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Mardi SF: l'elfe était dans le «Golden Age» – Libération

Dans «Golden Age», tout se passe près d’un petit village anglais en bord de mer, dans l’immense château d’un écrivain connu. (David Henderson/Getty Images)
Dès la première phrase, le lecteur comprend quel type d’univers propose Fabrice Colin : «Assis sur une branche haute, les pieds se balançant dans le vide, le petit être frissonna.» Suit une tentative de description de la créature, «un fagotin léger à culottes bouffantes», «un hoplite plus ou moins miniature coiffé d’un casque à plumets», «un adolescent boudeur vêtu d’un pourpoint orné de fils d’or»… Les paysans de ce coin du Dorset appellent cette sorte d’elfe un «pook», ce qui fait immédiatement penser au puck chez Shakespeare. Golden Age projette dans un univers féerique, mais aussi un vaudeville, un huis clos fantastique, un théâtre d’ombres cruelles où l’écrivain joue avec les références. Chacun de ses chapitres s’inspire ainsi de titres de romans publiés avant 1914 («le Manoir aux six tourelles» pour la Maison aux sept pignons de Nathaniel Hawthorne, «Paradis lointain» pour le Paradis perdu de John Milton, «Tandis que je meurs» pour Tandis que j’agonise de Faulkner, «Fierté et préjudice» pour… etc.) Et, au-delà du jeu de mots et du lutin shakespearien ou tolkienien, le texte semble baigné de sources et d’atmosphères familières, on pense à Jane Austen, Agatha Christie ou C. S. Lewis, à Tolkien, à Conan Doyle (Alan Coyle dans le roman) ou à James Matthew Barrie. On pourrait sans doute s’amuser à chercher tous les échos dont se sert Fabrice Colin pour monter sa sauce.
Tout se passe près d’un petit village anglais en bord de mer, Knighton Mills, dans l’immense château d’un écrivain connu, Kembell Gradey, où se trouvent en villégiature deux autres vieux auteurs britanniques, et bientôt un Américain hâbleur. Pour y parvenir, on suit l’irruption de Trevor Sinclair, un reporter venu de Londres pour réaliser une interview avec Kembell Gradey. Le journaliste du Clarion (un hebdo anglais de gauche ayant réellement existé) se révèle être une couverture, qui cache une femme, Beatrix, la maîtresse du fils du châtelain, venue intriguer pendant les vacances familiales et incarner la vision innocente de l’intérieur (l’elfe représentant celle de l’extérieur, de l’autre-monde, avec un regard amoureux sur les humains, envieux de leur mortalité). La temporalité a son importance, nous sommes en juillet 1914, à la veille de la Première Guerre mondiale, l’histoire se déroule sur sept jours. Comme le temps que peut peut-être mettre un univers à se créer ou à être détruit.
«Golden Age», comme le nom du stylographe, de corps ébonite et de pointe platine, que donne un Dodilus bégayant à Beatrix. «C’est un Golden Age. Vous s-savez ce que m’a dit le v-vendeur ? “L’encre s’épuise, pas les larmes du lecteur.” J’ignore si c’est leur slogan de réclame, mais j’espère que vous ferez couler beaucoup de l-larmes.» «Golden Age», c’est aussi l’âge d’or, celui qu’ont connu les vieilles gloires littéraires Gradey, Dodilus et Balfour. Il semble achevé, le don s’est tari. «L’inspiration. Partie sans laisser d’adresse. Vous a-t-on laissé dans l’ignorance ? La guerre arrive, monsieur Sinclair», dit Gradey. Bien pire, la muse, les fées se sont éclipsées. «Nous avons perdu le fil, Beatrix. Le contact avec l’infra-sensible.» Il faut le croire ici, il existe trois mondes : le nôtre, le leur, et celui du milieu, le Delirium d’où observe le pook (sa partie étant écrite dans une typo qui chagrine un peu les yeux). Comme les papillons qui se posent sur ses personnages, Fabrice Colin est parti du jeu de rôle et de l’imaginaire, a batifolé en mode graphomane dans tous les autres genres ou presque, et il revient à 50 ans sur son goût du merveilleux et de la charade littéraire où on l’avait connu en 2003 dans Dreamericana, déjà une histoire de panne d’inspiration, doublée de fantômes de la littérature. Dans ce conte cruel a priori foutraque et fourre-tout, il parvient à déposer dans l’esprit des images tenaces. Golden Age sort mercredi dans une collection flambant neuve lancée par Brigitte Leblanc en début d’année, «Le Rayon de l’imaginaire», signe du dynamisme du secteur. Une autre collection va voir le jour chez Rivages («Rivages /Imaginaire») fin octobre, par ailleurs mois de l’imaginaire pour la sixième année, qui met sur les feux de la rampe science-fiction, fantasy, fantastique et «tous les sous-genres qui les nuancent», et qui est orchestré par plus de 50 maisons d’édition.
© Libé 2022
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