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Personnalité : avez-vous le « Dark Factor » ? – Cerveau et Psycho

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Chacun recèle en lui une part de narcissisme, mais aussi de machiavélisme, voire de psychopathie. Or ces trois caractéristiques forment ce qu’on appelle le « Dark Factor », le pire de l’humain. Comment le mesurer, et à partir de quand cela devient-il vraiment dangereux ?

Heureux qui croit en la bonté de l’homme. Mais à bien considérer les 300 000 ans d’histoire d’Homo sapiens, on a parfois envie de parier sur la version mauvaise. Notre espèce trompe, ment et ruse, manipule et assassine depuis l’âge de pierre. Et bien que personne n’apprécie particulièrement les narcissiques, les psychopathes et autres vilains, ils font parfois des carrières étonnantes. Comment cela s’explique-t-il ? Existe-t-il vraiment des personnages malveillants qui se distinguent clairement des autres personnes « normales », ou sommes-nous tous, à des degrés divers, imbus de nous-mêmes et avides de pouvoir ? Les réponses à cinq grandes questions sur le côté obscur de notre personnalité permettent d’y voir plus clair…
En essayant de cerner les aspects les plus troubles du caractère humain, les psychologues Delroy Paulhus et Kevin Williams ont identifié, dans les années 2000, trois aspects de la personnalité particulièrement problématiques : le narcissisme, le machiavélisme et la psychopathie. Mieux : ils les ont regroupés sous le nom de « triade noire ». Selon ces chercheurs de l’université de Colombie-Britannique à Vancouver, cette association permet de saisir pratiquement tout ce qu’il y a de destructeur chez l’être humain. De nombreuses études psychologiques s’appuient encore aujourd’hui sur ce concept. Lorsqu’on souhaite faire passer à des personnes un test combiné de ces trois dimensions, on utilise souvent le Short Dark Triad, constitué d’une série d’affirmations avec lesquelles les participants doivent indiquer leur accord ou leur désaccord.
La description pointue des trois caractéristiques en question fait penser à une bande de méchants hollywoodiens. Le narcissique en est sans doute le représentant le plus connu. Il doit son nom à un personnage de la mythologie grecque : le jeune Narcisse ne voulait rien savoir de ses nombreux admirateurs et admiratrices et s’entichait tout seul de son reflet dans le miroir. Par conséquent, les narcissiques sont considérés comme des égocentriques qui ont soif d’admiration. Si les éloges ne sont pas au rendez-vous, cela peut être dangereux pour les autres. Dans le test du Short Dark Triad, une affirmation typique à laquelle ces personnes adhèrent volontiers est la suivante : « Je sais que je suis spécial, car on me le dit souvent. »
Le machiavélique, quant à lui, vit librement selon la devise « la fin justifie les moyens ». Il ment et triche habilement dès qu’il espère en retirer un avantage. Ce trait est une allusion directe à Machiavel (1469-1527), le philosophe d’État italien dont le traité politique Le Prince entra en collision avec de nombreuses vertus prônées à son époque… Schématiquement, pour lui, un souverain était en droit de faire tout ce qu’il voulait afin de conserver son pouvoir. Conformément à cette vision des choses, l’individu machiavélique maîtrise toutes les techniques de manipulation, est un parfait hypocrite et un habile manipulateur. Dans le questionnaire Short Dark Triad, il se déclare parfaitement en phase avec l’énoncé suivant : « Mieux vaut éviter les conflits ouverts avec d’autres personnes, car ces dernières pourraient un jour s’avérer utiles. »
Quant au psychopathe – sans doute le plus redoutable des trois –, il est endurci, insensible et ne connaît pas le remords. Il voit dans les autres des objets plutôt que des êtres humains. S’il a envie de faire du mal à quelqu’un, il le fait. Comme il n’éprouve guère de peur au préalable et qu’il n’éprouve pas de remords après son acte, le seuil du passage à l’acte est très bas. De nombreux psychopathes entrent en conflit avec la loi dès l’adolescence. Le test Short Dark Triad saisit la psychopathie entre autres par l’affirmation : « Celui qui s’en prend à moi le regrettera. »
En fait, Paulhus et Williams n’avaient pas testé leur hypothèse de la triade noire sur des gangsters ou des détenus, mais sur un échantillon de 245 étudiants en psychologie. À l’aide de méthodes statistiques, les chercheurs ont pu démontrer qu’il s’agissait bien de trois composantes à considérer séparément les unes des autres. Au départ, il ne s’agissait pas pour eux de troubles cliniques pertinents dont pourraient éventuellement souffrir des tueurs en série ou des dictateurs meurtriers. « C’est le malentendu le plus fréquent », explique Mitja Back, professeur de diagnostic psychologique et de psychologie de la personnalité à l’université Wilhelm Westphalie de Münster. Outre les formes extrêmes considérées comme pathologiques, le narcissisme serait simplement un trait de personnalité vis-à-vis duquel les gens se distinguent les uns des autres : « Telle personne est peu narcissique, telle autre l’est davantage. »
Une certaine dose d’égomanie serait même utile dans la vie. Les personnes qui ont une haute opinion d’elles-mêmes et qui savent précisément ce qu’elles veulent dégagent une assurance et une attitude battante qui sont généralement bien perçues par les autres. Ce n’est que lorsque l’amour-propre devient trop extrême, au point que les personnes concernées ou leur entourage souffrent des conséquences, telles que les erreurs de jugement et le dénigrement des autres, que les spécialistes parlent de trouble de la personnalité narcissique. Environ 6 personnes sur 100 sont diagnostiquées comme telles à un moment ou à un autre de leur vie. Ce chiffre est un peu plus élevé chez les hommes (7,7 %) que chez les femmes (4,8 %). C’est du moins ce qui ressort d’une enquête menée en 2008 auprès d’environ 35 000 adultes américains [des données équivalentes n’étant pas disponibles pour la France, ndlr].
Les personnes présentant des scores de narcissisme particulièrement élevés ont également souvent tendance à se mettre en colère et à dévaloriser les autres. « Elles ne sont pas poussées par la méchanceté, mais par leur forte aspiration à un statut social », explique Mitja Back. Si quelqu’un leur barre la route du succès et du pouvoir, cela risque de faire ressortir leur côté hostile. Une certaine absence de scrupules est également répandue chez les narcissiques « normaux ». Mais à l’extrême, elle culmine dans un trouble de la personnalité antisociale et presque toujours dans un comportement criminel. En revanche, le machiavélisme prononcé est considéré comme un trait de personnalité auquel on n’attribue pas de trouble cliniquement significatif.
Heureusement, dans la population générale, la plupart des gens sont relativement accommodants ; ils ne sont disposés que dans une certaine mesure à rechercher leur propre avantage aux dépens de leurs semblables. C’est ce qu’ont révélé les études sur la prévalence de ce qu’on appelle le « Dark Factor », défini comme un égoïsme exagéré combiné à des convictions qui ne laissent place à aucun scrupule ni sentiment de culpabilité. Il s’agirait d’un dénominateur commun aux traits de personnalité sombres les plus divers, selon le professeur de psychologie Morten Moshagen, de l’université d’Ulm, qui a présenté le concept en 2018 avec ses collègues Benjamin Hilbig et Ingo Zettler. Le narcissisme, le machiavélisme et la psychopathie, mais aussi l’égoïsme, la haine, la désinhibition morale, le sadisme et l’égocentrisme ne seraient en fin de compte que différentes manifestations du Dark factor. Depuis 2020, un questionnaire est disponible pour mesurer la tendance obscure ; or, en moyenne, une personne sur 20 y atteint des valeurs inquiétantes. Ce qui laisse 19 autres personnes fréquentables.
Nombreux sont ceux qui considèrent secrètement que leur patron ou leur supérieur est narcissique. Même si de telles attributions dévalorisantes sont problématiques, elles recèlent un fond de vérité. C’est ce qu’a mis en évidence une métaanalyse de 42 études publiée en 2015 par l’équipe d’Emily Grijalva de l’université d’État de New York à Buffalo. Selon cette synthèse, les individus imbus d’eux-mêmes sont effectivement plus susceptibles d’occuper des postes de direction que les autres. Mais cela n’est apparemment pas tant dû à leur narcissisme qu’à une autre caractéristique de leur personnalité : l’extraversion. En effet, les personnes extraverties sont certes ouvertes aux autres, et se sentent à l’aise quand elles occupent le centre de l’attention, mais pas seulement : elles donnent aussi volontiers le ton au sein des échanges dans les groupes.
Le narcissisme est une facette normale de la personnalité. En avoir un peu est plutôt sain. C’est l’excès qui fait des dégâts.
C’est ce qu’a montré en 2021 une équipe de recherche basée à Münster, en Allemagne, et dirigé par Tobias Härtel. Les chercheurs se sont penchés de plus près sur la manière dont les narcissiques parviennent à s’assurer des positions élevées. Pour cela, l’équipe a analysé comment ces personnes sont perçues par les autres lorsqu’il s’agit de résoudre un problème ensemble. Selon les observations réalisées, elles sont plus souvent choisies comme leaders parce qu’elles sont sociables et dominantes. Des caractéristiques que leur entourage interprète comme une capacité à s’imposer, ce qui semble correspondre à l’image typique d’un leader. Ces facettes dites « agentiques » sont probablement responsables des carrières fulgurantes des personnes plutôt imbues d’elles-mêmes. En revanche, les personnes qui portent en elles des aspects narcissiques qualifiés d’antagonistes, c’est-à-dire qui rabaissent les autres pour se rassurer sur leur propre grandeur, sont considérées comme peu dignes de confiance et, selon l’étude, elles n’auraient pas de meilleures chances d’avancement, bien au contraire.
L’équipe d’Emily Grijalva a fait une autre découverte : certes, les contemporains ayant des valeurs narcissiques élevées accèdent plus facilement à des postes de direction. Mais ils n’y font pas meilleure figure. Les cadres particulièrement narcissiques sont en moyenne moins bien évalués par leurs supérieurs et leurs collaborateurs que les cadres moins vaniteux. Peut-être ne sont-ils pas aussi sensibles à leurs collègues et montrent-ils plus souvent leur côté hostile, à mesure que le temps passe.
Le charisme initial des narcissiques semble perdre de son brillant assez rapidement. C’est ce que prouve une expérience menée par un groupe de travail autour de Marius Leckelt, également à l’université Wilhelm Westphalie. Dans cette expérience, 300 étudiants devaient résoudre plusieurs fois de suite des tâches en petite équipe. À chaque fois, ils devaient ensuite s’évaluer mutuellement en matière de persévérance, de confiance et de sympathie. Au début, les personnes aux scores de narcissisme élevés étaient exceptionnellement populaires, mais ensuite l’enthousiasme des membres de leur équipe a progressivement diminué…
Précisons tout de même que les cadres ayant des valeurs de narcissisme particulièrement faibles ne sont pas non plus très bien perçus, comme le suggère la métaanalyse d’Emily Grijalva. Aussi mal vu que soit ce trait de caractère, il peut avoir un effet positif s’il est modéré. En effet, les personnes modérément narcissiques s’imposent non seulement plus facilement, mais sont également plus souvent perçues comme enthousiastes et entreprenantes. Pour diriger des collaborateurs, un niveau moyen de ce trait de personnalité semble optimal.
Le psychopathe le plus célèbre du grand écran, Hannibal Lecter, est dépeint comme un génie – du mal, certes, mais un génie. Dans Le Silence des agneaux, ce psychiatre et tueur en série cannibale aide l’agent du FBI Clarice Starling à mettre fin aux agissements d’un tueur de femmes appelé Buffalo Bill. Ce faisant, Lecter tire à tout moment les ficelles de l’intrigue et a une longueur d’avance sur tout le monde. Ce personnage a marqué l’image du psychopathe à sang froid doté de dons intellectuels presque surhumains. Mais quel est le rapport avec la réalité ? Il faudrait tout d’abord déterminer à quel point les tendances antisociales doivent être prononcées pour que l’on puisse attribuer cette étiquette à quelqu’un. Même les experts ne sont pas d’accord sur ce point.
L’un des questionnaires les plus utilisés est l’échelle de psychopathie élaborée par le psychologue canadien Robert Hare au début des années 1980. Elle recense deux caractéristiques principales : l’exploitation effrénée des autres et un style de vie antisocial et inhabituel. S’y ajoutent des indices comme le mensonge notoire, le changement fréquent de partenaires sexuels, l’absence d’objectifs dans la vie ainsi que le manque de sens des responsabilités et de remords. Les psychopathes perçoivent les émotions avec moins d’intensité que la plupart des individus ; ils s’ennuient rapidement et recourent à des moyens extrêmes pour se procurer l’excitation nécessaire. Si l’on ajoute à cela leur tendance à prendre des décisions impulsives et leur absence de peur, on obtient un mélange détonant…
Les psychopathes sont souvent convaincus de leur propre grandeur. Ils apparaissent sûrs d’eux et intrépides et dégagent au premier abord un certain charme. « Beaucoup d’entre eux sont aussi des narcissiques, explique Back, mais rares sont les grands narcissiques présentant également des traits psychopathiques marqués. » Selon la littérature spécialisée, environ 5 % des personnes peuvent être considérées comme des psychopathes [la proportion est probablement entre 5 et 20 fois inférieure chez les femmes que chez les hommes, ndlr].
Il est toutefois peu probable qu’il existe un Hannibal Lecter pour 20 personnes dans la population. De nombreux spécialistes doutent aujourd’hui de l’utilité de cette approche diagnostique par catégories. « La valeur à partir de laquelle une personne est considérée comme un psychopathe pathologique est choisie de manière relativement arbitraire, fait remarquer Back. Il s’agit en réalité d’un continuum : certains individus sont très peu psychopathiques, d’autres le sont à dose modérée alors que d’autres encore atteignent des niveaux inquiétants. »
Il reste que les personnes qui se situent dans la partie supérieure de l’échelle de la psychopathie ne sont pas toutes, loin de là, des supercerveaux criminels. Une équipe de chercheurs menée par Ernest D. O’Boyle, aujourd’hui à l’université de l’Indiana à Bloomington, a résumé les résultats de 48 études sur le sujet, dans une métaanalyse publiée en 2013. Ils n’ont trouvé aucune indication selon laquelle la triade noire serait associée à une intelligence particulièrement élevée ni réduite. Tout comme dans la population générale, la plupart des individus psychopathes, narcissiques et machiavéliques se trouvent au milieu, et ceux possédant des quotients intellectuels particulièrement élevés ou faibles sont plus rares. L’échantillon était toutefois composé de personnes actives, à savoir d’individus relativement bien adaptés à la vie en société.
Une étude publiée en 2019, qui incluait les psychopathes en prison et dans les établissements psychiatriques, est parvenue à un résultat différent. Les traits psychopathiques – notamment les composantes impulsives, anxieuses et antisociales – s’accompagnaient en moyenne d’une capacité de réflexion plus faible. En ce qui concerne les autres caractéristiques, le tableau était différent : les personnes très sûres d’elles, dominatrices, effrontées et audacieuses étaient en moyenne un peu plus intelligentes que celles qui ne possédaient pas ces caractéristiques. L’effet statistique de ces traits n’était toutefois pas très important.
Conclusion : le cliché du génie obscur n’est pas confirmé scientifiquement. Il est possible que nous gardions un meilleur souvenir des méchants « intelligents », connus pour leurs crimes astucieux, que des méchants moins intelligents.
Les spéculations sur les raisons qui poussent les gens à commettre des actes criminels ne datent pas de l’engouement pour les séries et les podcasts true crime qui mettent en scène les pires forfaits imaginables. Pourquoi des êtres humains torturent-ils et trompent-ils les autres ? Comment un père ou une mère peut-il tuer ses propres enfants sans défense ? Des cas comme celui de l’Américain Christopher Watts, qui a étranglé sa femme enceinte et étouffé ses deux filles en août 2018 pour commencer une nouvelle vie avec sa maîtresse, ou celui de Jean-Claude Romand qui après avoir menti pendant 18 ans à sa famille sur sa situation financière, tue sa femme au moment où elle va s’en apercevoir, ainsi que leurs enfants, avant de donner la mort à ses propres parents, laissent sans voix. Nous en arrivons souvent à la conclusion qu’il doit y avoir une maladie mentale derrière tout cela. Les auteurs ont-ils été eux-mêmes victimes de violence et de cruauté dans leur enfance ? Après tout, personne ne naît « méchant », n’est-ce pas ?
En fait, il serait tout à fait possible que si, théoriquement. Si l’on se place du côté de la biologie de l’évolution, un comportement sadique, égoïste et de sang-froid – en bref, tout ce que nous appelons « mal » – offrirait dans certaines circonstances un avantage pour la survie. « Pendant la plus longue période que l’humanité a passée sur Terre, nos ancêtres ont vécu en petits groupes qui étaient probablement beaucoup plus violents qu’aujourd’hui », pense le professeur de psychologie Benjamin Hilbig, de l’université de Coblence-Landau, en Allemagne. Selon lui, une certaine variance de traits de personnalité sombres au sein d’une espèce est probablement utile à sa survie. Même pour le bénéfice du groupe, il était probablement nécessaire et bénéfique que celui-ci comptât dans ses rangs des individus qui ne reculaient pas devant la violence, voire y prenaient plaisir.
LES HOMMES, PLUS « MAUVAIS » QUE LES FEMMES ? En 2019, l’équipe de Björn Persson à l’université de Skövde, en Suède, a analysé les résultats d’environ 1 500 hommes et femmes au questionnaire Short Dark Triad. Les scores des hommes sont supérieurs à ceux des femmes sur les trois dimensions principales du Dark Factor (scores sur une échelle 1 à 5).
La « théorie de l’histoire de vie » offre une explication actuellement très discutée sur l’origine du narcissisme, du machiavélisme et de la psychopathie. Cette théorie a été décrite pour la première fois en 2019 par une équipe dirigée par la psychologue Monica Koehn de l’université de Canberra, en Australie. Selon leur hypothèse, chaque animal est confronté à un dilemme : à quoi doit-il consacrer son temps et son énergie ? À vivre bien, ou à avoir le plus de descendants possible ?
Certains individus poursuivent la stratégie du « vivre-vite-et-mourir-jeune ». Au lieu d’entretenir des relations à long terme et de se retenir en cas de doute, ils se contentent de prendre ce qu’ils veulent – sans tenir compte des autres. Cela va de pair avec le fait que les psychopathes changent souvent de partenaires sexuels et ont une espérance de vie plus courte, ce qui a été démontré par une étude finlandaise à long terme en 2018.
Les hommes présentant des traits de personnalité socialement indésirables s’en sortent parfois étonnamment bien sur le marché des rencontres. Christopher Watts a reçu en prison de nombreuses lettres d’amour et des photos en bikini de ses admiratrices (tout comme le meurtrier de masse Anders Breivik, qui abattit 77 personnes et en blessa 151 autres le 22 juillet 2011 en Norvège). Les spécialistes appellent « hybristophilie » le fait que des personnes se sentent sexuellement attirées par des meurtriers et des criminels violents. La science n’a toutefois pas encore élucidé comment de tels phénomènes se produisent et de quelle manière un comportement immoral a pu s’imposer en partie comme une stratégie stable au cours de l’évolution.
Comme la plupart des traits de personnalité, l’expression de notre côté obscur est manifestement liée au patrimoine génétique dont chaque individu est porteur. Les caractéristiques héréditaires se font particulièrement sentir dans la tendance à la psychopathie : jusqu’à 50 % des différences entre les personnes s’expliqueraient par ce facteur. Inversement, cela signifie que les conditions de vie et les expériences déterminent également si – et de quelle manière – une personne donne libre cours à son potentiel obscur, ou le maintient inactif.
D’après ce que nous savons aujourd’hui, le développement précoce de traits de caractère hostiles ne tient pas tellement au fait que l’on ait été battu, brimé ou harcelé pendant l’enfance. Une histoire de développement comme celle de l’adversaire de Batman, le Joker, qui s’est transformé d’un marginal sensible en un clown d’horreur nihiliste par frustration de la cruauté subie est tout sauf typique. « Il est difficile de prédire comment les gens réagissent aux expériences de violence. Les traumatismes interpersonnels ont des effets très différents à long terme et peuvent également se traduire par des anomalies psychiques non liées à la violence, comme la dépression. Il n’existe pas de preuves solides à l’appui de la thèse selon laquelle les gens deviennent souvent eux-mêmes cruels et destructeurs parce qu’on leur a fait du mal », explique Benjamin Hilbig.
L’hypothèse de l’individu transformé en psychopathe par une famille maltraitante ou une société malade, quoique probablement erronée, reflète probablement avant tout notre désir de rendre l’inexplicable compréhensible d’une manière ou d’une autre. Il existe certes des cas de délinquants qui ont subi des violences répétées au cours de leur enfance et qui perpétuent la tradition par la suite. Hilbig fait toutefois référence à une autre explication qui est souvent négligée : la norme sociale. « Ce qui est souvent décisif, c’est de savoir si un comportement est acceptable dans la société ou dans l’environnement proche – même indépendamment du fait que l’on ait été soi-même victime de ce comportement. » Quiconque grandit dans un monde où les actes sans conscience sont monnaie courante a plus de chances de devenir un criminel. Cette idée n’est pas dénuée de fondement, comme le prouvent déjà des délits moins graves, mais qui n’en sont pas moins préjudiciables à la communauté. Ainsi, certains pensent pouvoir se justifier par des arguments douteux : « Tout le monde fraude le fisc, pourquoi serais-je le seul à être honnête ? »
Un questionnaire en 27 points permet de mesurer son score au Dark Factor en ligne. Munissez-vous d’un dictionnaire anglais si vous ne maîtrisez pas tous les termes, car ces outils sont développés pour l’instant aux États-Unis. Si vous êtes prêt, rendez-vous sur openpsychometrics.org/tests/SD3 pour répondre à une version courte du questionnaire Short Dark Triad. Le résultat fournit une indication sur le degré de narcissisme, de machiavélisme et de psychopathie qui vous caractérise par rapport à vos semblables. Dans tous les cas, l’interface recommande d’en communiquer les résultats le moins possible aux autres personnes de votre entourage.
Grâce à ce questionnaire, évaluez, chez votre interlocuteur, cinq facettes « toxiques » reliées à une éventuelle personnalité psychopathique. S’il obtient un score supérieur à 10 dans deux de ces cinq facettes, il représente un danger potentiel.
Vivez-vous avec une personne « toxique », qui vous ment et vous manipule en permanence, uniquement pour arriver à ses fins ? Pour le savoir, il s’agit de bien comprendre qui sont ces individus.

Qu’est-ce qu’un psychopathe et comment s’en prémunir ? Thierry Pham, professeur de psychopathologie légale et directeur du centre de recherche en défense sociale, à Mons, en Belgique, répond à nos questions.
Les psychologues ont identifié deux structures distinctes au sein de notre personnalité : les triades noire et lumineuse, qui sous-tendent nos comportements négatifs et positifs envers les autres. Et ils ont élaboré des tests pour les mesurer…
Les psychopathes ne sont pas dénués d’empathie. Ils jouent avec. Et c’est bien pire.
Corinna Hartmann est journaliste scientifique.
T. M. Härtel et al., Pathways from narcissism to leadership emergence in social groups, European Journal of Personality, 2021.
M. A. Koehn et al., A primer on the Dark Triad traits, Australian Journal of Psychology, 2019.
O. Sánchez de Ribera et al., Untangling intelligence, psychopathy, antisocial personality disorder, and conduct problems : A meta-analytic review, European Journal of Personality, 2019.
I. Zettler et al., Stability and change : The dark factor of personality shapes dark traits, Social Psychological and Personality Science, 2021.
 
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