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"On peut tout imposer": immersion au cœur d'une formation des … – Var-matin

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Comment éduquer son chien? Quelle attitude adopter face à un molosse? Pendant quatre heures, Bernard Bretignier, dresseur, a formé trois futurs maîtres de chiens dangereux.
Il serait facile de croire que c’est un jeu d’enfant. Regard attentif, tourné vers son maître, Bella s’assoit, s’allonge, et galope vers la balle au moindre ordre.
En l’absence de consignes claires de la part de Bernard Bretignier, éducateur canin habilité par la préfecture à dispenser la formation des maîtres de chiens dangereux, l’American Staffordshire Terrier ne bronche pas. Même avec une friandise sous les yeux.
“De toute manière, avec n’importe quel chien, on peut tout imposer”, assure le dresseur. Et ce n’est pas Bella – catégorisée 2 – qui prouvera le contraire.
Pendant plusieurs minutes, la chienne poursuit son numéro d’obéissance sous le regard admiratif de trois futurs propriétaires. Séduits par les compétences du Callassien, ils sont venus d’Avignon et de la région parisienne pour être formés sur une journée à l’éducation de leur jeune molosse à “La Griffe du Dragon”, à Callas.
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Dans une autre vie, Bella aurait pu être très différente. Sans le dressage adéquat, “elle serait sûrement inapprochable” aujourd’hui. Car ce comportement exemplaire ne s’obtient pas en travaillant “quinze minutes par jour, comme certains éducateurs charlatans peuvent parfois promettre”, grince Bernard Bretignier, également éleveur d’American Staffordshire Terrier.
Le processus est long et exigeant. “Tout se joue entre l’âge de 2 et 8 mois, jauge-t-il, s’appuyant sur ses 25 ans d’expérience. Pendant cette période, le chiot va tester son propriétaire en lui montant dessus ou en lui léchant la main. Si le maître ne comprend pas qu’il s’agit d’un jeu de domination et qu’il se montre trop affectueux sans jamais rappeler à l’animal sa place, il va acquérir de plus en plus de confiance et, in fine, va inverser le rapport de dominance.”
C’est ce que les participants en formation veulent éviter à tout prix. Car mois après mois, le comportement du chien va progressivement se figer dans des habitudes, bonnes ou mauvaises. “Entre 1 et 4 ans, c’est déjà beaucoup plus difficile de rattraper une mauvaise éducation. Après cette période charnière, c’est l’âge de la maturité définitive. À ce moment-là, il n’y a presque plus rien à faire.”
Il suffira alors de la moindre frustration, incompréhension, pour que le canidé mal éduqué grogne sur son maître, voire le morde. “Pour empêcher le scénario du pire, il faudra donc sans cesse rappeler au chien sa juste place, avec une voix à l’intonation claire et forte. À chaque fois, répéter l’action souhaitée à travers une activité ludique sera nécessaire pour le conditionner. Et ce, sans oublier les friandises! C’est donnant-donnant.”
Difficile d’interrompre Bernard Bretignier, tant il connaît par cœur son métier. Mais à l’évocation de la terrible attaque des deux Rottweilers survenue mercredi 11 janvier à Draguignan, il marque une courte pause.
“Lorsqu’un chien mord, ou a n’importe quel comportement agressif, c’est toujours et exclusivement la faute du maître, assure-t-il. Un Rottweiler a, par essence, été sélectionné par l’homme pour être un gardien de bovins, ce que l’on appelle un bouvier. Ils ont des instincts de garde très développés, et ils ont pris cet homme pour une menace.”
Toutefois, le dresseur ne cherche aucune excuse face à un tel drame. “Ces deux animaux n’ont reçu aucune éducation, c’est clair. Ce n’est pas une question de savoir si le chien est gentil ou non, comme aiment le dire certaines personnes. Il est dressé ou n’est pas dressé, point à la ligne”, condamne-t-il, fustigeant l’absence régulière de laisse ou de muselière à cause de propriétaires “irresponsables et hors-la-loi”.
Qu’aurait pu donc faire François Giannesini, seul, face à deux molosses de catégorie 2? “Tout dépend de la topographie et du comportement des chiens à l’instant T”, admet Bernard Bretignier.
Dans le cas de l’incident survenu début janvier, le mieux aurait été “d’avoir une bombe au poivre à disposition et de la pulvériser dans les yeux des animaux”.
Mais faute d’un tel équipement, “continuer son jogging en les ignorant aurait pu fonctionner, même si je ne peux en être certain. Ou alors, dans le pire des cas, vite filer se percher dans un arbre, si arbre il y a bien sûr…” Une gageure.
Mais en grand amoureux des chiens, l’éducateur canin s’interdit de mettre tous le monde dans le même sac. “Un caniche ou n’importe quel chien mordeur évalué avec une dangerosité maximale de niveau 4 par un vétérinaire agréé, sera catégorisé parmi les canidés dangereux, au même titre qu’un pit-bull, rappelle-t-il. Si un Rottweiler ou un American Staffordshire Terrier est très bien dressé, il sera au niveau 1 de dangerosité, malgré le fait qu’il soit par défaut catégorisé en raison de sa morphologie puissante.”
Remettant à nouveau au centre la responsabilité du maître. Et la responsabilité des pouvoirs publics… “Au lieu de mettre en place une catégorisation des races de chiens, il faudrait pour tous chiens de plus de cinq kilos un minimum d’heures d’évaluation auprès de spécialistes, propose Bernard Bretignier. Un carnet de suivi également, avec toutes les heures d’éducation que le chien a suivi, tamponné et signé. Qui engage la responsabilité du propriétaire, assurant qu’il contrôle son chien.”
L’affaire est généralement très vite pliée. “C’est simple, je refuse 90 % des demandes d’acquisition de chiens catégorisés”, révèle Bernard Bretignier, éleveur d’American Staffordshire Terrier, race de catégorie 2 parmi les canidés jugés comme “dangereux” à cause de leur puissance physique. “Il me suffit d’entendre l’intonation de la voix et quelques éléments de motivation pour me décider.”
Qu’est-ce qui motive une personne à vouloir ce type de chiens? Les contraintes sont importantes et peuvent rebuter: muselière exigée sur la voie publique; obligation de tenir son animal en laisse par une personne majeure ayant passé une attestation d’aptitude à la détention de chiens catégorisés, et donc possédant un permis, sans compter la multitude les papiers administratifs, avec l’assurance responsabilité civile, le certificat de naissance qui prouve que c’est une pure race pour la catégorie 2, la carte Icad (puce électronique) au nom du propriétaire; les vaccins contre la rage; déclarer le chien en mairie pour avoir le permis de détention provisoire; puis encore des étapes pour obtenir le permis définitif.
“C’est beaucoup de boulot au début”
Il en faudra bien plus pour décourager Katia et Thomas Lomgueserre. Car pour ce couple d’Avignonnais, avoir un “Staff” est l’aboutissement de plusieurs années de réflexion. “On attendait que nos enfants soient adolescents pour nous décider, avant c’était trop de travail et de risques, aussi.”
“C’est un chien qui a un tempérament très familial”, ajoute Jérôme Robert, venu de région parisienne pour passer la formation. Mais la raison principale, “c’est le physique très esthétique de ce chien. Tout en muscles et à poils ras brillants”, détaillent-ils, des étoiles dans les yeux.
De plus, Aude, qui assiste Bernard Bretignier dans son travail, précise que dans le cas de l’American Staffordshire Terrier, “une fois dressé, son comportement est très stable dans le temps. C’est beaucoup de boulot au début, mais ensuite on est peinard.” Une qualité également présente chez le Rottweiler.
Ne restera plus que le jugement de la population. Que Thomas Lomgueserre écarte de la main: “Je me fiche du regard des autres.”
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