Pièces complète 2 euro commémorative et accessoires protection pièces

Pakistan: déclin et chute imminente d'Imran Khan – RFI

Ajouter RFI à votre écran d'accueil
© 2023 Copyright RFI – Tous droits réservés. RFI n'est pas responsable des contenus provenant de sites Internet externes. Fréquentation certifiée par l'ACPM/OJD.
Publié le :
Objet d’une motion de censure, le Premier ministre pakistanais Imran Khan lutte pour sa survie politique. Arrivé au pouvoir en 2018 avec des promesses qu’il n’a pas su tenir, cette ancienne star du cricket reconvertie en politique se trouve aujourd’hui dans l’œil du cyclone. Ses alliés mais aussi des dissidents au sein de son propre parti menacent de rejoindre l’opposition et voter pour son renversement.
Avec la mise au vote imminente au Parlement pakistanais d’une motion de censure contre le gouvernement du bouillant Premier ministre Imran Khan et les manifestations et contre-manifestations organisées par l’opposition et le pouvoir afin d’affirmer leurs forces respectives à la veille du vote décisif, la démocratie pakistanaise vient d’entamer une période politiquement dangereuse. La menace de voir les passions déborder dans la rue pèse sur le pays.
La température politique est montée d’un cran ce dimanche 27 mars lorsqu’à l’appel du parti au pouvoir plusieurs dizaines de milliers de ses partisans se sont rassemblés dans la capitale, dans le « Parade Ground » (site de défilés militaires), à quelques encablures du Parlement, pour écouter le Premier ministre. Haranguant la foule pendant presque deux heures, Imran Khan a pourfendu l’opposition, accusant ses leaders, qu’il qualifie de « vermines » et de « vendus », de comploter avec des puissances occidentales pour le déloger du pouvoir. Lundi, les activistes des partis de l’opposition se sont mobilisés à leur tour dans la capitale pour protester contre la politique « désastreuse » du gouvernement.
Beaucoup craignent que les deux camps ne soient dans une trajectoire de collision qui pourrait entraîner le pays dans le chaos. « Dans ces conditions, l’hypothèse de l’armée montant au créneau pour mettre en place un régime militaire ne peut être exclue », déclare Jean-Joseph Boillot, spécialiste de l’Asie du Sud et chercheur associé à l’IRIS (1)   
« Je n’ai pas été élu pour contrôler les prix des tomates »
La dernière fois que le gouvernement Khan avait dû faire face à une motion de défiance au Parlement, c’était il y a un an. L’ancienne star du cricket reconvertie en politique avait survécu malgré sa faible majorité à la Chambre. Cette fois, le vote survient dans un contexte de rapports de force défavorables au gouvernement, avec une opposition unie, déterminée à faire tomber le Premier ministre.
Imran Khan est accusé d’avoir mal géré l’économie et d’avoir terni l’image du Pakistan à l’extérieur. Les opposants pointent du doigt le timing maladroit de la dernière visite officielle de Khan à Moscou, le jour même du déclenchement de la guerre en Ukraine, ce qui, selon les observateurs, a eu pour conséquence d’isoler le Pakistan sur la scène internationale. Au cours des dernières années, le Pakistan s’est aussi rapproché de la Chine, devenue une alliée stratégique et premier partenaire commercial d’Islamabad. Il ne fallait pas plus pour qu’on parle de la naissance d’un axe Islamabad-Pékin-Moscou, à vocation nécessairement anti-occidentale.  
Mais la crise que traverse le Pakistan a ses origines essentiellement dans la politique domestique. La coalition au pouvoir est sur le point d’exploser, avec les alliés d’Imran Khan menaçant de rejoindre l’opposition. Sans ces alliés, le gouvernement n’aura pas le nombre magique de 172 députés, la majorité requise pour rester au pouvoir. Comme un malheur n’arrive jamais seul, à l’intérieur de son propre parti, le Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI/ Mouvement du Pakistan pour la Justice), le chef du gouvernement fait également face à une dissidence grandissante, avec quelque 20 à 40 députés menaçant de faire défection et voter en faveur de son renversement. Le gouvernement a en effet saisi la Cour suprême demandant que les votes des parlementaires rebelles soient déclarés invalides.
L’opposition, qui fait les frais de la campagne anti-corruption du gouvernement depuis sa formation il y a trois ans et demi, exploite sans scrupules les divisions au sein de coalition au pouvoir. Elle mise aussi sur le mécontentement populaire montant suscité par l’inflation galopante que le gouvernement semble incapable de juguler. Manifestement gêné aux entournures par la situation économique dégradée dans laquelle le pays se débat, Imran Khan a déclaré, lors d’un meeting avec ses partisans, qu’il n’avait pas été élu pour « contrôler les prix des tomates et des pommes de terre, mais pour bâtir une nation ». L’opposition souligne le cynisme de ses propos et sent que l’heure de la revanche a sonné.
D’autant que le Premier ministre qui avait bénéficié de l’appui de l’establishment militaire lorsqu’il est arrivé au pouvoir en 2018, est en bisbille avec les généraux pour avoir notamment traîné les pieds en octobre dernier, retardant la nomination d’un des leurs à la tête des services secrets de l’armée pakistanaise, l’Inter-Services Intelligence (ISI). « Force est de constater que la situation se présente plutôt mal aujourd’hui pour Imran Khan, qui n’a manifestement ni la majorité au Parlement ni la confiance de l’armée », confirme Gilles Boquérat, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique et spécialiste de l’Asie (2).  
Du cricket à la politique
C’est auréolé de sa réputation de capitaine charismatique de l’équipe nationale du cricket qu’Imran Khan est entré en politique  dans les années 1990. À l’époque, la vie politique pakistanaise était dominée par des militaires d’une part et d’autre part par des dynasties de grands féodaux et de magnats industriels, notamment les Bhutto et les Sharif. Il était difficile d’y percer si on n’était pas issu du sérail. Imran Khan a raconté ses longues années dans les méandres du pouvoir, à la tête d’un parti qui a longtemps vivoté avec un seul parlementaire à son actif et peinait à s’imposer.
La situation politique change à l’approche des législatives de 2018, avec les médias faisant leurs Unes sur des scandales de corruption à répétition impliquant les principales dynasties politiques. Avec son idéologie mêlant le populisme et conservatisme religieux, Imran Khan apparaît alors, aux yeux de l’establishment militaire qui tire les ficelles de la vie politique, comme le candidat idéal pour remplacer les politiciens véreux, rejetés par le grand public.
« À l’époque, on assistait à une véritable désaffection populaire par rapport aux partis traditionnels, explique Gille Boquérat. Le triomphe d’Imran Khan au scrutin législatif, avec 159 sièges contre 82 pour le PML-N de l’ancien Premier ministre Nawaz Sharif et 55 sièges pour le PPP dirigé par la famille Bhutto, était le résultat de la conjonction de deux éléments, à savoir le soutien des militaires et la demande de la population  pour un renouvellement réel du personnel politique. »
Cette victoire était aussi le résultat d’une campagne électorale rondement menée, avec la promesse faite par Imran Khan d’accélérer l’avènement d’un « nouveau Pakistan » (naya Pakistan) et sa détermination affichée de mener une lutte sans merci contre la corruption dans la vie politique. Sur le second point, le gouvernement fera du zèle, s’acharnant contre les principaux leaders des partis d’opposition, au point que la lutte contre la corruption a pu parfois ressembler à des règlements de compte politiques. Quant au premier point concernant les réformes économiques et sociales, celles-ci ont été retardées, faute d’argent dans les caisses de l’État. Entre-temps, la lutte contre la pandémie était devenue la priorité. « Trois années et demi se sont écoulées depuis l’arrivée au pouvoir du gouvernement d’Imran Khan en août 2018. La population attend toujours l’avènement du naya Pakistan », se lamente Gilles Boquérat.
L’amateurisme économique et une opposition « démoniaque »
« Le bilan du gouvernement Khan est particulièrement décevant sur le plan économique », affrme pour sa part l’économiste Jean-Joseph Boillot. Selon ce dernier, l’économie a été le talon d’Achillles d’Imran Khan qui a dû changer de ministre des finances et de conseillers économiques à au moins quatre reprises en trois ans. « L’amateurisme en matière économique ne se pardonne pas », souligne l’expert.
« On a ainsi vu, raconte Jean-Joseph Boillot, la situation de la balance des paiements, traditionnellement déficitaire au Pakistan, s’aggraver rapidement à cause de la chute incontrôlée  de la roupie pakistanaise. Or, soucieux de ne pas se placer sous la gouverne des Américains dont il supporte mal la suffisance, Imran Khan a tardé  à recourir aux bailleurs de fonds institutionnels avant d’être obligé l’année dernière à se tourner vers le FMI, qui lui a octroyé un prêt de 6 milliards de dollars. En contrepartie, Islamabad a dû engager des réformes douloureuses qui se sont traduites par le renchérissement des prix des hydrocarbures et de l’électricité. La situation s’est compliquée un peu plus avec l’envolée des prix des produits alimentaires, à la suite de l’arrêt des importations de blés russes et ukrainiens dont le Pakistan est particulièrement dépendant. Résultat : une inflation galopante de 15 à 16% qui touche de prime abord les petites gens qui avaient cru aux promesses de développement immédiat du fringant « kaptaan » du PTI. »  
Selon Gilles Boquérat, « le désenchantement touche aussi la jeunesse urbaine, éduquée, qui avait voté pour ce nouvel homme fort, dans l’espoir qu’il saurait être un leader progressiste, et  ferait bouger les lignes dans une société pakistanaise profondément conservatrice et patriarcale ». Il se trouve que l’homme a beaucoup évolué depuis ses années londoniennes de playboy et de noceur compulsif. Marié aujourd’hui en troisième noce à sa conseillère spirituelle, Bushra Bibi, il regarde la politique à travers un prisme moralisateur et religieux, n’hésitant pas à qualifier ses opposants, qui veulent sa peau, de « malfaisants » et voire « démoniaque ». Sa référence est plutôt le Coran que le bon sens et la vision stratégique.
Prenant la parole lors de la récente réunion de l’Organisation de la coopération islamique qui s’est tenue à Islamabad, Imran Khan s’est longuement attardé sur l’identité islamique du Pakistan, sans oublier de rappeler qu’il est entré en politique, inspiré par sa lecture de la vie du Prophète, qui oeuvrait pour fonder une société « parfaite ». Or, dans l’esprit du leader du PTI, cette quête de la société parfaite ne va pas de pair avec le droit de ses concitoyens à la liberté d’expression et de critique. C’est ce qui explique que, depuis l’arrivée au pouvoir d’Imran Khan au Pakistan, les journalistes et les blogueurs sont systématiquement empêchés de couvrir les « sujets qui fâchent », à coup d’intimidations, pouvant aller jusqu’à l’agression physique et des menaces de mort, comme on peut le lire dans les publications de Reporters sans frontières. Les harcèlements de ses journalistes ont notamment conduit la BBC, en 2021, à interrompre son journal en ourdou.    
« Absolutely not ! »
En quatre années d’exercice de pouvoir, Imran Khan s’est révélé être un homme politique à la fois naïf et brutal, fier et incontrôlable. « L’armé pakistanaise qui l’a soutenue à ses débuts l’a compris à ses dépens, déclare Gilles Boquérat. Elle l’a compris le jour où Imran Khan a envoyé balader les Américains en opposant une fin de non-recevoir catégorique à leur demande d’installer des bases au Pakistan pour intervenir en Afghanistan, après le retour des talibans à Kaboul. Une fin de non-recevoir motivée par un anti-américanisme forcené que les haut-gradés pakistanais n’apprécient que moyennement. Ils sont nombreux à avoir été formés dans les écoles militaires occidentales et n’ont pas très envie de voir leur pays s’aligner sur une vision stratégique sino-russe. » « L’équation géopolitique du Pakistan a toujours été basée sur une neutralité entre l’Est et l’Ouest. C’est son ADN », renchérit Jean-Joseph Boillot pour sa part.
Or, il se trouve que dimanche dernier, au « Parade Ground » d’Islamabad, à l’occasion du rassemblement des partisans du PTI, les vendeurs ambulants avaient le sourire aux lèvres, car ils avaient réussi à écouler tous leurs stocks de T-shirt affichant « Absolutely not ! ». « Absolutely not ! », avait répondu Imran Khan aux émissaires de la CIA réclamant un lopin de terre sur le territoire pakistanais afin de mener leurs opérations de contre-terrorisme dans l’Afghanistan post-retrait américain !
Les T-shirts à l’effigie du Premier ministre se sont vendus comme de petits pains. C’est sans doute la preuve que malgré les errements politiques et stratégiques du gouvernement (sortant), les années Imran Khan ont marqué les imaginaires.
(1)     Jean-Joseph Boillot, Le Pakistan : économie et développement. Editions L’Harmattan, 1985
(2)    Gilles Boquérat, Le Pakistan en 100 questions. Editions Tallandier, 2018
NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail
Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI
Pakistan: une nouvelle assemblée régionale dissoute par Imran Khan
Nouvelle-Zélande: la Première ministre Jacinda Ardern annonce sa démission, faute d'«énergie»
Catastrophe de Fukushima: la justice confirme l'acquittement d'anciens dirigeants de Tepco
Australie: le racisme envers les aborigènes au cœur du procès sur le meurtre d'un adolescent
Australie: les hélicoptères européens «Taipan» seront remplacés par du matériel américain
Corée du Sud: perquisition des locaux d'un syndicat pour liens présumés avec la Corée du Nord
Philippines: la Nobel de la paix Maria Ressa acquittée d'évasion fiscale
Afghanistan: certaines ONG reprennent partiellement leurs activités en employant des femmes
Population chinoise en baisse: «Un échec de la politique démographique de Pékin»
Le président du Vietnam, Nguyen Xuan Phuc, démissionne
Narendra Modi, ambassadeur du tourisme de luxe en Inde
La population chinoise est en déclin pour la première fois depuis soixante ans
Pékin espère relancer son économie en desserrant son contrôle sur les géants de la tech
Le contenu auquel vous tentez d'accéder n'existe pas ou n'est plus disponible.

source

A propos de l'auteur

Avatar de Backlink pro
Backlink pro

Ajouter un commentaire

Backlink pro

Avatar de Backlink pro

Prenez contact avec nous

Les backlinks sont des liens d'autres sites web vers votre site web. Ils aident les internautes à trouver votre site et leur permettent de trouver plus facilement les informations qu'ils recherchent. Plus votre site Web possède de liens retour, plus les internautes sont susceptibles de le visiter.

Contact

Map for 12 rue lakanal 75015 PARIS FRANCE