Le dernier congrès du Parti communiste fin 2018 a réservé son lot de surprises avec, pour la première fois de son histoire, l’adoption d’un texte d’orientation qui n’était pas celui de la direction sortante. Quatre ans plus tard, une première étape a été franchie ce week-end dans la préparation du 39e congrès, qui doit se tenir du 7 au 10 avril à Marseille. Le Conseil national du PCF a adopté dimanche matin par 84 voix pour, 55 contre, 5 abstentions, un projet de « socle commun » – le fameux texte d’orientation – intitulé « Ambition communiste pour de nouveaux « Happy Days » ».
» Les trois défis de notre 39e Le Congrès (doit) faire le bilan de l’action du parti au cours des quatre dernières années ; permettre aux communistes de porter un objectif qui réponde aux défis auxquels l’humanité est confrontée aujourd’hui, et travailler à construire un mouvement populaire majoritaire dans notre pays ; discuter du fonctionnement et du renforcement du parti », résume Christian Picquet, à la tête, avec Marie-Jeanne Gobert, de la commission chargée de rédiger le texte. Tout est décomposé en « sept grandes questions » qui vont de l’analyse de la crise systémique du capitalisme à « Défis de civilisation »– dont celui du réchauffement climatique –, à la définition du projet communiste, articulé autour de priorités telles que la question du travail, via la stratégie de « construire une majorité » . Douze objectifs sont également proposés pour « poursuivre le redéploiement du PCF », comme celle de 10 000 membres supplémentaires en trois ans.
Le débat qui a animé les communistes ce week-end porte d’abord, comme dans le texte, sur le bilan de la dernière période. Quatre années » extraordinaire « – entre pandémie, mouvements sociaux sans précédent, six élections, guerre en Ukraine et crise énergétique – rappelle le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel. “S Si nous avons pu, sur le plan électoral, enregistrer des gains significatifs (…), nous aurons aussi, dans le contexte difficile que traversent le pays et la gauche, subi des échecs. (…) Il n’en reste pas moins que ces années nous auront permis de regagner en visibilité, d’amener des questions fondamentales dans le débat public », assure également Christian Picquet. Concernant la présidentielle » sans aucun doute, pense-t-il l’hyper-présidentialisation, dans un contexte susceptible d’entretenir une grande confusion, avec notamment la guerre en Ukraine, nous aura privés du résultat que nous étions en droit d’espérer». Une analyse partagée par de nombreux supporters, mais qui suscite aussi des objections. « un exercice d’autosatisfaction » se sont exprimés quand d’autres critiquent – comme Frank Mouly, signataire d’un texte alternatif au dernier congrès – une visibilité acquise au prix de trop « personnalisation »et de « des mots cherchant l’ambiguïté pour faire éclater l’écran ».
Cette question en amène rapidement une autre, celle de la stratégie de ralliement au sein des Nupes. » Contrairement à (la) nouvelle percée de l’extrême droite, c’est désormais la gauche qui se heurte à un « plafond de verre »», estime le texte, qui note que la coalition ne devrait pas « devenir un carcan, ni servir de prétexte pour figer le rapport de force à gauche, d’autant que d’importants débats subsistent, tant sur les orientations que sur la stratégie « . » Les désaccords à gauche sont rappelés, comme la volonté hégémonique de la FI, mais il n’y a pas de réflexion sur comment dépasser cette situation et ouvrir une perspective à court terme, poser la question d’un post-acron qui ne soit pas synonyme de arrivée du RN mais avec l’ouverture pour notre peuple d’une nouvelle perspective de transformation et d’émancipation », juge la secrétaire fédérale de Seine-Saint-Denis, Nathalie Simonnet. A l’inverse, pour le coordinateur de l’exécutif national du PCF, Igor Zamichiei, « Ce texte propose une orientation et une stratégie claires, celle de s’adresser à tous ceux que la gauche ne peut rassembler aujourd’hui. Pour éviter la menace très pressante de l’extrême droite, il ne suffira pas d’avoir une victoire électorale ou de s’unir aux forces politiques, il nous faut des victoires politiques et sociales maintenant » .
Dans cette perspective, le document d’orientation met l’accent sur « identifier clairement le sujet de la révolution ». « Nous croyons que le monde du travail est destiné à devenir l’aile en marche, la force motrice rassemblant toutes les classes et strates disponibles dans un combat pour changer des vies », est-il écrit. Là encore, la stratégie fait débat. Pas tellement sur le« reconquête des classes laborieuses »jugé » fondamental « que sur la manipulation deconcepts, entrés dans le débat politique, sur l’opposition spatiale des classes populaires qui sont très discutables», pointe notamment le président du conseil national, Pierre Laurent. De son côté, Fabien Roussel assure qu’il s’agit bien de « œuvrer à fédérer les habitants des quartiers populaires urbains et les populations vivant en zone périurbaine ou rurale« .
Le projet « socle commun » lance également une« Appel à toutes les forces de gauche et écologistes »: « On ne peut se contenter d’une volonté d’être le premier opposant au pouvoir. Nous devons travailler à rassembler une majorité populaire autour d’une alternative de transformation sociale et écologique.Quid d’une liste commune lors de la prochaine échéance électorale, les européennes de 2024 ? « Nous participerons à cette élection et défendrons notre vision de la construction européenne, en rupture avec les traités existants »,est-ce indiqué. CAconférence d’ici l’été 2023est également prévu à cet égard. Des positions que plusieurs membres du conseil national jugent insuffisamment précises, certains regrettant aussi que ni les élections municipales de 2026 ni les élections présidentielles et législatives de 2027 ne soient abordées.
En 2018, plusieurs textes dits « alternatifs » ont été présentés, dont « Pour un manifeste du Parti communiste du XXIe siècle », qui l’a emporté (avec 42 %) contre celui de la direction sortante (38 %). Un autre texte, « Pour un printemps du communisme », soutenu notamment par les députés Elsa Faucillon et Stéphane Peu, et un dernier intitulé « Reconstruire un parti de classe », emmené par Emmanuel Dang Tran, avaient respectivement recueilli 12% et 8%. Les deux parties n’ont pas encore tranché mais elles ont jusqu’au 8 janvier pour soumettre une proposition de « socle commun » alternatif. Ils pourraient prendre les devants et annoncer leurs intentions avant la mi-décembre, on se glisse parmi ceux qui envisagent cette option. Si plusieurs textes étaient en lice, le choix reviendrait aux communistes avec un vote prévu fin janvier.
Grb2
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