, Estonie, Finlande, Lettonie, Lituanie, Pays-Bas, Norvège, Roumanie, Slovaquie, Slovénie, République tchèque, Hongrie et Royaume-Uni) la création du European Sky Shield Initiative (ESSI). 
Déjà échaudé par divers sujets énergétiques, Emmanuel Macron, a considéré ce lancement comme la vexation de trop. Pour marquer le coup, le 19 octobre, l’Élysée a annulé la tenue du Conseil des ministres franco-allemand, qui était prévu quelques jours plus tard à Fontainebleau. Certes, des représentants français ont participé à deux réunions préparatoires de l’ESSI. Mais l’absence d’une concertation privilégiée, réclamée par le chef de l’Etat, ne passe pas. 
Preuve que l’attitude de Berlin reste en travers de la gorge du président français, celui-ci a vertement critiqué le bouclier anti-missile lors de la présentation de la Revue nationale stratégique, sur le porte-hélicoptères Dixmude, le 9 novembre, à Toulon. “La défense aérienne de notre continent, c’est une question stratégique, solidaire et aux multiples ramifications, qui ne peut se résumer à la promotion d’une industrie nationale ou d’industries tierces aux dépens de la souveraineté européenne”, a-t-il cinglé. 
En l’occurrence, le projet allemand de défense antiaérienne fait appel à trois systèmes nationaux, opérant à différentes portées et déjà existants : l’Iris-T, du matériel allemand ; le Patriot, fabriqué par l’Américain Raytheon ; et l’Arrow 3, mis au point par Israël. Pour sa part, la France aurait souhaité pouvoir y associer son SAMP/T (le “Mamba”), développé avec l’Italie, ainsi que la prochaine génération de ce système, sur laquelle planchent les industriels. La porte n’est cependant pas fermée : “Nous proposerons et nous contribuerons”, a indiqué Emmanuel Macron. 
Le système allemand de défense aérienne IRIS-T.
dpa Picture-Alliance via AFP
Au psychodrame du bouclier aérien, s’ajoutent tous les projets de coopération en suspens, quand ils ne sont pas purement et simplement arrêtés. Ainsi, les Allemands ont décidé de se retirer du programme de modernisation des hélicoptères d’attaques franco-allemands Tigre, auquel ils préféreraient l’achat de AH-64EApache, de l’Américain Boeing. La France assume donc seule ce projet avec l’Espagne, qui possède également une flotte de ces aéronefs. 
Le programme conjoint d’avion de patrouille maritime et de lutte anti-sous-marine, baptisé MAWS (Maritime Airbone Warfare System), ne se porte pas mieux. Il attend son abandon officiel depuis la commande, en 2021, par la marine allemande, de cinq avions patrouilleurs P-8A Poseidon, fabriqués par Boeing. “Ces achats sur étagère grignotent la confiance, regrette Yohann Michel, chercheur à l’International Institute for Strategic Studies (IISS). C’est comme avec les systèmes Patriot : si cela permet de récupérer des capacités plus rapidement, cela réduit les possibilités pour les Européens de renouer avec une industrie de défense haut niveau.” 
Ce n’est pas tout, puisque deux autres projets sont en suspens. Le CIFS (Common Indirect Fire System), destiné à succéder aux canons français Caesar français et allemands PzH 2000, a été repoussé “au-delà de l’horizon 2045”. Quant au char de combat du futur (MGCS), il avance plus lentement que prévu depuis que Berlin a imposé un 2e industriel allemand, Rheinmetall, en plus de Krauss-Maffei Wegmann, pour travailler avec le Français Nexter. Après le SCAF, cet autre programme emblématique pourrait cependant franchir une nouvelle étape, en 2023.  
Le tableau général tranche avec les promesses du Traité d’Aix-la-Chapelle, signé en janvier 2019 par Emmanuel Macron et l’ex-chancelière Angela Merkel. Avec l’objectif de compléter celui “de l’Élysée”, les deux parties s’engageaient alors à favoriser “la coopération la plus étroite possible entre leurs industries de défense”. Las, deux ans plus tard, seul l’avion du futur parvient à franchir les étapes, en plus de l’Eurodrone (initié en 2015), un drone de combat dont le premier vol est prévu pour 2026. 
Le document signé par Macron et Merkel prévoyait également de “renforcer encore la coopération entre leurs forces armées en vue d’instaurer une culture commune et d’opérer des déploiements conjoints”. Une réalisation est à noter depuis : l’installation sur la base aérienne d’Évreux d’un escadron de transport tactique franco-allemand, composé de 10 appareils (des C130J) et de 260 personnes, pour participer à opérations extérieures. 
L’initiative s’inscrit dans la logique amorcée en 1989 par le chancelier Helmut Kohl et le président François Mitterrand avec la création de la brigade franco-allemande. Basée à Müllheim, juste derrière la frontière alsacienne, elle compte 5600 soldats des deux nationalités. “Son rôle, avant tout symbolique, est de montrer que les deux ennemis d’hier peuvent faire des choses ensemble”, rappelle Delphine Deschaux-Dutard, de l’université de Grenoble Alpes. En tout cas, pas déjeuner : pour des raisons administratives, ses membres prennent leurs repas dans des cantines séparées. Pendant un temps, les Allemands n’avaient pas non plus le droit de monter à l’arrière des jeeps françaises, faute de ceintures de sécurité. 
Au sein de l’armée française, le passage par Müllheim n’est pas considéré comme la voie la plus rapide pour une carrière prestigieuse. Avec à peine quelques déploiements en Bosnie, au Kosovo et en Afghanistan, la brigade franco-allemande est l’une des unités les moins utilisées à l’extérieur. Dans un rapport de 2010, la Cour des comptes avait pointé son “sous-emploi”. Ses déploiements sont compliqués : au Mali, en 2018-2019, la brigade a dû se scinder. Les Français ont été engagés dans Barkhane pour mener des opérations de combats, tandis que les Allemands ont servi au sein de la Minusma, mission de l’ONU chargé de “soutien aux institutions politiques”. 
La guerre en Ukraine pourrait être l’occasion de repenser les missions de cette brigade franco-allemande. “Rien n’interdit de la déployer dans les pays de l’Otan faisant face à la Russie, propose Yohann Michel. Sa meilleure opportunité d’intervention n’est pas le théâtre africain et le Moyen-Orient, mais plutôt le front est, où la menace russe est vue d’un même oeil à Paris et Berlin. Mais cela nécessite de la volonté politique…” Un ingrédient qui a parfois fait défaut, ces derniers mois, dans le couple franco-allemand. 
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