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« Sakomoto Days », « Chainsaw Man », « Blue Lock »… les récents blockbusters venus du Japon jouent sur le décalage avec leurs prédécesseurs, comme « Naruto » ou « One Piece ».
Temps de Lecture 9 min.
Dans Sakamoto Days, nouveau hit manga venu du Japon qui paraît en France à compter du mercredi 6 avril, le héros Taro Sakamoto est un patron de supérette replet, dont la vie de famille paisible, pour ne pas dire banale, est perturbée par ses anciennes activités de tueur à gages. Un choix de protagoniste curieux pour une série classée shonen, destinée aux adolescents, qui tranche avec ses glorieux prédécesseurs Naruto, Son Goku de Dragon Ball ou encore Luffy de One Piece, qui ont façonné ce genre ultra-populaire.
Aux côtés de Sakamoto, ce sont d’autres héros tout autant désabusés qui font sensation auprès des publics japonais et français, ces derniers temps, dans l’écurie Jump, du nom du Weekly Shonen Jump, magazine de manga numéro un au Japon. Spy X Family, par exemple, raconte comment un espion fonde une fausse famille afin de s’introduire dans des milieux aristocratiques et de mener à bien sa mission. Quant à Chainsaw Man, l’un de ses points de départ est que Denji, un adolescent capable de se transformer en homme tronçonneuse, se fixe pour but de toucher une paire de seins. Ce qui – étant un paria – lui paraît impensable.
Ces nouvelles séries, quand elles ne jouent pas la rupture, tendent à revisiter, parodier parfois, des archétypes du genre shonen : un jeune héros qui se fixe un but démesuré à atteindre, des affrontements avec un antagoniste, des valeurs transmises comme l’amitié, le dépassement de soi, la justice, la bravoure.
« On constate, en effet, une tendance de fond dans le shonen qui tendrait à sortir de ce cahier des charges, en cohabitation avec des titres plus classiques. On le retrouve dans le Jump mais aussi chez ses concurrents », explique Mehdi Benrabah, directeur éditorial de Pika, citant dans son catalogue Blue Lock, un manga de foot « où chacun joue pour sa pomme, à contre-emploi du travail d’équipe ».
Le basculement narratif a commencé à s’opérer dans le milieu des années 2010, après l’arrêt des séries Naruto et Bleach qui, avec One Piece, ont toutes trois incubé dans le magazine Weekly Shonen Jump et trusté les ventes de mangas pendant une quinzaine d’années. Prenant leur suite, pour ce qui est du même éditeur, My Hero Academia est allé flirter avec le style des superhéros américains. Tandis qu’à la concurrence L’Attaque des Titans s’est affranchie des codes chevaleresques inscrits dans l’ADN shonen.
« Il a été, cependant, difficile de faire émerger de nouveaux auteurs dans le Jump où la concurrence est rude, surtout quand tu as des têtes de proue aussi fortes », concède Ahmed Agne, patron des éditions Ki-oon, qui a récupéré en France la franchise Jujutsu Kaisen. « Pour moi, ce n’est pas un hasard si My Hero Academia [qu’il édite aussi] a explosé pile-poil au moment où Naruto s’est terminé. »
Les anciennes franchises continuant de cartonner dans les ventes ont, ainsi, obligé les aspirants mangakas à faire montre de créativité et de diversité, comme l’expliquait au site L’Internaute Shihei Lin, rédacteur en chef du Jump +, plate-forme en ligne de mangas appartenant à la maison d’édition Shueisha, comme le Weekly Shonen Jump :
« On a aussi accès plus facilement aux anciennes séries, ce qui fait que là où il y a dix-vingt ans, on pouvait se permettre de réitérer une formule connue, j’ai l’impression que c’est plus difficile de nos jours : les lecteurs s’en rendent compte plus facilement et ne se contentent plus d’un simple ersatz d’un manga à succès. »
C’est la même idée qui a guidé Yuto Suzuki, auteur de Sakamoto Days, dans le choix de son antihéros. « J’ai grandi en lisant des shonen, donc je me suis dit qu’il n’y avait aucun intérêt à faire la même chose que les chefs-d’œuvre qui m’ont précédé. D’où ce personnage inédit, explique-t-il au Monde par e-mail. Mais je ne dessine pas particulièrement à destination des adultes, j’essaie de retranscrire en manga des idées amusantes qu’on a dans son enfance, comme : “et si le papy qui tient la supérette de quartier était un tueur à gage ?” . »
Le bédéaste a aussi envie de s’adapter au lectorat, qui a changé. « Aujourd’hui, j’ai l’impression qu’ils [les jeunes lecteurs] ne sont plus intéressés par un idéal commun, mais qu’ils sont plus en recherche d’une manière de vivre personnelle. » Quand on le questionne sur la frugalité des désirs de son héros dans Chainsaw Man, Denji, son confrère Tatsuki Fujimoto, mis à l’honneur dans une exposition au dernier Festival international de la bande dessinée d’Angoulême, le rejoint : « Les plus jeunes que moi [il a 28 ans], que l’on voit, par exemple, dans des documentaires, n’ont pas forcément des désirs démesurés, de grands rêves comme devenir milliardaires, ils veulent vivre au jour le jour. C’est une tendance que Denji embrasse. »
Les envies de lectures ont aussi certainement changé à mesure que le lectorat – comme la population japonaise – vieillissait. Avec cela, peut-être une envie de s’identifier à des personnages plus vieux. « Avant, le Jump était plutôt lu du CE2 à la 3e, mais One Piece dure depuis tellement longtemps, les lecteurs ont voulu connaître la suite et ont continué de le suivre au lycée et à la fac. Il y a eu un glissement de l’âge », raconte Grégoire Hellot, directeur des éditions Kurokawa qui publient en France Spy X Family. La part des lecteurs trentenaires du Weekly Shonen Jump va donc croissant.
A l’image des lecteurs, le profil des autrices et des auteurs a mué. Les mangakas qui passaient toute une vie à s’échiner sur la même œuvre – comme le fait depuis plus de vingt ans Eiichiro Oda, le créateur de One Piece – ont tendance à disparaître. De même ces auteurs se laissent moins enfermer dans une classification shonen (ado) ou seinen (adulte), passant avec délectation d’un registre à l’autre, comme Tatsuki Fujimoto. Pour preuve, sa précédente série postapocalyptique et brutale Fire Punch.
« La fidélité, le devoir d’abnégation envers une entreprise, d’y rester toute sa carrière, est aujourd’hui remise en cause dans la société. Les mangakas n’y échappent pas », estime Satoko Inaba, directrice éditoriale manga chez Glénat, qui édite Sakamoto Days.
« Les magazines de manga étaient très formatés et très exigeants. Ces pratiques ont été questionnées avec l’engouement croissant pour les plates-formes artistiques d’autoédition notamment. On voit que les plannings des auteurs ont été allégés, qu’ils s’autorisent des pauses quand, avant, ils travaillaient sans relâche pour livrer un épisode par semaine. Les éditeurs japonais se sont aussi rendu compte qu’il ne servait a rien d’user et fâcher les auteurs. »
En résulte alors un foisonnement de séries qui n’ont plus forcément grand-chose à voir les unes avec les autres. Des sagas beaucoup plus courtes aussi : Demon Slayer s’est achevée à l’apogée de son succès en 23 tomes, là où Naruto ou Bleach se sont étirées sur plus de 70 volumes. « Il y a une progression plus sombre, plus dramaturgique, une évolution plus rapide des séries », analyse Satoko Inaba. Celles-ci doivent également s’adapter à une nouvelle contrainte liée à leur adaptation en série animée : l’émergence de nouveaux modes de consommation sur les plates-formes de streaming et l’engorgement des studios d’animation japonaise qui travaillent à flux tendu. Au lieu des traditionnelles sagas cumulant des centaines d’épisodes diffusés sur plusieurs années, les séries ont mué vers un modèle plus occidental, avec des saisons et un nombre d’épisodes limités.
« Les derniers rédacteurs en chef du Weekly Shonen Jump ont eu parfaitement conscience du fait que les séries précédentes avaient été trop longues et que ça avait pu les pénaliser dans le renouvellement des auteurs. Aujourd’hui, il est assumé que c’est plus sain d’avoir un vivier et de nombreuses séries qui fonctionnent très bien sur un laps de temps plus court », assure Ahmed Agne, de Ki-oon, qui concède par ailleurs qu’une multiplication des licences donne plus de chances à différents éditeurs français de décrocher la timbale. « Il y a une volonté éditoriale de refaire un coup à la Death Note, qui était un ovni, un phénomène de société qui n’avait pas sa place au début dans un magazine comme le Jump. Il préfigurait ces changements », ajoute Grégoire Hellot.
Outre l’audace d’une nouvelle garde d’éditeurs, Shueisha peut surtout compter sur son laboratoire en ligne, la plate-forme numérique Shonen Jump + (nommée Manga Plus à l’étranger) qui lui permet de tester énormément de séries et concepts en parallèle du magazine papier. « Ces expérimentations ne seraient pas possibles dans un magazine, car elles prendraient la place d’un hit potentiel. Leur seule limite aujourd’hui est leur capacité de gestion éditoriale », considère Grégoire Hellot.
Cette stratégie globale de diversification paie : Spy X Family, par exemple, a dépassé les 12 millions d’exemplaires en circulation au Japon, et le million en France. Avec quatre millions d’exemplaires vendus sur l’archipel pour les trois premiers tomes, Kaiju 8, est l’une des séries les plus en vogue. La saga d’exorcisme Jujutsu Kaisen, de Gege Akutami, publiée dans la version papier, n’avait pas trois ans qu’elle dépassait, en janvier 2021, les 20 millions d’exemplaires vendus dans le monde. De même, Demon Slayer, elle, a su battre au cinéma comme en manga des géants de l’industrie comme Dragon Ball.
Reste que, si les chiffres sont historiques, ce genre d’effervescence éditoriale n’est pas si nouveau. Avant une certaine homogénéisation et la trinité One Piece-Naruto-Bleach, le magazine Weekly Shonen Jump a hébergé des séries très différentes, comme City Hunter (Nicky Larson), le manga « furyo » Rokudenashi Blues (Racaille Blues), Saint Seiya (Les Chevaliers du Zodiaque) ou encore la série de basket Slam Dunk, pour ne citer qu’eux. Et le mangaka Tatsuki Fujimoto de rappeler que, bien avant Chainsaw Man, la violence fut l’apanage dans les années 1980 d’Hokuto no Ken (Ken le Survivant). Le côté potache et décalé, les références à des succès anciens et les pages d’action font dire à Satoko Inaba que Sakamoto Days est plus un retour aux sources du shonen qu’une pure rupture de cette série qui est « empreinte de nostalgie » : « D’accord, les personnages de shonen ont tendance à vieillir, comme Sakamoto, mais finalement Son Goku a lui aussi été père de famille. »
Si sa diversité actuelle convainc un public plus large que sa cible, le formidable pouvoir du shonen a toujours résidé dans sa capacité, à l’instar d’une saga comme Harry Potter, à aimanter de jeunes premiers lecteurs et lectrices, et ce, dès le primaire. De leur donner le goût de lire – un atout non négligeable face à l’effondrement de la lecture chez les adolescents français. Il est cependant à craindre que des séries comme Sakamoto Days ou Jujutsu Kaisen, même avec des personnages jeunes dans leur galerie, n’aient peut-être pas les mêmes vertus en la matière que le mastodonte One Piece ou bien Naruto, qui continue de caracoler dans les ventes, six ans après la fin de la série en France.
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