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Réussir son “Janvier sec” avec Nietzsche – Philosophie magazine

Portrait crayonné de Friedrich Nietzsche par Dariush Radpour. © Dariush Radpour/Fototeca Gilardi/akg-images
Le mois de janvier est l’occasion pour de nombreuses personnes de pratiquer un mois sans alcool, ou « Janvier sec », après la folie des fêtes. Étrangement, peu nombreux sont les philosophes qui s’y plieraient ! Sauf Nietzsche, qui voit plusieurs vertus dans l’abstinence.

« In vino veritas » : « La vérité est dans le vin ». Cette maxime latine, que l’on retrouve chez Pline l’Ancien (23-79), semble avoir imprégné toute la culture philosophique occidentale. Rares, très rares sont les philosophes qui n’associent pas l’alcool à des vertus. Chez Platon, le vin circule entre les membres du Banquet dissertant d’amour – à l’exception notable de Socrate ; chez Aristote, l’alcool est associé à la lutte contre la mélancolie ; chez Thomas d’Aquin à une sage hilarité ; chez Kierkegaard, par ailleurs auteur du recueil In Vino Veritas, à la vérité…
En cette période de Dry January, ou « Janvier sec », difficile de trouver un guide philosophique dans l’ascèse ! Mais, en fouillant bien, nous avons retrouvé chez Nietzsche, pourtant penseur de l’art dionysiaque et de la libération du corps, des passages qui mettent explicitement en garde contre toute consommation d’alcool – et pas seulement une descente excessive. Voici comment le philosophe allemand peut vous épauler dans cet effort hivernal de purification.
 
Nietzsche évoque la question de l’alcool dès son premier livre, Naissance de la tragédie (1872). Élaborant une distinction entre art apollinien et dionysiaque – le premier étant une mise en ordre du monde et le second un jaillissement de forces vitales –, il esquisse une « analogie » entre ivresse et premiers émois esthétiques : « C’est par la puissance du breuvage narcotique que tous les hommes et tous les peuples primitifs ont chanté dans leurs hymnes, ou bien par la force despotique du renouveau printanier pénétrant joyeusement la nature entière, que s’éveille cette exaltation dionysienne qui entraîne dans son essor l’individu subjectif jusqu’à l’anéantir en un complet oubli de soi-même. »
Cet oubli de soi-même, Nietzsche n’en fait pas un principe de vie qui pourrait éveiller les adultes en quête de créativité, mais plutôt un moment circonscrit d’exaltation bien particulière, où la jeunesse éclot dans un fol accès de dynamisme. Dans Ecce Homo, œuvre posthume, il raconte à la première personne avoir parfois vécu ce sentiment lui-même : « Verser sur mon latin quelques grogs du plus fort calibre, quand j’étais élève de la vénérable École de Pforta, tout cela n’était nullement en contradiction avec ma physiologie. »
Nietzsche voit en réalité l’alcool comme un ferment toxique qui nous fait croire aux arrière-mondes et met en danger notre santé et notre gaieté véritables”
 
Mais l’éloge de l’alcool s’arrête ici dans son œuvre. Pour le reste, Nietzsche préfère la voie de l’ascèse. Ce n’est pas le moindre des paradoxes, pour ce penseur qui a voulu décorseter le désir et subvertir les injonctions morales de son temps ! Mais Nietzsche voit en réalité l’alcool comme un ferment toxique qui nous fait croire aux arrière-mondes et met en danger notre santé et notre gaieté véritables, faisant obstacle à l’expression de notre personnalité singulière.
 
Une fois passée la phase adolescente, Nietzsche confie un certain dégoût pour ce qui évoque l’alcool, de près ou de loin. Dans Ecce Homo, il écrit : « Les boissons alcooliques me sont préjudiciables. Un verre de vin ou de bière par jour suffit largement pour que la vie devienne pour moi semblable à une vallée de larmes. C’est à Munich que vivent mes antipodes […]. Pour croire que le vin rassérène, il faudrait que je fusse chrétien, je veux dire qu’il faudrait que j’eusse la foi, ce qui est pour moi une absurdité. » Philosophe charnel, pour qui la pensée se métabolise à partir du corps, Nietzsche redoute que les vapeurs de l’alcool ne fassent basculer son esprit dans une forme de brouillard mental qui le diminuerait intellectuellement et physiquement, le jetant à la merci des marchands d’illusions. Son choix se porte donc résolument… sur l’eau :
« Vers le milieu de ma vie, je me décidai, de plus en plus, contre l’usage de toute espèce de boisson spiritueuse. Moi qui suis, par expérience, l’adversaire du végétarianisme, tout comme Richard Wagner, qui m’a converti, je ne saurais conseiller assez énergiquement l’abstention absolue de l’alcool, à toutes les natures d’espèce spirituelle. L’eau fait l’affaire… J’ai une prédilection pour les endroits où l’on a partout l’occasion de puiser dans les eaux courantes (Nice, Turin, Sils) ; un petit verre d’eau me court après comme un chien. “In vino veritas : il semble bien que pour la notion de “vérité” me voilà encore en désaccord avec tout le monde. Chez moi l’esprit plane sur les eaux. »
“Moyen Âge, cela veut dire empoisonnement de l’Europe par l’alcool”
Friedrich Nietzsche, Le Gai Savoir

 
Les réticences de Nietzsche envers l’alcool sont donc d’une double nature : éthique et morale. D’un côté, l’alcool menace le bien-être et dénature notre relation au monde. De l’autre, il est, selon lui, responsable de la décadence européenne avec la chrétienté. C’est dans Le Gai Savoir qu’il porte ce jugement moral : « Peut-être le mécontentement des temps modernes en Europe vient-il de ce que nos ancêtres, à travers tout le Moyen Âge, grâce à l’influence du goût germanique sur l’Europe, étaient adonnés à la boisson : Moyen Âge, cela veut dire empoisonnement de l’Europe par l’alcool. »
Cet argument n’est peut-être pas le plus actuel pour rasséréner les personnes souhaitant lever le pied sur le lever de coude pendant le mois de janvier. Mais si vous faites le choix de rester au sec en janvier, sachez au moins que Nietzsche sera votre meilleur compagnon de non-beuverie !
Dans Les Deux Corps du roi. Essai sur la théologie politique au Moyen Âge (1957), Ernst Kantorowicz donne une définition de cette « fiction mystique » sous la plume d’Edmund Plowden, un juriste britannique du XVIe siècle : « Le Roi a en lui deux corps, un corps naturel et un corps politique. Son corps naturel […] est un corps mortel, sujet à toutes les faiblesses qui viennent de la nature ou par accident, de la stupidité de l’enfance ou de la vieillesse, ou des infirmités du corps qui peuvent survenir chez tout un chacun. Mais son corps politique est un corps qui ne peut être ni vu ni touché, consistant en une société politique et un gouvernement […]. » En quoi cette définition éclaire-t-elle parfaitement le problème que pose un président qui tombe malade – comme on l’a appris récemment avec un Donald Trump atteint du Covid ? Mais surtout, en quoi infuse-t-elle la politique américaine dans son ensemble ?  
Ivresse et états modifiés de conscience sont aujourd’hui accessibles aux masses. Des substances – licites ou non – de plus en plus puissantes sont à la disposition de quiconque cherche son shoot. Est-il alors si stupéfiant de devenir accro ?
Utiliser la philosophie comme outil thérapeutique contre l’addiction ? C’est le projet de cet ancien élève d’Henri Maldiney, qui dirige un centre médico-social d’aide aux alcooliques et aux drogués. Ou comment ouvrir au monde des individus enfermés dans leur dépendance.
Sur les hauteurs de Lausanne, en Suisse, le service hospitalier du professeur Jean-Bernard Daeppen, spécialiste des addictions, accueille les alcooliques sans leur faire la morale et propose aux héroïnomanes un programme révolutionnaire. Surtout, c’est le lieu où se croisent des humains dont les trajectoires bouleversées nous invitent à réfléchir à nos propres dépendances.  
Son nom ne dit généralement rien aux urbains, mais les habitants des communes rurales sont bien conscients du problème qu’elle pose : l’ambroisie (Ambrosia artemisiifolia) est une plante invasive qui colonise les champs et réduit considérablement les rendements agricoles. Mais surtout, les pollens libérés par sa floraison, qui commence début août, sont extrêmement allergènes. Un peu partout, la lutte s’organise, sans réussir à empêcher la propagation de la plante. Comment expliquer notre impuissance ?  
Dans son dernier livre, L’Esprit du corps (Robert Laffont, 2021), le scientifique et philosophe Étienne Klein s’intéresse à un domaine de recherche assez inattendu pour ce spécialiste d’astrophysique, à savoir les rapports entre la pensée et le corps. Il se demande, à travers une série d’exemples très bien choisis, ce que peut vraiment faire un corps et à quelles conditions. Et se dit plus proche du monisme de Spinoza que du dualisme cartésien. Entretien.  
Chantal Melior a affrété une nef “des idiots et des fous”, au Théâtre du Soleil. Sur cette même scène, elle adapte le récit de Wilfred Thesiger, “Le Désert des déserts”, émaillé des pensées de Nietzsche et de Deleuze sur le nomade. Car, sans repos, Chantal Melior fraie son chemin dans la jungle des textes philosophiques, cherchant dans cette ascèse un oasis.
Si la pandémie a révélé une chose, c’est au moins le « modèle guerrier » de nos politiques de santé. Le discours martial d’Emmanuel Macron (« nous sommes en guerre ») en avril dernier en est le meilleur exemple. Voilà pourquoi la professeur de philosophie Angélique Del Rey plaide pour que la crise sanitaire soit l’occasion de revoir cette approche soldatesque, afin de repenser la santé sur un « modèle environnemental ».  

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