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Sandrine Maljean-Dubois à propos de la COP27 : « paradoxalement, plus l'objectif de 1,5°C s'impose dans l'agenda, plus on s'en éloigne » – Magazine GoodPlanet

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Alors que débute la COP27 en Égypte, Sandrine Maljean-Dubois éclaire, dans cet entretien à GoodPlanet Mag’, les enjeux de cette nouvelle session de négociations internationales sur le climat. Elle note l’écart entre les ambitions et la réalité, mais elle estime que les COP jouent un rôle dans l’action climatique, même s’il est loin d’être parfait. Spécialiste du droit de l’environnement, Sandrine Maljean-Dubois est chercheuse au CNRS au Centre d’études et de recherches internationales et communautaires à Aix-en-Provence.
Qu’attendez-vous de la COP27 ?
Il est difficile de répondre à cette question parce que je pense que nous avons besoin des COP, de celle-là, comme des précédentes et des suivantes. Cependant, je n’en attends pas grand-chose parce que le processus de négociation climatique s’avère lent et ne marche pas comme il le devrait.  Le processus fait un pari en affichant un objectif collectif ambitieux, celui de limiter le réchauffement à 1,5°C tandis que, dans le même temps, il laisse les États décider eux-mêmes de leurs contributions. Elles doivent être les plus ambitieuses et équitables possible, sans qu’il n’y ait de contrôle externe… C’était le pari de l’Accord de Paris, or on ne pouvait pas faire mieux à l’époque, ni faire mieux aujourd’hui. Or, faire mieux serait de s’accorder pour concrètement répartir les efforts de réduction et en contrôler la réalisation chaque année.
[À lire aussi Le monde au bord du « suicide collectif » climatique, avertit le patron de l’ONU]7 ans après, quelle est l’efficacité de l’Accord de Paris ? et qu’est-ce que cela peut laisser entrevoir comme perspectives pour la COP27 à Charm el-Cheikh ?
Le pari de l’Accord de Paris ne marche pas complètement, mais il conduit tout de même les État à faire plus que ce qu’ils auraient fait sans. La transition est en marche. Cela reste toutefois insuffisant et trop lent pour nous amener sur la trajectoire dessinée par l’Accord de Paris.
« Le juge national peut alors donner des « dents » à l’Accord de Paris, qui lui-même en est dépourvu. »
L’Accord de Paris à lui tout seul est incitatif et pas contraignant. Néanmoins, les COP sont des outils qui permettent aussi d’intégrer de manière plus effective le climat à d’autres accords internationaux plus contraignants, comme ceux de libre-échange.
 [À lire aussi Le climatologue Hervé Le Treut : « étant donné la complexité du défi de civilisation que représente la réduction des émissions de gaz à effet de serre, aucune discipline ne peut se prévaloir du monopole des solutions »]Pensez-vous que, dans le cadre des négociations sur le climat, il est envisageable d’avoir des mécanismes plus contraignants aujourd’hui ?
À l’heure actuelle, c’est totalement exclu. Les États ne sont pas du tout prêts à ça. En revanche, les accords climatiques prennent une dimension intéressante, importante et complémentaire par le biais du juge national. Ce dernier peut, dans le cadre des procès climatiques, rappeler aux États leurs engagements et leur donner une valeur légalement contraignante. Il y a des centaines de procès climatiques jugés ou en cours dans le monde, comme Urgenda aux Pays-Bas ou l’Affaire du Siècle en France. Le juge national peut alors donner des « dents » à l’Accord de Paris, qui lui-même en est dépourvu.
[À lire aussi Marjan Minnesma, pionnière de l’action climatique devant la justice primée par le prix Goldman 2022 : « les gouvernements ont un devoir de protection des citoyens face à la menace du changement climatique »]L’Égypte a justement déclaré vouloir maintenir l’ambition de l’Accord de Paris de limiter à 1,5 degré Celsius le réchauffement, est-ce réaliste ? Tant dans le texte final de la COP que dans les faits ? ou est-ce juste une posture pour que la COP27 n’apparaisse pas d’emblée comme celle qui entérine un échec collectif ?
C’est un peu tout cela à la fois. Il faut revenir en 2015 et se rappeler que déjà, à l’époque, intégrer l’objectif de 1,5°C dans l’Accord de Paris apparaissait comme ultra ambitieux pour les scientifiques. L’objectif initial était de maintenir le réchauffement nettement en dessous de 2 degrés et de tendre le plus possible vers 1,5°C. Ce chiffre de 1,5 n’était peut-être pas réaliste, mais cet objectif est monté peu à peu, à tel point que le Pacte de Glasgow adopté l’an dernier à la COP26 le reprend. Paradoxalement, plus l’objectif de 1,5°C s’impose dans l’agenda, plus on s’en éloigne. Là encore, on est dans l’incohérence. Il faut bien sûr garder cet objectif, mais on a surtout besoin de parvenir à se donner les moyens de l’atteindre. Or, chaque année qui passe le rend plus difficile à atteindre.
La question des pertes et préjudices (loss and damage) relance le sempiternel débat sur la responsabilité historique des pays industrialisés, finalement comment sortir de ce point de blocage récurrent ?
Le sujet des pertes et préjudices sera effectivement une des clefs du succès de la COP27. Cette question est essentielle et rejoint celle des financements. D’autant plus que les pays du Nord n’ont pas complètement honoré leurs engagements financiers. Les 100 milliards de dollars de financements climatiques du Nord vers le Sud attendus en 2020 se font encore attendre. Les pays du Sud estiment donc que leur confiance à l’égard des pays du Nord est entamée pour ces deux raisons : absence de respect des engagements financiers et réticence des pays industrialisés à s’engager financièrement à la compensation des pertes et préjudices. Ruiner cette confiance fragile risque de ruiner le processus de négociations.
« Ruiner cette confiance fragile risque de ruiner le processus de négociations. »
Il existait bien un mécanisme dit de Varsovie relatif aux pertes et préjudices préexistant à l’Accord de Paris. Le mécanisme de Varsovie a été intégré à ce dernier. Pourtant, il ne répond pas aux attentes des pays en développement qui voudraient y voir un « guichet » pour obtenir davantage de financements en compensation des dommages qu’ils subissent. Les pays du Nord se montrent réticents à cette approche. Les pays du Sud ont finalement obtenu que le sujet soit à l’agenda de la COP27. Glasgow avait auparavant instauré un « dialogue » sur ce sujet qui doit aboutir en 2024. Il est peu probable que, au vu de leurs attentes, les pays du Sud acceptent d’attendre 2024. Chaque année les dommages sont plus importants et les pays du Sud ont besoin de plus d’argent.
[À lire aussi Le climatologue Jean Jouzel à propos de la COP26 : « l’absence d’avancées sur des sujets cruciaux efface les progrès sur quelques points techniques »]Est-ce uniquement une question de financement ?
Le mécanisme de Varsovie prévoit aussi de l’assistance technique, des partages de bonnes pratiques pour s’adapter ou de la formation… Mais tout cela ne satisfait pas les pays du Sud. De plus, à Paris, il avait été décidé que le mécanisme de pertes et des préjudices ne constituerait en aucun cas une reconnaissance de la responsabilité juridique des pays développés. Pour le moment, s’il y a des compensations, elles résultent plutôt de la reconnaissance d’une responsabilité politique ou tout simplement seraient une forme d’aide au développement.
[À lire aussi Jean Jouzel : « 2 degrés est un objectif politique »]Les attentes de l’opinion à l’égard des COP sont-elles démesurées ?
Je ne sais pas si la COP est plus médiatisée, ni si les attentes sont plus fortes dans l’opinion. Il y a eu dans le passé des attentes fortes de la part des citoyens. Mais une partie d’entre eux se désintéresse peu à peu des sommets sur le climat, ou du moins n’en perçoit plus la portée ou l’intérêt à force d’entendre répéter, année après année que c’est « la COP de la dernière chance » ou celle qui doit « sauver la planète » et qu’au final il ne s’y passe pas grand-chose. Greta Thunberg résume très bien ce sentiment en parlant de « blabla » et en décidant de ne plus s’y rendre. Ça finit par décevoir.
Le climat étant un sujet mondial éminemment politique. On sait aussi que le succès de l’action climatique reposera sur l’adhésion des populations à des remises en cause de certains modes de vie ou de certaines aspirations, n’est-ce pas aussi un problème d’ignorer ce qu’une partie de la population mondiale, celle vivant dans des pays où la libre expression est restreinte, pense du sujet du réchauffement ?
Les démocraties ne sont pas forcément dans une meilleure situation. Tout le monde est dans la difficulté, ce qui est renforcé par le contexte géopolitique actuel avec la guerre en Ukraine, qui renchérit notamment le coût des énergies. Il est en effet facile de taper sur les gouvernements en disant qu’ils ne font pas ce qu’il faut, mais si vraiment ils prenaient la mesure des choses en engageant des réductions drastiques des émissions, les conséquences à court terme seraient difficiles, voire très difficiles, pour beaucoup de personnes et de secteurs économiques. Sommes-nous tous prêts à faire de tels efforts, même si les scientifiques nous disent qu’ils sont nécessaires ?
[À lire aussi Avion, mode, viande, vidéo en ligne ou voiture, à quoi les Français, les Européens, les Américains et les Chinois sont-ils prêts à renoncer pour lutter contre le changement climatique ?]Propos recueillis par Julien Leprovost
Pour aller plus loin
Le site de Sandrine Maljean-Dubois

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