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L'évaluation des acquis d'apprentissage, une boîte de Pandore ? – Le Devoir

L’auteur est professeur associé à l’Université de Sherbrooke.
La divulgation des résultats de l’examen du 26 septembre de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ) fait beaucoup réagir depuis l’annonce des résultats. Il y aurait beaucoup à dire ou à écrire sur cette situation : le choix d’un examen avec questions à choix multiples (QCM) associées à des situations cliniques écrites ; le choix de ne pas permettre de demandes de révision de la note, en arguant que « les réponses apparaissent dans une grille, laquelle est corrigée électroniquement », conséquemment « aucune interprétation des réponses n’est effectuée » ; le choix d’établir à 55 % le seuil de réussite de cet examen professionnel ; etc.
Ce qui se passe avec l’examen professionnel de l’OIIQ n’est pas singulier. Des questions similaires pourraient être soulevées parmi les 46 ordres professionnels au Québec qui sanctionnent le droit de pratique par un examen. D’autres ordres s’en remettent aux établissements d’enseignement supérieur pour valider les acquis d’apprentissage des futurs professionnels. C’est le cas de l’Ordre des psychologues du Québec (OPQ). Est-ce à dire que les programmes de 2e cycle ou de 3e cycle qui « donnent ouverture au permis délivré » par ces ordres professionnels sont exempts de problèmes liés à l’évaluation des acquis des étudiants ? Tant s’en faut.
Le 1er novembre 2022, Louise Leduc, de La Presse, publiait un article intitulé « Déséquilibre en psychologie ». Pour l’essentiel, elle y dépeignait le déséquilibre entre le nombre d’étudiants inscrits au baccalauréat en psychologie et le nombre, beaucoup plus petit, d’étudiants inscrits au doctorat (diplôme exigé par l’OPQ pour obtenir un permis de pratique). En réaction, Hélène David, ancienne professeure en psychologie à l’Université de Montréal, est citée : « Il faut des moyennes de malade [pour être admis au doctorat]. Si tu n’as pas des A partout, tu pleures ta vie. » Comment avoir des A partout ? D’aucuns pourront dire qu’il suffit alors de s’engager à fond, d’étudier très fort et de performer ! […] C’est une hypothèse qui se défend, mais c’est compter sans la façon d’évaluer les acquis d’apprentissage.
Dans un programme de psychologie au Québec, la personne responsable du cours « Psychologie de l’apprentissage » propose deux mesures d’évaluation : un examen intra (50 %), à la mi-session, et un examen final (50 %), à la fin de la session. Après la correction, certains étudiants ont appris qu’ils avaient eu de très bonnes notes et ils en étaient très heureux, mais une surprise les attendait. Peu de temps après, la personne enseignante les a contactés par courriel : « Une pénalité a été appliquée (12 points) sur l’examen final, car la moyenne était trop élevée. Bonne session. » Douze points de moins ! Pour certains, c’est l’équivalent de passer d’un A+ à un B+ ; pour d’autres d’un B à un C. Les conséquences sont importantes pour les étudiants : sans « moyenne de malade », la probabilité d’accéder au programme de doctorat diminue d’autant, comme le moral des étudiants touchés par ce type de mesure.
À quoi sert l’évaluation ? Pour bon nombre d’étudiants, la cible est l’obtention d’une note ; pour certains enseignants, la cible est de donner une note. Mais l’évaluation n’est pas la notation. Malgré tout, cette note est une des clés permettant l’admission à un programme, l’obtention d’une bourse, l’accès à un stage, etc. Mais l’évaluation devrait avant tout renseigner l’étudiant sur ses apprentissages (qualité et quantité), et ce, dans une perspective formative. À défaut, il y a confusion entre la fin et les moyens. La fin ne devrait pas être de « réussir l’examen », mais bien de démontrer qu’il y a eu apprentissage. Le moyen pour le démontrer est l’évaluation.
Dans un article intitulé Stop Telling Students to Study for Exams (2018), David Jaffe soutient que la pratique courante d’inviter les étudiants à étudier en vue de l’examen est contre-productive. Pourquoi ? Parce que cela va à l’encontre de l’apprentissage. Selon lui et beaucoup d’autres intervenants, les étudiants devraient être encouragés à étudier pour apprendre, pour comprendre. À défaut, l’étude, un moment charnière du processus d’apprentissage, est instrumentalisée. […]En sciences humaines, en particulier en psychologie, il a aussi été démontré que certains traits humains stables sont distribués de façon « normale » dans la population. Il est postulé que la population présente une distribution aléatoire et homogène des individus, ce qui n’est pas le cas d’un groupe d’étudiants universitaires. Pour ce groupe, l’application de la courbe normale présente un biais important. À titre d’exemple, l’intelligence moyenne de ce sous-groupe d’individus, comme sa distribution, n’est pas « normale ». Qui plus est, la performance à un examen ne représente pas un trait humain (stable). La performance des étudiants dépendra de plusieurs facteurs dont il a déjà été question, mais aussi de la qualité de l’examen, comme de sa correction.
Plusieurs écrits proposent de mettre en place des mesures d’évaluation qui soutiennent l’apprentissage et favorisent le développement des compétences chez les étudiants. De ces propositions ont émergé les concepts d’évaluation formative (à distinguer de l’évaluation sommative ou certificative) et d’évaluation authentique. La première vise avant tout à favoriser l’apprentissage des étudiants, en développant leurs habiletés et en leur permettant d’évaluer leur progrès. La deuxième propose d’évaluer les étudiants à travers un contexte ou une situation qui se rapproche de la réalité, professionnelle ou sociale. À titre d’exemple, les stages offrent habituellement de nombreux exemples de contextes et de situations professionnelles authentiques. L’évaluation porte alors sur la capacité des étudiants à « agir avec compétence » face à une tâche donnée.
Jusqu’à quel point les ordres professionnels et les programmes universitaires peuvent-ils aller dans ces deux directions ? Assez loin, si l’on se fie aux innovations mises en place dans certains programmes et chez certains ordres professionnels. Dans ces cas, l’accompagnement et les rétroactions offerts aux étudiants occupent une place prépondérante. Ces outils pédagogiques soutiennent alors non seulement l’apprentissage, mais également la motivation des étudiants. Ce faisant, c’est la personne apprenante qui est le point central du parcours d’apprentissage et de l’évaluation des acquis. Le développement personnel et professionnel, voire identitaire, des étudiants s’ajoute aux visées d’apprentissage du programme. La quête de sens de l’étudiant est alors davantage nourrie et, à son tour, alimente son engagement dans le parcours et les activités proposées.
Bien sûr, les ordres professionnels, comme les programmes universitaires sont responsables de la qualité de leur évaluation auprès d’autres parties prenantes . Il importe de ne pas perdre de vue que les étudiants eux-mêmes représentent une de ces parties prenantes, possiblement celle qui a le plus à gagner ou à perdre. Ces personnes sont en quête de légitimité, professionnelle et universitaire. Comme l’écrivent Bibeau et Meilleur (2022) : « L’exercice de quantifier une réalité ne fait pas que la décrire, elle contribue aussi à la définir. »
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