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Tunisie : des dirigeants dans le déni – Jeune Afrique – Jeune Afrique

Par Frida Dahmani
Frida Dahmani est correspondante en Tunisie de Jeune Afrique.

Des automobilistes faisant la queue dans une station-service de La Marsa, au nord de Tunis, le 26 août 2022. © ANGUS MCDOWALL/REUTERS
La Tunisie n’est pas en grande forme. Cet euphémisme est un constat pudique de la situation d’un pays dont la dégradation se poursuit au fil des années, malgré toutes les alertes et aspirations à un sursaut. Il semblerait presque que toutes les bonnes volontés et toutes les intentions, bonnes et louables, soient vouées à ne pas être entendues. Résultat, la Tunisie semble avoir adopté, en cherchant son chemin, une marche erratique sans finalité précise. Ce diagnostic est celui que partagent de nombreux Tunisiens qui ont l’impression, en cette fin d’été, que la situation s’est aggravée. Il ne s’agit plus de sensations fugaces ou de données éparses mais de faits tangibles. La misère s’est insérée petit à petit même dans l’espace public, il faut attendre les subventions étrangères décaissées à la faveur d’un événement international ou d’un autre pour effectuer une hâtive et approximative réhabilitation de l’urbain. Un ravalement de façade qui permet tout juste de faire bonne figure.
Le pays souffre de comportements paradoxaux. Chaque esquisse de changement conduit à un coup d’arrêt sous prétexte d’opérer un état des lieux qui n’est finalement jamais effectué. Avoir une vue d’ensemble au plus proche du réel de la situation du pays n’est pas la finalité de cette manœuvre : elle n’est qu’un prétexte pour fustiger, critiquer, décrier les prédécesseurs, quels qu’ils soient. Ensuite, sans aucun état d’âme, ils reprennent leurs pantoufles, ou leurs tongs selon la saison, et leurs fauteuils vides pour continuer à pratiquer un immobilisme qui requiert bien plus d’énergie que de modifier cette trajectoire assez folle et pour le moins hallucinante qu’emprunte la Tunisie.
Le handicap de ce pays jeune et sympathique, qui voudrait sans pouvoir, est le déni de ses dirigeants. Une force insoupçonnée capable de plomber les meilleures intentions et qui obère la réalité. À croire que dans une sorte de fuite en avant ou pour tenter de différer les événements, le pouvoir esquive tout ce qui pourrait lui être contraire et finit par produire ces propres freins. Le déni, bien plus fort que les voix de la raison, se fait têtu, s’impose et dispose, il se rit du bon sens et de la bonne volonté. Mieux, ou pis, il remet en question toute logique et conduit à une impasse qu’il décrit comme une autoroute vers le succès, le développement.
Au début de la pénurie de sucre, le ministère de la Santé avait même fait une campagne sur le thème du sucre nuisible pour la santé. En fera-t-il de même pour le tabac maintenant que le gouvernement ne peut plus acheter de cigarettes ? À moins que, comme à l’accoutumée, on impute à des spéculateurs la disparition de certaines denrées plutôt que de reconnaître que les caisses de l’État sont vides et que le gouvernement est défaillant.
Après une décennie chaotique, la Tunisie n’est plus à une contradiction ou à un mirage près. Les citoyens qui revendiquaient notamment un mieux-être économique sont fortement impactés par une crise qui n’est pas de leur fait mais dont ils subissent tous les effets. Face à la pénurie d’essence, le ministre des Affaires sociales, Malek Zahi, dont ce n’est pas le champ d’action, rassure sur l’approvisionnement des stations-service, mais demande aussi aux Tunisiens de comprendre les difficultés de l’État, invoquant le conflit ukrainien et ses conséquences. C’est précisément ce que ne veulent pas entendre les Tunisiens ; ils sont las de patienter, de prendre sur eux et d’être mis devant le fait accompli.
« À quoi sert un gouvernement, s’il ne peut anticiper ? » s’insurgent des automobilistes qui, en même temps qu’ils attendent d’être servis, énumèrent les pénuries. Le riz, le sucre, le café, l’huile, les cigarettes et la liste des produits de première nécessité devenus introuvables s’allonge de jour en jour. Parfois, les conséquences sont surprenantes. Le manque de sucre ne permet plus la production de boissons gazeuses, dont la célèbre marque dont on retrouve le logo rouge et blanc même aux confins du Sahara. Mais le sucre continue d’être servi à Carthage dans des petites pochettes au logo de la présidence.
Un exemple édifiant quand par ailleurs on traque les situations de monopole et on évoque l’exemplarité dans des interventions officielles. « Le lait va rejoindre les absents des rayonnages, la filière se porte très mal », confie un agriculteur qui rappelle que la production de céréales ne couvrira pas les besoins des Tunisiens au-delà de novembre. L’effet boule de neige subit une accélération et l’avalanche n’est pas loin, elle aura la forme d’échéances de la dette de plus en plus lourdes.
Au retour de la trêve estivale, le principe de réalité va s’inviter dans la vie des Tunisiens ; des prix exorbitants, comme des courgettes à 2,5 euros, et une rentrée des classes où le moindre cahier coûte trois fois plus cher qu’en 2021, sans compter les livres, monopole de l’État, imprimés à grand frais mais comportant des erreurs grossières, vont participer à une grogne générale et à une agitation sociale où les ventres et les porte-monnaie vides vont exprimer leur colère. Ni syndicats, ni imams, ni gaz lacrymogène ne pourront grand-chose contre une révolte de la faim.
« Le premier accusé est l’État, cessons de faire le procès des dix dernières années ; il suffit d’évaluer les résultats depuis 2019, dont trois ans d’un mandat qui promettait d’être attentif au peuple », proteste Neila, une militante qui vient de quitter la gauche nationaliste. Elle est atterrée : jamais le pays n’a subi une telle paralysie sans que personne – ni dirigeants ni président — valorisent le travail et encouragent le peuple à retrouver un mode productif. Faut-il chercher plus loin une explication aux 21 % de taux de chômage, au million de démunis, aux 2 millions d’analphabètes et aux 15 800 clandestins en 2021 ?
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