ACCUEIL >> Emploi >> Grande Démission : quand les salariés disent stop
Ces dernières années, nombreux sont les salariés à souhaiter mieux sur le plan professionnel. Une tendance accentuée par la crise sanitaire, et qui se traduit le plus souvent par des vagues de départs et des reconversions. Zoom sur le phénomène de "Grande Démission".
“La Grande Démission” (ou “The Big Quit” en anglais) est un phénomène tout droit venu des États-Unis. Comme l’explique Claude Calmon, fondateur de Calmon Partners, un cabinet de recrutement spécialisé dans la finance, cette tendance est née après le premier pic de la crise du Covid en 2020, « et notamment lors des nombreux confinements, pendant lesquels plusieurs secteurs d’activité étaient à l’arrêt. »
Si le phénomène arrive un peu plus tard chez nous, la France n’est pas en reste. En effet, les derniers chiffres de la Dares en témoignent. En juillet 2021, le taux de démission chez les salariés français en CDI, est près de 20% plus élevé que le chiffre de 2019 (pré-Covid). Il en est de même pour les salariés en CDD, qui sont à cette période plusieurs à demander une rupture anticipée (+25% par rapport à 2019). Ces résultats sont d’autant plus surprenants qu’ils sont inédits en France, où le taux de démission se maintient plutôt à la baisse depuis plusieurs années. Toutefois, de tels chiffres peuvent s’expliquer par la mise en place de différentes aides à la reconversion et notamment le dispositif démissionnaire, qui permet aux salariés ayant quitter leur emploi de bénéficier des allocations chômage dans la mesure où ils ont pour projet de changer de métier ou de se lancer dans l’entrepreneuriat.
Si l’économie est quelque peut repartie depuis le début de l’année 2022, ces changements sont la source de conséquences durables. « Beaucoup d’entreprises qui ont du mal à recruter », explique Claude Calmon, « cela crée un grand trou d’air au sein de certains secteurs. » Un phénomène d’autant plus vrai en ce qui concerne les métiers les plus précaires, qui nécessitent souvent des efforts physiques importants, pour un salaire moindre. Ainsi, des domaines comme la restauration, l’hôtellerie, ou encore les services à la personne, manquent de candidats et peinent à répondre aux demandes et besoins de leurs clients.
Plusieurs raisons viennent expliquer la “Grande Démission”. Ce n’est pas un hasard si cette tendance a d’abord vu le jour pendant la crise sanitaire. Les confinements et les mesures permettant le télétravail ont donné aux salariés la possibilité d’aborder le travail sous un angle nouveau. « Avec le confinement, les salariés se sont rendu compte qu’ils pouvaient travailler à distance et n’ont donc plus envie de subir les trajets quotidiens et les aléas de la vie au bureau. »
Par ailleurs, les défis de santé, mais aussi écologiques, politiques et économiques qui ont pris de l’ampleur ces dernières années, ont accentué l’envie des salariés de trouver du sens dans leur travail.
Si auparavant les salariés accordaient de l’importance à des critères tels que le salaire ou le prestige de l’entreprise, beaucoup prennent désormais en compte de nouveaux éléments lors de leur recherche d’emploi. Le bien-être, l’épanouissement personnel ou encore, le respect de certains idéaux entrent maintenant en ligne de compte.
Si certains secteurs sont lésés depuis le début de la crise sanitaire, on observe une situation inverse dans d’autres, pour lesquels on a plutôt une situation de plein emploi. « On a observé un énorme boom du numérique, notamment dû à la digitalisation croissante de nombreuses activités. Beaucoup de sociétés ont été créées dans le secteur ces deux dernières années. Celles-ci ont levé des fonds et sont souvent en recherche de candidats. C’est un domaine d’activité dans lequel il y a de nombreux recrutements. »
Le Covid a aussi permis de mettre en lumière certains secteurs. C’est notamment le cas des services à distance (plateformes de e-commerce, consultations médicales en visioconférence, formations professionnelles en ligne, etc.). Ceux-ci ont été particulièrement prisés par les clients ces dernières années, ce qui a permis à certaines entreprises de connaitre un réel développement économique.
Cette période de mutations se traduit aussi par un changement dans le rapport au travail. Comme l’affirme Claude Calmon, « si avant, aller au travail correspondait à se lever le matin, passer plusieurs heures dans les transports en commun et travailler dans un bureau toute la journée, cela n’est plus vraiment le cas maintenant. »
En effet, lorsqu’ils recherchent un emploi, les salariés sont désormais attentifs à l’aménagement du temps de travail. Plus que jamais, il est nécessaire que le poste occupé s’adapte au mode de vie du travailleur et non l’inverse. Nombreux sont ceux qui souhaitent disposer d’un emploi du temps hybride, qui leur permet de concilier télétravail avec temps passé au bureau. Certains sont même en recherche d’un poste leur permettant de travailler à distance toute l’année.
Ces changements au sein du monde du travail participent aussi à faire évoluer les relations entre salariés, mais aussi les relations avec son manager. Souvent, les interactions sont devenues plus informelles, un basculement engendré aussi par des modifications de l’espace de travail, qui nécessairement a été repensé pour s’adapter aux nouvelles attentes des collaborateurs. « On a vu l’émergence de lieux de coworking, à mi-chemin entre le bureau et la maison. »
Par ailleurs, moins de temps passé sur le lieu de travail nécessite d’être d’autant plus efficace. En effet, « lorsqu’on est au bureau seulement un ou deux jours dans la semaine, il est nécessaire d’être productif en ce qui concerne les réunions entre collègue ou avec son manager. »
Depuis le début de la crise sanitaire, le phénomène de “Grande Démission” a permis de repenser la façon d’aborder le travail. « La relation au temps de travail et au temps passé au bureau a changé, et va très sûrement continuer d’évoluer. »
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