À la tête du Pôle national Cirque et Arts de la rue d’Amiens, il portera un projet fédérateur alliant formes traditionnelles du cirque et ouverture sur les esthétiques actuelles.
Après deux décennies passées à arpenter les pistes et les plateaux, Yannick Javaudin a connu une reconversion des plus réussies puisqu’il fut successivement administrateur de la Compagnie Cheptel Aleïkoum puis du Théâtre équestre Zingaro, et enfin nommé en 2017 à la tête de L’Entracte, scène conventionnée d’intérêt national Art en territoire de Sablé-sur-Sarthe. Durant toutes ces années, l’envie de diriger un Pôle national Cirque ne l’a pas quitté. « J’aime développer des projets, me considère comme un producteur et suis surtout passionné par la transmission », explique-t-il. Cet amoureux de la littérature confie également vivre un rêve en prenant aujourd’hui les rennes d’un équipement inauguré voici plus d’un siècle par Jules Verne, auteur qui a bercé son enfance et nourri son imaginaire. Conscient de l’héritage qui lui est confié, et très attaché à la spécificité de l’espace circulaire, Yannick Javaudin ambitionne de conjuguer des productions de cirque traditionnelles et d’autres plus contemporaines. L’un des axes forts de son projet consistera ainsi à remettre à l’honneur « les numéros », essence à ses yeux de la performance circassienne, qui seront présentés lors de soirées Cabaret où des artistes issus d’horizons différents viendront confronter leurs univers ; en particulier les talents émergents. « Aujourd’hui, observe le directeur du Cirque Jules Verne, les jeunes diplômés d’une école possèdent souvent un numéro et se sentent obligés de bâtir un spectacle autour. Un endroit comme le cabaret leur offrira la possibilité de s’aguerrir artistiquement. »
Outre les numéros, et d’autres formes courtes proposées en première partie d’un spectacle sur la piste ou le parvis du Cirque (dans le cadre d’une scène ouverte baptisée « L’Attraction Avant »), la programmation se voudra très ouverte aux esthétiques d’aujourd’hui, au jeune public ainsi qu’à des spectacles hybrides associant le théâtre, la danse et la musique, au cirque. Deux rendez-vous musicaux intitulés « Le Grand Écart » encadreront la saison, avec la présence de « musiciens aux accents circassiens », tels qu’Aloïse Sauvage, Bachar Mar-Khalifé, Ukraine Fire ou Les Ogres de Barback. Tout en restant fidèle à la ligne artistique du Pôle national Cirque et Arts de la rue, son directeur souhaite en effet attirer un large public au sein de ce magnifique écrin de 1 600 places. Dans la même optique, il continuera de programmer un spectacle par an sous chapiteau, poursuivra ces temps forts très fédérateurs que sont La Nuit du cirque et La Rue est Amiens, et en créera un troisième, Genre de cirque, qui durant une ou deux semaines en mars explorera la thématique de l’identité genrée. « Cette question me semble très intéressante à aborder sur un plateau, en lien avec des chercheurs et des associations, pour sensibiliser les spectateurs, travailler aussi à cette occasion auprès d’un public lycéen », fait valoir Yannick Javaudin. Grâce aux Confluences nomades enfin, le Cirque Jules Verne maintiendra sa présence dans les quartiers amiénois et sur les territoires ruraux.
Désireux de placer les artistes au cœur de son action, le nouveau directeur s’entourera de trois circassiennes : Pascaline Herveet (Cirque du Docteur Paradi), Maroussia Diaz Verbèke (Compagnie Troisième Cirque) et Sophia Perez (Compagnie Cabas). En préférant le terme d’ acolytes à celui d’associées, il indique clairement la portée donnée à cette collaboration. Choisies pour leur engagement notamment en matière d’éducation artistique et culturelle et sur des thématiques sociétales, mais aussi en raison du rapport singulier qu’elles entretiennent avec la forme circulaire, ces femmes seront fortement impliquées dans l’activité du lieu. Elles dialogueront sur la programmation avec Yannick Javaudin, qui les conviera à parrainer une production par an, à mettre en scène un cabaret éphémère lors de La Nuit du cirque ainsi que le spectacle de sortie de l’école. Chaque « Saison au cirque » portera d’ailleurs le nom de l’artiste qui y sera associée.
Sur le plan de la production cette fois, parallèlement aux accueils en résidence et coproductions classiques, Yannick Javaudin aimerait – lorsque les moyens financiers et humains l’autoriseront – créer un bureau de production déléguée qui positionnerait le Cirque Jules Verne comme un lieu d’accompagnement de l’émergence. L’objectif ? Intervenir lors de cette période très délicate qui se situe entre la sortie d’une école supérieure et la création d’une compagnie, afin de faciliter l’implantation d’artistes sur le territoire. « Nous pourrions œuvrer dans ce sens avec d’autres structures circassiennes de la Région Hauts-de-France, comme le Centre régional des arts du cirque (CRAC) de Lomme », précise-t-il.
Cet esprit de coopération s’exercera également en matière de diffusion, au bénéfice de tournées cohérentes et donc plus éco-responsables, autre sujet cher – avec la parité, qui s’appliquera à l’ensemble des porteurs de projets – à Yannick Javaudin. Étudiant d’autre part l’idée de fonder un réseau informel de cirques en dur, il envisage d’échanger avec les directeurs et directrices du Manège de Reims, de L’Hippodrome de Douai, du Palc de Châlons-en-Champagne et du Cirque-Théâtre d’Elbeuf, sur les problématiques de gestion de tels équipements et la possibilité de mutualiser des moyens en vue d’adapter des spectacles en frontal aux dispositifs circulaires.
Pour relever les défis qui l’attendent, dont « rassembler les trois entités : cirque, rue et école », le directeur du Cirque Jules Verne entend s’appuyer sur l’énergie de son équipe (et notamment celle de la directrice déléguée aux projets Cirque, Djia Tighersine, avec laquelle il a collaboré par le passé) et des artistes. À 50 ans, et malgré sa longue expérience, il refuse en effet d’adopter « la posture du sachant », afin de demeurer ce qu’il n’a cessé d’être : un chercheur et un passeur.
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