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Myron Sugerman, le dernier « vrai » gangster juif au cœur d’un nouveau documentaire – The Times of Israël

À presque 85 ans, Myron Sugerman affirme être le dernier « vrai » gangster juif : un hors-la-loi unique en son genre, un « roi » des machines à sous illégales et un aventurier globe-trotter dont les missions clandestines comprenaient un soutien stratégique et financier au chasseur de nazis, Simon Wiesenthal.
Toujours avec ses lunettes de soleil Aviator, il est aujourd’hui le sujet du nouveau documentaire Amazon Prime « Last Man Standing : The Chronicles of Myron Sugerman » (« Dernier homme debout : Les Chroniques de Myron Sugerman »). Le film retrace la vie de Sugerman, né en 1938 à Newark, dans le New Jersey, et presque immédiatement catapulté dans une vie de mafieux par son père Barney Sugerman, autrement connu sous le nom de « Sugie » – un important gangster des années folles.
Sugie était membre de la mafia juive du New Jersey, aux côtés d’autres personnages tristement célèbres tels que Meyer Lansky, Bugsy Seigel, Charlie « Lucky » Luciano, Joe « Doc » Stacher, Abe Green et Abner « Longie » Zwillman, qui était connu comme le « Al Capone » du New Jersey.
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Les amis et associés du jeune Sugerman étaient également tous des hors-la-loi. « Si quelqu’un me demandait un jour si je connais un hors-la-loi, je répondrais que je n’ai jamais connu personne de légal », dit candidement Sugerman dans le documentaire. Mais, ajoute-t-il, « c’étaient tous des gars solides qui se sont opposés au violent antisémitisme qui prévalait à l’époque ».
En effet, les premières années de Sugerman ont coïncidé avec la montée spectaculaire du mouvement nazi américain, tout près de chez lui. Le parti Bund germano-américain était dirigé par Fritz Kuhn, qui s’est fièrement déclaré le « Hitler des États-Unis ». Le groupe se réunissait dans les brasseries de bières locales, puis, en état d’ébriété, il se rendait dans les vieux quartiers pour « tabasser du Juif ».
De puissantes images d’archives du tristement célèbre rassemblement nazi du Madison Square Garden, en février 1939, en faveur du nazisme et du fascisme, montrent de manière terrifiante comment la haine des Juifs européens s’est exportée aux États-Unis.
Ce mafieux de deuxième génération raconte de manière vivante comment son père et d’autres membres de la mafia juive ont réagi à la montée des violences.
« Il y avait toujours cette question de la fierté juive », dit Sugarman dans le documentaire. « Le gangster juif avait vraiment un besoin psychologique de montrer que les Juifs pouvaient être aussi durs que n’importe quelle autre communauté, parce qu’ils allaient rompre avec les 2 000 ans de la génération ‘tête baissée’ dans le ghetto – craintifs. Il n’y avait absolument aucune crise identitaire. Ces Juifs étaient des durs et étaient prêts à le prouver. »
C’est ainsi que la mafia juive a créé les Newark Minute Men, inspirés des « minutemen » de la Révolution américaine, qui étaient prêts à la minute à affronter les chemises brunes de Fritz Kuhn à Newark et ses environs.
Sugerman se souvient que Luciano, l’un des principaux membres de la mafia italienne, entretenait des relations étroites avec Lansky et avait proposé de l’aider à déjouer les attaques contre les Juifs. « Charlie, merci, je suis reconnaissant et j’apprécie, mais c’est un problème juif et cela va être résolu avec les poings juifs », répondît Lansky.
Grandir dans ce climat a eu un effet profond sur Sugerman. S’adressant au Times of Israel via Zoom depuis son domicile de Montclair, dans le New Jersey, Sugerman a déclaré qu’il a toujours vu un rappel effrayant du destin de la vie dans la célèbre photo en noir et blanc d’un jeune garçon pendant le soulèvement du ghetto de Varsovie en 1943, les mains levées sous la menace d’une arme.
« Cet enfant aurait pu naître en Amérique ; ça aurait pu être moi », dit Sugarman.
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Cette image, imprimée dans l’esprit de Sugerman, est devenue sa raison d’être pour défendre le peuple juif. Ce message a été renforcé par son père qui avait insisté pour que lui et son frère prennent des cours de boxe auprès d’un ancien professionnel juif, comme cela était courant à l’époque. « Vous allez apprendre à vous défendre. Vous aurez cette arme discrète que personne ne soupçonne. »
Collecte de fonds pour Wiesenthal
Les juke-boxes, flippers, machines à sous et autres amusements à pièces sont devenus son autre vocation lorsque, fraîchement sorti de l’université, Sugerman s’est associé à son père. Ce dernier, qui n’était pas un mafieux violent à proprement parler mais plutôt un opportuniste faisant parti d’un gang, a débuté en 1920 lorsque la loi sur la prohibition est entrée en vigueur. Il s’est fait connaître pour le trafic d’alcool, le racket et la distribution de machines à sous aux États-Unis. Son fils, jeune et énergique, a voyagé sur plusieurs continents pour devenir le plus grand fournisseur de machines à sous – alors illégales – au monde.
Le hors-la-loi semi-retraité raconte sa vie en toute franchise et avec beaucoup d’humour, même lorsqu’il décrit les moments difficiles.
« Quelle est la vie d’un hors-la-loi vivant dans l’illégalité ? » interroge-t-il dans le documentaire. « C’est extrêmement stressant. Vous ne savez pas d’où va surgir votre ennemi – soit d’en haut, de la loi, soit d’autres membres du monde du crime organisé – du crime désorganisé. Il faut donc être sur le qui-vive à tout moment. »
L’attrait de la réussite financière n’a cependant pas détourné le gangster de son autre mission inspirée par son père, à savoir « faire plus que de l’argent dans la vie ». Après le procès public d’Adolf Eichmann en Israël en 1961, Sugerman s’est senti investi d’une mission.
Lors d’un voyage d’affaires en Autriche en 1965, le jeune homme de 27 ans s’est présenté au bureau du célèbre chasseur de nazis, Simon Wiesenthal. Leur rencontre, qui avait pour toile de fond une carte du monde sur laquelle figuraient les emplacements des camps de concentration, a marqué le début d’une solide amitié. Il s’est porté volontaire pour aider Wiesenthal à collecter des fonds pour obtenir des informations, notamment dans le cadre de la chasse de l’ange de la mort, Josef Mengele, qui vivait au Paraguay.
Le prénom hébraïque de Sugerman est Meyer ; il est l’auteur de The Chronicles of the Last Jewish Gangster : From Meyer to Myron (« Les Chroniques du dernier gangster juif : De Meyer à Myron »). Il a finalement pu rencontrer Meyer Lansky lors d’un voyage en Israël en 1970. Le tristement célèbre mafieux juif lui avait alors donné un conseil crucial. « Fils, quand tu verras ton nom apparaître à la Une des journaux, lève ton popotin et cours. »
Plusieurs séjours en prison
Il y a eu des moments dans la vie de Sugerman où il savait que son « destin ne présageait rien de bon », mais il était trop inextricablement impliqué pour plier bagages et s’enfuir. Dans les années 1980, il a été accusé de violation des droits d’auteurs pour avoir vendu des planches de jeu contrefaites de Pac-Man, ce qui l’a conduit en prison jusqu’à ce qu’il parvienne à une négociation de peine. Puis, en 1993, le gouvernement américain a lancé une enquête fédérale, suite à laquelle il a été emprisonné 19 mois.

Sugerman a peu de regrets quant à son passé de hors-la-loi, commentant ironiquement, »je n’ai jamais rien fait de légitime, j’avais des principes ».
Il ne faisait que « répondre à la demande du public », dit-il, notant que les biens et services qu’il fournissait ont par ailleurs été rapidement légalisés par le gouvernement.
« Quand ils voient que quelque chose est rentable, ils l’enlèvent aux mafieux et se l’approprient. Les gros poissons mangent les petits poissons ; c’est ainsi que va le monde », dit Sugerman.
L’enfermement n’a pas entaché son enthousiasme. Au contraire, il a profité de ce temps mort pour travailler à son développement personnel.
« Je me suis remis en forme. Je lisais un livre par soir et je suis devenu très cultivé », dit-il. « Si vous abordez la vie sous un angle positif, c’est formidable. »
Son fils, le rabbin
Au fil des ans, Sugerman est devenu de plus en plus attaché à son judaïsme, notant qu’ « il n’y a pas de Juifs sans judaïsme ». Fier sioniste, Sugerman a eu trois fils, dont l’un est un rabbin modern-orthodox qui a eu huit enfants. Ils vivent à Boca Raton, en Floride.
« Il aurait pu être un gangster, mais à la place il est devenu rabbin », plaisante Sugerman. « Je ne serai pas parfait, mon fils le sera. »
Le documentaire s’achève par la visite de Sugerman sur les tombes des mafieux juifs Zwillman et Green. Dans cette scène, il contemple avec tristesse comment, des dizaines d’années après la mort de ces fiers défenseurs du judaïsme, la résurgence de l’antisémitisme est plus importante aujourd’hui qu’avant les années 30.
Une résonance bien trop forte aujourd’hui
Le réalisateur Jonny Kaplan a été attiré par l’histoire de Sugerman, car elle met en évidence le combat d’un homme contre l’antisémitisme, à une époque où la haine des Juifs se répand de plus en plus.
À l’aide de séquences d’archives et d’art déco des années folles à nos jours, le documentaire ramène les spectateurs à l’époque de la prohibition, et sa bande sonore entraînante de type Klezmer constitue un arrière-plan approprié pour les voix off de Sugerman.
« J’ai été conquis dès que j’ai appris la contribution de Myron et de la famille Sugerman à la lutte contre l’antisémitisme dans le monde occidental, sans oublier le parcours personnel de Myron jusqu’à aujourd’hui pour connecter, unir et éduquer les autres », a déclaré Kaplan.
Ce long-métrage est d’ores et déjà visible sur Amazon Prime et sera diffusé sur d’autres plateformes de streaming courant 2023. La société de Kaplan, Impossible Media, a également acheté les droits de l’histoire de Sugerman et travaille déjà sur une série télévisée basée sur sa vie.
Kaplan est particulièrement reconnaissant du succès du film, compte tenu des difficultés rencontrées lors de sa réalisation. Le documentaire a failli ne pas voir le jour, car sa production a coïncidé avec le pic de la pandémie de coronavirus, lorsque les voyages étaient restreints et que le nombre de contaminations atteignaient des sommets.
Sugerman a été lui-même frappé par la COVID, et d’une pneumonie associée à des vertiges, mais il s’est battu pour les surmonter, laissant Kaplan doublement impressionné par son infaillible détermination.
« Il est l’icône originale grandeur nature du gangster – l’accent, le chapeau, les lunettes, ses manières, tout est tellement inestimable. Ce que j’ai le plus apprécié, c’est son caractère fort et son énergie, qui résonne dès qu’on le rencontre », a dit Kaplan.
« J’ai succombé aux charmes de Myron dès notre première conversation. »
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