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Airbus : les dessous d'une réorganisation sous un seul et même nom – Les Échos

Avec l'adoption d'un modèle intégré, le groupe aéronautique entend accélérer les processus de décision et supprimer les silos. Une intégration d'ampleur en cours d'élaboration. On sait aujourd'hui que la réorganisation coûtera un millier d'emplois.
Par Valerie Landrieu, Marie-Sophie Ramspacher
Le groupe Airbus met la dernière main à l'ultime étape d'un processus d'intégration entamé il y a dix ans. D'ici au 1er janvier 2017, au terme de l'absorption de l'avionneur Airbus par sa maison mère Airbus Group, toutes les divisions – avions commerciaux, hélicoptères, défense et spatial – prendront le nom d'Airbus avec, à la clef, la disparition de la structure corporate. Un changement d'organisation qui « s'inscrit dans une suite logique de l'histoire », rappelle Jérôme Bouchard, associé aéronautique du cabinet Oliver Wyman, qui avait été mandaté il y a cinq ans pour faire passer l'entreprise de sept à cinq niveaux hiérarchiques. « Depuis plusieurs années, l'organisation est considérée par l'entreprise comme un vecteur de performance et est pilotée comme un actif », souligne le consultant.
Or, même si le carnet de commandes est plein avec plus de 6.700 avions à livrer pour dix années de plan de charge, l'entreprise reste pénalisée par des centres de décision séparés – « de puissantes divisions qui se comportent en baronnies », selon un observateur – et une confusion autour des marques, tandis que la concurrence s'aiguise. « Les avions du chinois Comac finiront par voler. Embraer et Bombardier fabriquent des modèles de plus en plus gros, et SpaceX lance des fusées qu'il réussit même à récupérer », décrit Thierry Baril, le DRH du groupe. Le processus, présenté le mois dernier par le président Tom Enders comme une « possibilité de consolidation et de réduction des coûts au plus haut niveau de l'entreprise », devrait entraîner une refonte d'ampleur, qui a commencé à se traduire par une nouvelle répartition des rôles au sein de l'équipe dirigeante.
« Entreprise complexe et lourde, issue de fusions successives, nous aspirons à devenir une entreprise normale », explique Thierry Baril. A partir de 2012, une première phase a consisté à intégrer successivement les finances, les ressources humaines, puis la communication et les services juridiques, fonctions qui conservaient pourtant plusieurs patrons.
La refonte structurelle ébauchée aujourd'hui concrétisera la simplification de la gouvernance : « Pour réussir à développer un avion plus rapidement, l'objectif est d'être à la fois plus efficace, plus flexible et plus performant. Dans ce cadre, il n'y a avait plus la nécessité de maintenir deux directions corporate », argumente le DRH, qui souhaite faire entrer « le lean management au siège ».
L'une des vocations de la fusion est la suppression d'un certain nombre de strates de direction intermédiaires. « D'une organisation très verticale, avec cinq niveaux hiérarchiques, nous allons poser la question du bon dimensionnement », poursuit Thierry Baril. Alléger l'organigramme permettra de resserrer le contrôle sur les fonctions clefs et de réduire l'autonomie controversée des divisions. « Les patrons experts, à fort leadership, offrent des avantages, mais aussi quelques inconvénients, et notamment celui de reproduire l'ordre établi et de ne pas favoriser l'innovation », remarque un fin connaisseur du groupe.
Dans la nouvelle configuration, Tom Enders, ancien président exécutif d'Airbus Group, prend tous les pouvoirs et devient CEO d'Airbus. Pour l'épauler dans sa tâche, il a nommé, jeudi dernier, un secrétaire général et directeur de cabinet, Patrick de Castelbajac, ce qui en dit long sur le rôle que l'ancien PDG d'ATR est voué à jouer dans la transformation.
Fabrice Brégier, jusqu'ici président de la division Avions commerciaux – 70 % du chiffre d'affaires du groupe – est nommé parallèlement « COO », l'équivalent d'un directeur général des opérations. Ce dernier, deuxième poids lourd d'Airbus après le président exécutif (sans détenir formellement le titre de numéro deux) a la charge de la qualité, de la supply chain et de la transformation du groupe. « Fabrice Brégier se voit confier un rôle majeur, l'efficience de l'organisation – un enjeu considérable, compte tenu des objectifs de livraison revus à la hausse – tout en perdant la responsabilité de la stratégie de sa division, mais aussi celle de la R&D passée groupe, des finances et du marketing », décrypte Hervé Borensztejn, managing partner de la practice leadership consulting chez Heidrick & Struggles. Ses anciens alter ego, présidents des autres divisions historiques, conservent leurs prérogatives et se voient ajouter des responsabilités transverses. Guillaume Faury, CEO d'Airbus Helicopters, aura la responsabilité de l'ingénierie. Il devra repérer les « best practices » et les déployer dans l'ensemble des métiers. Dirk Hoke, CEO d'Airbus Defence and Space, prendra la transformation digitale et les nouveaux services associés d'Airbus, avec cette même mission de travailler hors des silos pour renforcer les échanges.
Les derniers ajustements devraient être connus d'ici à la fin de l'année, mais tous les membres du comité exécutif se verront attribuer des responsabilités transverses à l'image de Marwan Lahoud, directeur de la stratégie, de l'international et des affaires publiques, qui devrait voir ses fonctions étendues au sein du nouvel Airbus. Une manière aussi de retenir un profil souvent donné partant pour une fonction de CEO.
La transversalité est-elle un gage d'efficacité ?
« Le comité exécutif resserré permet de définir les responsabilités, d'y porter tous les sujets et tous les points de vue au profit d'une gouvernance plus transparente », analyse Hervé Borensztejn. « Confier des doubles casquettes aux patrons des divisions est en soi une innovation », note Sébastien Maire chez Oliver Wyman.
Sur le terrain en tout cas, l'essai serait déjà concluant : sur certains marchés étrangers, le groupe a déjà mis en place des responsables commerciaux capables de défendre aussi bien les intérêts d'Airbus avions commerciaux que ceux d'Airbus Defence and Space.
La future organisation, qui prendra forme au printemps 2017, n'a pas encore de contours. Après la fusion juridique, le management étudiera cet hiver, fonction par fonction, l'impact de la fusion sur le travail et analysera en détail les « duplications », car la vocation de la refonte est de les supprimer : « Le projet est d'aplatir, mais aussi de redonner du sens à l'autonomie, à la responsabilisation et à la coopération », insiste Thierry Baril.
Si en matière de processus d'achats, la simplification des workflows a déjà été effectuée, la qualité fera partie des gros chantiers de rationalisation : « Des verrous bureaucratiques se sont constitués au fil du temps, par accumulation de niveaux successifs. Nous devons les identifier de manière à rendre notre organisation plus agile », constate Thierry Baril, qui espère les supprimer « sans remettre en question la qualité ». Sur tous les sites et y compris au nouveau siège de Toulouse, conçu pour accueillir et regrouper des fonctions transverses dispersées en région parisienne et à Munich, la façon de travailler va changer. Il reste à savoir ce que seront les conséquences sociales de cette fusion, sur l'emploi de tous, y compris celui des cols blancs et des ingénieurs.
Tout en disposant d'une organisation calquée sur celle de son grand concurrent Boeing, groupe intégré fonctionnant avec plusieurs activités et métiers, Airbus espère s'en différencier et prendre quelques longueurs d'avance en matière d'agilité. « Les efforts de Boeing ont davantage porté sur la performance opérationnelle que sur la capacité de transformation organisationnelle », souligne Jérôme Bouchard, chez Oliver Wyman. Quoi qu'il en soit, « le squelette d'une organisation ne dit rien du mode de fonctionnement, c'est le câblage à venir des terminaisons nerveuses d'une structure de 130.000 personnes qui permettra de réussir la transformation », alerte Hervé Borensztejn. Dans ce processus, la maîtrise du calendrier sera clef : « Le changement étant une période désagréable, chaque manager devra être fixé sur son destin le plus vite possible, faute de quoi les vrais enjeux de la transformation – construire un Airbus plus collaboratif, plus digital et plus compétitif – ne seront pas servis. »« Supprimer des échelons peut faire craindre de moindres relais de carrière », signale pour sa part Nicolas Arnaud, cotitulaire de la chaire Innovations managériales d'Audencia Business School.
Il reviendra également aux membres du comité exécutif de veiller à respecter scrupuleusement leur nouveau territoire : à Tom Enders la stratégie et l'animation du comité de direction, à Fabrice Brégier l'agilité de l'organisation.
Enfin, le modèle de l'intégration devra faire ses preuves. Tom Enders avance que les divisions Airbus Defence and Space et Airbus Helicopters « bénéficieront largement de cette fusion par un soutien commercial plus ciblé et des coûts réduits ».
Mais ce modèle de concentration interne n'est pas sans risque, notamment en termes de souplesse et réactivité. « Par exemple, Bernard Arnault a toujours souhaité conserver l'autonomie de Louis Vuitton au sein de LVMH pour garantir au groupe une belle forme d'agilité », relève Hervé Borensztejn.
L'aplatissement de la hiérarchie dans les fonctions support ne résoudra pas les problèmes de l'A400M ou des hélicoptères, note un expert, qui s'alarme de possibles conflits d'agenda des patrons de divisions – vocable en passe de changement – au vu de leurs nouvelles responsabilités. La réussite du passage d'un holding stratégique à une organisation intégrée peut être soumise à quantité d'obstacles mais, pour de nombreux observateurs, les principaux problèmes relèvent des hommes en place qui avaient jusqu'à présent disposé de tous les leviers stratégiques et opérationnels. « La réussite du projet va dépendre de la capacité du numéro un à faire pratiquer à l'équipe de tête un jeu collectif », pointe Christine Greiner, une ex-consultante d'Oliver Wyman, aujourd'hui fondatrice du cabinet C_Suites Conseil. De fait, en donnant des responsabilités transverses aux patrons de divisions, Tom Enders crée des occasions d'arbitrage « et se replace au centre du jeu », note un autre connaisseur du dossier.
LIRE : La réorganisation d'Airbus coûtera un millier d'emplois
Valérie Landrieu et Marie-Sophie Ramspacher
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