Un Maire D'Île-de-France A-t-il Appelé Un Prêtre Et Un Imam à « Exorciser » Un HLM « Hanté » ?

Le Parisien a indiqué mercredi 12 octobre que le maire de Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine) avait « fait appel » à un prêtre et un imam pour « exorciser » les parties communes d’un immeuble social de sa ville, où se produiraient des « phénomènes paranormaux ». Alors que l’entourage de l’élu dément, La Croix fait le point.
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Un maire d’Île-de-France a-t-il appelé un prêtre et un imam à « exorciser » un HLM « hanté » ?
L’immeuble hanté selon ses locataires qui se trouve aux Blagis, un quartier de Fontenay-aux-Roses qui doit être entièrement réhabilité.
MARJORIE LENHARDT/LE PARISIEN/MAXPPP
Perception d’une « présence », bruits de « meubles tirés au sol » dans leurs appartements, visions fugitives d’ombres « aux visages flous » ou autres « phénomènes étranges » potentiellement reliés, selon certains, à « la mort, en 2019 » d’un résident voisin… Ces derniers mois, les témoignages d’une petite frange de locataires de la barre HLM des Blagis, à Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine), n’ont cessé de défrayer la chronique. Très médiatisée, au point que la plupart de ces habitants ne veulent plus, aujourd’hui, s’exprimer dans la presse, l’affaire a encore connu mercredi 12 octobre un nouveau revirement.
Le quotidien Le Parisien a en effet indiqué que le maire de la ville, Laurent Vastel (UDI), avait « fait appel » à un prêtre et un imam pour « exorciser » les parties communes de l’édifice, afin de « faire patienter » ces habitants en attente urgente, de longue date, de relogement par le bailleur social Hauts-de-Seine Habitat (1). « Ces officiants sont très occupés, mais nous avons obtenu une réponse favorable de leur part, ils vont venir », aurait-il confié au journal. Des propos qui ont suscité la polémique sur les réseaux sociaux.
Le maire n’a pas répondu directement aux sollicitations de La Croix, mais une source de son entourage « dément formellement » cette initiative ne relevant « pas de son champ de compétence ». « Nous sommes très attachés aux principes de la République, à la laïcité, et jouons simplement un rôle de médiateur, de facilitateur entre ces administrés et le bailleur social dans ce dossier », insiste-t-elle, précisant même que Laurent Vastel n’aurait pas « parlé » au Parisien… sans toutefois vouloir demander un rectificatif auprès du média.
« C’est un non-sujet pour nous », écarte-t-elle encore. Or du côté du Parisien, la journaliste de l’article confirme, elle, avoir eu le maire par téléphone dans la soirée du vendredi 7 octobre. « Il devait me préciser en début de semaine la date de la venue des officiants. C’est juste sur ce point d’agenda que je n’ai pas eu d’échanges avec lui en début de semaine », nous précise-t-elle par écrit. Devant ces nouvelles informations, l’entourage du maire indique que ce dernier clarifiera sa position dans l’émission Touche pas à mon poste ! de Cyril Hanouna sur C8 dans la soirée de vendredi 14 octobre.
Sur fond de réelles souffrances humaines, le dossier embarrasse. Un prêtre et un imam vont-ils ainsi, réellement, se rendre prochainement sur les lieux ? « Quand nous avons des demandes pour venir bénir (on ne parle pas d’« exorciser » des lieux dans le catéchisme de l’Église catholique, NDLR) un endroit, comme un local, un immeuble, nous redirigeons vers le prêtre de la paroisse locale : cela ne nécessite pas un ministère particulier, comme pour les personnes », explique une écoutante, laïque bénévole, du service d’exorcisme pour les huit diocèses d’Île-de-France (comprenant donc celui de Nanterre, dont dépend la ville de Fontenay-aux-Roses), seule instance officiellement « mandatée » par l’Église.
« Quand nous avons ces gens en souffrance par téléphone, nous essayons de discerner leurs besoins, et seul peut-être 1 % des appels donne ensuite vraiment lieu à un exorcisme… Nous ne nous déplaçons pas, les gens viennent à nous », précise-t-elle par ailleurs. Curé de la paroisse Saint-Stanislas des Blagis, sur laquelle se trouve le HLM prétendument « hanté » selon certains habitants, le père Michel Protain indique ne pas avoir personnellement été sollicité, par le maire, dans cette affaire.
« Celle-ci questionne la manière d’être attentifs aux besoins spirituels de ces populations en détresse, à ne pas uniquement se comporter en gestionnaires devant les problèmes qu’elles peuvent rencontrer », poursuit le spiritain, pointant le « problème de fond » soulevé par la politique des logements à l’ère, notamment, du Grand Paris.
Contactée par La Croix, une source locale, bien informée, nous indique que « le maire, sûrement démuni aussi dans ce dossier compliqué, a bien demandé à un religieux » de la chapelle limitrophe Sainte-Rita (dont la charge pastorale est confiée, depuis 1992, aux oblats de la Vierge Marie), de venir dans l’immeuble.
« Lui a alors perçu cette demande comme un ministère d’écoute auprès des familles… Mais il n’a jamais été question de pratiquer un exorcisme dans l’immeuble, et il n’y aura pas de suites, car il n’y a finalement pas de demandes de la part des familles, assez loin de l’Église, sur le terrain », poursuit cette source. Le directeur de la congrégation, en déplacement à l’étranger, n’a pas pu être joint.
Quid de l’imam ? À Fontenay, la mosquée de l’Association des musulmans de Fontenay-aux-Roses (Amfar) n’a pas répondu à notre demande de précision. Mais interrogée en mai dernier par la chaîne BFM Paris Île-de-France, Souad, une habitante de l’immeuble, avait déjà confié « avoir fait appel à un imam, qui lui avait conseillé de disposer du sel sur le seuil de sa porte et de trouver du réconfort dans le Coran ».