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Par notre correspondant Max HELLEFF (Bruxelles)
C’est avec presque deux mois de retard que s’est ouvert ce lundi, dans l’ancien bâtiment de l’Otan, à Haren, le procès des attentats de Bruxelles. Neuf hommes, rappelons-le, comparaissent plus de six ans après les tueries qui ont fait 32 morts et 340 blessés le 22 mars 2016 dans la station de métro Maelbeek et à Brussels Airport.
Seul Mohamed Abrini, «l’homme au chapeau», doit répondre de la participation directe à ces attentats. C’est lui qui a transporté les bombes aux côtés d’Ibrahim El Bakraoui dans le hall des départs de Zaventem, avant de s’enfuir au dernier moment. Les autres accusés – dont «Salah Abdeslam, 33 ans, électromécanicien» – sont poursuivis pour assassinats et tentatives d’assassinat dans un contexte terroriste. Un dixième, le Belge Oussama Atar, pressenti comme le chef de la cellule terroriste qui a frappé Paris et Bruxelles, fait défaut et est présumé mort.
Cette première journée a été consacrée à «l’identification des parties et aux explications» de la présidente de la cour d’assises Laurence Massart, laquelle a détaillé le rôle des acteurs de ce procès-fleuve qui devrait durer entre six et dix mois. Deux jurés suppléants étaient absents. La lecture de l’acte d’accusation est prévue pour mardi et jeudi. Il fait 470 pages.
Mais la mise en place du procès a été interrompue en milieu de journée par Mohamed Abrini. Le survivant de l’attentat de Brussels Airport a pris la parole pour se plaindre de ses conditions de détention et de transfert. «Ça fait 7 ans qu’on subit votre vengeance, a-t-il lancé à l’adresse des magistrats. Si vous voulez m’interroger aujourd’hui, je n’aurai rien à dire. Chaque fois que j’ai été transféré, ça a été dans des conditions pitoyables. On vous humilie, on vous met à nu, on met de la musique satanique à fond lors de nos transferts et on nous cagoule aussi. Les choses doivent changer, sinon je garderai le silence jusqu’à la fin du procès.»
Abrini a ajouté que ses conditions de détention et de transfert étaient meilleures en France. La cour d’assises de Paris l’a condamné en juin dernier à la perpétuité, avec une peine incompressible de 22 ans.
Cette sortie a été reprise au vol par Jonathan De Taye, l’avocat d’Ali El Haddad Asufi, un autre des neuf accusés. Il s’est adressé aux jurés pour les informer que «les conditions de détention de Monsieur El Haddad actuellement ne sont pas dignes. Depuis qu’il est revenu en Belgique, il a été placé dans un régime de haute sécurité. M. El Haddad ne voit aucun détenu, n’a rien dans sa cellule, ni bouilloire, ni machine à café, ni rasoir, ni aucun objet qui pourrait servir à quoi que ce soit». L’avocat a qualifié d’humiliantes les inspections anales que doit subir son client et a plaidé en faveur de conditions semblables à celles que les accusés ont connues en France lors du procès des attentats parisiens.
Delphine Paci, l’avocate de Salah Abdeslam, a pour sa part envoyé un courrier aux ministres de la Justice et de l’Intérieur, ainsi qu’au parquet fédéral, afin d’obtenir un allègement des conditions de détention de son client. Salah Abdeslam, seul survivant des attentats parisiens du 13 novembre 2015, était déjà en prison lorsque les bombes terroristes ont frappé la capitale de l’Europe.
La présidente de la cour d’assises, Laurence Massart, a rétorqué que les conditions de détention des accusés ne sont pas de son ressort. Pas plus que de celui du parquet fédéral qui s’engage à faire suivre ces doléances à qui de droit.
Les impératifs de haute sécurité qui vont de pair avec ce procès ont d’emblée fait débat. C’est dans cet esprit que des «box-cages» avaient été aménagés pour les accusés, avant d’être démontés in extremis, puis remplacés par un box plus conventionnel et surtout plus respectueux des droits de la défense. Ce faux départ explique pourquoi le procès a pris près de deux mois de retard.
Les forces de sécurité rappellent qu’elles auront à gérer chaque jour d’ici l’été prochain les centaines de personnes (accusés, magistrats, jurés, avocats, parties civiles, journalistes…) qui convergent vers le Justitia, ex-bâtiment de l’Otan dont la mise aux normes a déjà coûté 28 millions d’euros. Selon différentes sources, entre 200 et 250 membres de la police seront mobilisés quotidiennement sur le site. Un policier se tiendra derrière chaque accusé pendant toute la durée du procès, avec un chef d’équipe et une équipe d’intervention prête à agir en cas de problème.
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