Pour la Première ministre Elisabeth Borne, la situation des stations-service connaît une “amélioration sensible”. (Christophe Archambault/AFP)
– En marge du mouvement social dans les raffineries en cours depuis trois semaines, et au jour d’une mobilisation déjà prévue dans les lycées professionnels, une intersyndicale réunissant public et privé a appelé à la grève pour ce mardi.
– Divers secteurs devraient être concernés par les débrayages, au premier rang desquels les transports. Le trafic des trains en région, ainsi qu’en Ile-de-France, devrait être perturbé.
– Des manifestations sont prévues dans de nombreuses villes de France. A Paris, le cortège s’élancera de la place d’Italie à partir de 14 heures.
Moins de 25% des stations-service seraient désormais privées de carburant, Borne se félicite. La Première ministre Élisabeth Borne fait état d’une «amélioration sensible» dans les stations-service, dont moins d’un quart sont désormais privées de carburant, au lieu d’un tiers, en raison d’un mouvement de grève dans des dépôts et des raffineries. «Grâce à la sortie du conflit chez Esson-ExxonMobil, grâce à l’ensemble des mesures que nous avons prises, nous connaissons aujourd’hui une amélioration sensible de la situation», a affirmé la ministre lors de la séance des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale. «Au plan national, moins de 25% des stations service étaient en rupture (de carburant) à midi, contre 30% le week-end dernier», a-t-elle fait valoir au lendemain d’une réunion à l’Élysée où le président Emmanuel Macron avait demandé que la crise soit réglée «au plus vite».
«Enormément de colère» chez les salariés de Renault. Les ouvriers de l’usine Renault à Flins sont plusieurs dizaines à participer à la manifestation parisienne. Ils ne sont pas tous officiellement grévistes puisque, explique Ali Kaya, le secrétaire de la CGT, «plus de la moitié des 3 000 salariés, intérimaires compris, sont en ce moment au chômage partiel pendant six jours à cause de la pénurie de puces». Les difficultés d’approvisionnement qui durent depuis plus d’un an continuent de perturber l’activité des usines automobiles. Le syndicaliste constate qu’il y a «énormément de colère» chez les salariés à propos des rémunérations, tout en dénonçant «l’absence de dialogue» dans l’entreprise : «On se dit qu’il faut se lancer dans la bagarre comme les autres». Par Anne-Sophie Lechevallier
A l’Assemblée, le gouvernement interpellé par les oppositions sur la grève. «Madame la Première ministre, comment comptez-vous résoudre la crise sociale dont vous êtes responsable ?», a lancé ce mardi dans l’hémicycle la députée (EE-LV) Sophie Taillé-Polian, lors de la traditionnelle séance de questions au gouvernement (QAG). Alors qu’un mouvement social perturbe l’approvisionnement de carburants depuis trois semaines, l’exécutif se retrouve sous pression. Interpellée au Palais-Bourbon, Élisabeth Borne a répondu qu’il «est indispensable de sortir de ce conflit social». «Il n’est pas acceptable qu’une minorité continue à bloquer le pays, il est temps que le travail reprenne», a assuré la locataire de Matignon. La séance a tourné au bilan du gouvernement en matière de pouvoir d’achat. Le député Jean-Paul Lecoq (Gauche démocrate et républicaine) de Seine-Maritime a ainsi accusé le gouvernement de refuser «les leviers politiques» pour «maintenir le pouvoir d’achat, comme l’augmentation du Smic, du point d’indice des agents publics, des pensions». Par Victor Boiteau
«Ni amendable ni négociable : retrait, retrait de la réforme Macron». Le chant lancé par le SNETAA-FO est repris en cœur par les manifestants, refusant que les élèves soient «transformés en chair à patron». A mesure que le cortège avance, dans le calme, le long de la rue de Sèvres, les revendications fusent : «On veut des élèves, pas des larbins», «Pas touche à mon lycée pro», «on veut des profs pas des patrons»… Dans la foule, Sophie, ancienne enseignante d’espagnol en lycée professionnel est inquiète aussi bien pour ses collègues que pour les élèves : «En privilégiant l’entreprise, on sait très bien que ce sont les matières d’enseignement général qui vont en pâtir, et notamment les langues vivantes. Mais c’est aussi le statut d’élève et leur formation intellectuelle qu’on remet en question.» Par Marine Bourrier
A Saint Lazare, le trafic perturbé par la grève… et une bombe de la Seconde Guerre mondiale. Le trafic a été interrompu sur une ligne ferroviaire reliant la gare parisienne de Saint-Lazare et la proche banlieue ouest, après la découverte d’une bombe de la Seconde Guerre mondiale dans les Hauts-de-Seine, selon la SNCF, en pleine journée de grève dans les transports. «Un obus a été trouvé sur un chantier rue Raoul Nordling à #BoisColombes», a tweeté la préfecture des Hauts-de-Seine. Il s’agit du secteur de Bécon-les-Bruyères, selon un tweet de la SNCF, qui ajoute qu’une équipe de déminage a été dépêchée sur place. La ligne affectée est la ligne L de trains de banlieue, sur laquelle seulement un train sur trois circulait mardi à cause de la grève à la SNCF. Le trafic y est par conséquent interrompu entre Saint-Lazare, La Défense et Maisons-Laffitte, jusqu’à 16 heures, d’après l’opérateur.
👉 Une équipe de déminage est sur place.
A Paris, des élus Nupes en soutien au mouvement. Plusieurs élus de la Nupes, dont Clémentine Autain, Sandrine Rousseau, Boris Vallaud ou Olivier Faure, ont fait une incursion dans le carré de tête des syndicats de la manifestation parisienne, alors qu’elle avançait sur le boulevard Blanqui (Paris XIIIe). «Nous sommes venus soutenir le mouvement syndical», a expliqué Olivier Faure. Dénonçant «la perte immense de pouvoir d’achat» liée à la forte inflation et à la faible évolution des salaires, le premier secrétaire du Parti socialiste a estimé : «Notre place est avec celles et ceux qui veulent un partage plus juste de la richesse». Avant-hier, la marche contre la vie chère, à l’initiative cette fois des partis politiques de gauche, avait rassemblé 140 000 personnes selon les organisateurs (30 000 selon la police). Plusieurs des députés ont rejoint l’Assemblée nationale pour les questions d’actualité au gouvernement, et pour reprendre ensuite l’examen du projet de budget. Par Anne-Sophie Lechevallier
Réforme des lycées pro : «La voie professionnelle est menacée». A Saint-François-Xavier, dans le VIIe arrondissement de Paris, le cortège composé de plusieurs centaines de membres du personnel de l’enseignement professionnel se met en mouvement. Cette mobilisation, prévue de longue date par les syndicats, vise à protester contre la réforme des lycées professionnels engagée par Emmanuel Macron. «A ceux qui veulent détruire les lycées, les lycées pro répondent ‘Résistance’», scandent les manifestants. Pour Julien Picard, professeur de lettres, histoire et secrétaire académique du SNETAA-FO, «la voie professionnelle est menacée» alors que la réforme prévoit de réduire la part d’enseignement théorique au profit du temps passé en entreprise. Le représentant syndical revendique «plus de d’école que de patron». Le cortège se dirige vers le ministère de l’Éducation nationale – «notre véritable ministère de tutelle», glisse Julien Picard- alors que la gestion des lycées professionnels est partagée depuis le 4 juillet, et pour la première fois, avec le ministère du Travail. Par Marine Bourrier
Une queue de cortège en quête de bonheur à Paris. Un microcosme de manifestants patiente devant la mairie du XIIIe arrondissement de Paris, en queue de cortège, en attendant que celui-ci s’ébroue. Ambiance très calme, très douce : la sono de la buvette Force ouvrière fait résonner le Angie des Rolling Stones. Il y a de la mélancolie dans l’air. On circule facilement d’une grappe de personnes à une autre. Écharpe tricolore sur l’épaule, Olivier Faure aspire sa cigarette électronique. Le premier secrétaire du PS attend notamment les députées Clémentine Autain et Sandrine Rousseau : la Nupes est là. Des drapeaux de la CGT s’agitent au bout des bras, avec plusieurs corporations représentées : banques-assurances, agents de la Bibliothèque nationale, hôpitaux publics, journalistes… Un homme se distingue avec un immense drapeau rouge qui revendique un «violent désir de bonheur». Par Jérôme Lefilliâtre
A Troyes, «ils ont raison de manifester». Plusieurs centaines de personnes se rassemblent devant la préfecture de l’Aude à Troyes avant de manifester dans les rues de la ville. Plusieurs organisations syndicales sont présentes, CGT et FO en tête, mais aussi la délégation départementale de la Nupes et des militants de la France Insoumise. «Ils ont raison de manifester, raconte Vikram, un jeune à vélo qui observe le rassemblement sourire aux lèvres. Le gouvernement dit écouter les Français, mais il ne fait rien pour les salaires, ça ne peut plus durer.» Par Benjamin Delille
Début de rassemblement devant la préfecture de l’Aube à Troyes avant une manifestation dans les rues de la ville à l’appel de différentes organisations syndicales. @libe pic.twitter.com/GgNfQrRDzQ
Selon RTE, les mouvements sociaux pourraient avoir «des conséquences lourdes». «Une prolongation du mouvement social aurait des conséquences lourdes sur le cœur de l’hiver» : c’est le signal d’alarme tiré par RTE (Réseau transport électricité) à l’occasion d’un point presse ce mardi. Le gestionnaire, qui avait présenté mi-septembre ses scénarios plutôt optimistes pour les six mois à venir, anticipe désormais «un très faible risque pour la sécurité d’approvisionnement et un risque modéré pour début novembre». En cause, «l’incertitude» concernant la remise en service des quelque 25 réacteurs sur 56 actuellement mis à l’arrêt par EDF pour des travaux de maintenance ou de réparation. «Les mouvements sociaux sur le parc nucléaire ont conduit à des prolongations d’arrêt généralement de deux à trois semaines sur les réacteurs dont la remise en service était imminente ou proche. Pour les autres, ils engendrent également des retards dans la maintenance des réacteurs», constate RTE. Le mouvement de grève déclenché la semaine dernière par la FNME-CGT, dans le sillage du mouvement des raffineries Total pour les salaires, a en effet stoppé net les travaux en cours sur une dizaine de réacteurs. Le gestionnaire du réseau estime que le risque de coupures reste malgré tout modéré cet hiver. Par Jean-Christophe Féraud
«La mobilisation dans les raffineries a ouvert un chemin.» C’est la porte-parole de Solidaires, Murielle Guilbert, qui le dit avant le départ du cortège parisien, place d’Italie, à l’occasion du traditionnel jeu de questions /réponses des responsables syndicaux avec les médias. Comme ses collègues de la CGT, FO et la FSU, elle pense qu’ «il y a quelque chose à jouer aujourd’hui». «La question des salaires est posée partout. Ce qu’on veut, c’est que cette mobilisation s’amplifie», dit ainsi Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT, qui cite en exemple les «58 % de grévistes» dans les lycées professionnels ce mardi, «du jamais vu en quarante ans». Mais la raison d’être de cette journée décidée il y a quelques jours seulement, c’est bien sûr les réquisitions de salariés grévistes dans les raffineries décidées par le gouvernement. C’est pour ça que Frédéric Souillot, le secrétaire général de FO, est là cette fois-ci. Avec des perspectives de reconduction ? «C’est dans chaque entreprise ou administration que ça va se décider», évacue-t-il. Benoît Teste, le secrétaire général de la FSU, reconnaît qu’ «il y a un côté réaction spontanée» dans la mobilisation d’aujourd’hui, mais selon lui, «c’est évident que ça va continuer». Par Frantz Durupt.
A Gare de Lyon, aussi, la grève est reconduite. L’Assemblée générale de Gare de Lyon, terminée 30 minutes plus tôt, s’est soldée par une reconduction de la grève mercredi. La plupart des participants ont quitté les lieux, soit pour «aller boire un coup» ou préparer «la manifestation de cet après-midi». Ce n’est pas le cas de Sébastien Morel, membre de la Sud rail PSE, qui échange avec deux collègues. Le quadragénaire n’arrive pas à joindre les deux bouts et ça depuis trop longtemps. «Après 30 ans dans l’entreprise, je touche à peine plus de 2000 euros alors que je travaille de nuit, les week-ends et jours fériés. Entre mon loyer et les pensions alimentaires, il ne me reste plus rien pour vivre.» Ce père de famille divorcé réside, depuis 2015, dans un 12m2 à Paris. Il lui est impossible de recevoir ses deux enfants quand il en a la garde. «La SNCF sont bons qu’à nous donner des primes. Sauf qu’ils (la SNCF ndlr) peuvent les arrêter quand ils veulent et ce n’est pas pris en compte pour la retraite. On exige une augmentation des salaires nets.» L’homme fera partie du cortège qui partira de Place d’Italie à 14 heures. Par Théodore Laurent
Grèves à Gare du Nord : «Aujourd’hui, ça semble être le seul moyen de faire quelque chose pour obtenir des avancées». Malgré de fortes perturbations sur certaines portions du réseau francilien en raison des mouvements de grèves, le télétravail semble avoir eu raison de la pagaille qui couvait ce mardi matin à la gare du Nord. Pour les voyageurs contraints de se déplacer, en revanche, les temps trajets s’allongent. Mais la plupart disent soutenir les grévistes. A l’instar d’Ambre qui, malgré les embûches, dit «comprendre totalement» le mouvement social de ce mardi, et celui en cours depuis deux semaines dans le secteur pétrolier. Son regard balaie le quai semi-désert. «Aujourd’hui, ça semble être le seul moyen de faire quelque chose pour obtenir des avancées», estime-t-elle, masque bleu sur le visage, tout en scrutant le tableau d’affichage des trains. Retrouvez notre reportage ici.
Grève reconduite à la Gare du Nord. A l’AG du site de la Gare du Nord, environ 150 agents de la SNCF viennent de voter la reconduction de la grève «au moins jusqu’à demain» pour faire entendre leurs revendications salariales. La foule entonne des «ça va péter !» ponctués d’applaudissements. «On doit saisir l’opportunité qui nous est offerte par les raffineurs, nous avons une fenêtre entrouverte pour tirer notre épingle du jeu, lance Sébastien Peronnet de la CGT, micro en main. Dans nos ateliers, sur le terrain et nos chantiers, la situation n’est plus vivable et les salaires sont indécents. Agissons, c’est le moment ! Notre direction doit avoir peur, comme chez Total, elle ne comprend que le rapport de force. J’espère qu’on ira jusqu’au bout pour les faire plier.» Anthony Auguste, commercial gare syndiqué à Sud-Rail, veut y croire : «Le contexte de lutte sociale actuel nous est favorable, on est maître de notre destin, il faut aller chercher ces augmentations de salaire, il faut envahir la rue, aller convaincre les collègues. Ça suffit d’avoir seulement les miettes du gâteau. C’est l’heure de renverser la table.» À la quasi-unanimité, les grévistes du jour ont également voté pour deux revendications phares : une augmentation nette des salaires de 500 euros, et un salaire à l’embauche qui ne pourrait être sous les 2 000 euros. Par Anaïs Moran
«Si chacun y va de son côté on n’arrivera pas à faire déjouer le patronat». Venu soutenir les grévistes à la Gare de Lyon, Jean-Luc Mélenchon s’est adressé aux salariés mobilisés. «Ce n’est pas juste, quand on travaille, que l’on ne puisse pas vivre décemment. La bonne paye ce n’est pas de l’argent qu’on jette par les fenêtres. C’est la juste rétribution des salariés. Partout le crédit va devenir plus cher. Il faut que l’unité populaire puisse entrer dans la lutte. Ça, c’est notre responsabilité. Car si chacun y va de son côté on n’arrivera pas à faire déjouer le patronat», déclame-t-il. Par Théodore Laurent
«S’organiser au mieux pour que le gouvernement soit dans l’impasse», avec les cheminots à Gare du Nord à Paris. Midi, on attend les retardataires pour débuter l’Assemblée générale des cheminots à la Gare du Nord. Au bout du quai 36, lieu de rassemblement désormais bien connu des grévistes et haut lieu des mobilisations contre la réforme du régime des retraites en 2019, une centaine d’agents de la SNCF sont déjà regroupés. Les fanions et gilets aux couleurs de la CGT et de Sud-Rail sont de sortie. Ce matin, il est question de voter la reconduction (ou non) de la grève et de débattre de la forme que doit prendre le mouvement de contestation pour une hausse des salaires et contre les conditions de travail dégradées. Laura, 41 ans, conductrice : «Moi demain, c’est sûr, je suis de nouveau gréviste mais je trouve ça sain et constructif qu’on en discute tous ensemble. Voir comment on peut s’allier aux autres salariés qui font tourner notre société. Il faut s’unir de manière intelligente, s’organiser au mieux pour que le gouvernement soit dans l’impasse.» Par Anaïs Moran
Paris, le 18 octobre 2022 Quai 36.Assemblée générale des cheminots à la Gare du Nord. (Stéphane Lagoutte/Myop pour Libération)
Paris, le 18 octobre 2022 Quai 36.Assemblée générale des cheminots à la Gare du Nord. Anasse Kazib, délégué du personnel SUD rail. (Stéphane Lagoutte/Myop pour Libération)
6,9 % d’augmentation, la grève chez des chauffeurs routiers s’arrête en un jour. Comment arrêter une grève en une seule journée ? Les patrons de l’entreprise de chauffeurs routiers Bréger ont trouvé une astuce : augmenter les salaires comme le demandaient lundi ses salariés en grève. Ils étaient 150 au siège de Laval lundi, des centaines d’autres sur les autres sites. Selon France Bleu Mayenne, les négociations ont commencé à 14 heures et, à 20h15, toutes les parties ont trouvé un accord : une augmentation de 6,9 % entre octobre et janvier et 5 % en plus sur les frais de bouche. «Environ 90 % à 95 % des effectifs camions sont à l’arrêt», estimait lundi Stéphane Ramond, délégué syndical central FO Transports Breger. Une astuce dont pourrait s’inspirer TotalEnergies pour ses raffineries ? Par Damien Dole
«L’éducation est un droit», avec les grévistes d’un lycée parisien. Un blocus filtré est en cours au lycée général Hélène Boucher dans le XXe arrondissement de Paris. Depuis 8 heures, une quarantaine d’élèves sont regroupés derrière une barricade de fortune constituée de poubelles. Les inscriptions «Jeunesse en galère, lycéens en colère» et «ACAB» (All cops are bastards) sont affichés sur des banderoles. Elliott, qui a participé à l’organisation du blocus, égrène les raisons de cette action : «L’éducation est un droit. On est ici pour lutter contre la précarité étudiante, la réforme des lycées professionnels, l’inaction climatique et les violences policières.» La situation est calme. Les élèves qui le souhaitent peuvent entrer dans l’établissement. Par Marine Bourrier
Jean-Luc Mélenchon au soutien des manifestants. Ils sont plus d’une centaine à suivre l’arrivée de Jean-Luc Mélenchon à Gare de Lyon, venu en soutien à la manifestation des cheminots de la SNCF, initiée par la CGT et SUD rail PSE. Se dirigeant vers l’ancien centre de tri de l’entreprise ferroviaire, l’ex-député des bouches du Rhône lance «nous sommes unis par de nombreux liens, de nombreuses luttes menées ensemble (avec les syndicats présents aujourd’hui, ndlr)» avant d’ajouter «on espère que notre présence donne de l’élan à une lutte qui est juste». Dans l’ancien centre de tri, les quelques grévistes déjà présents allument un feu sur une chanson de Bob Marley. Jean-Luc Mélenchon s’approche d’un des chefs de file de la CGT cheminot, le visage las. «Vous êtes une entreprise vitale», lui assure l’insoumis. «Dans les pays où les chemins de fer ont été démantelés, on a pu constater la catastrophe engendrée». Par Théodore Laurent
6 % de profs grévistes. Le ministère de l’Education nationale communique sur une moyenne nationale de 6,04 % d’enseignants participant au mouvement de grève du jour. La mobilisation est principalement portée dans les lycées professionnels (22,94 %). Elle a été moins suivie dans le primaire (2,48 %). La voie professionnelle est touchée par une refonte voulue par Emmanuel Macron. Ce projet, en renforçant les stages, risque de faire reculer l’école au profit des entreprises.
Universités et lycées bloqués dans plusieurs villes en France. Traditionnellement parmi les plus mobilisés lors des mouvements sociaux et étudiants, le site de Tolbiac, de l’université Paris-I, et Paris-8, à Saint-Denis, sont bloqués ce mardi matin en raison de la journée de mobilisation. Selon Solidaires étudiants, Sciences-Po Lille l’est également, rejoignant plusieurs dizaines de lycées à Paris, Marseille, Rennes, Angers ou encore Grenoble.
Accord majoritaire contre vote d’une majorité, la passe d’armes Roussel /Le Maire. En réponse à Bruno Le Maire qui appelait les grévistes de TotalEnergies à respecter l’accord signé par les syndicats majoritaires de l’entreprise, Fabien Roussel demande au gouvernement de respecter le vote sur la taxation des superprofits passé à l’Assemblée nationale contre l’avis du gouvernement. «Le temps de la négociation est passé. Il y a eu une négociation, il y a eu un accord, cela veut dire qu’il faut que force reste à la voix majoritaire», avait déclaré le ministre, lundi. «On va pouvoir en parler, du respect des accords majoritaires», ironise en retour Fabien Roussel. «Quand il y a une majorité de députés de gauche et de droite qui votent de mettre des dotations à la hauteur pour les communes, qui demandent qu’il y ait une taxe sur les superprofits […], il faut que ce soit respecté dans le projet de loi de finances».
Réunion ce soir à la CGT des sites pétroliers de TotalEnergies pour décider de la suite. Les représentants CGT du raffinage chez TotalEnergies se réuniront mardi à dix-huit heures, pour discuter du mouvement en cours. «On verra la suite, si on poursuit, ou pas, ou partiellement. Cela dépendra notamment de la journée d’aujourd’hui, cela redonne de l’élan et il y a toujours ce sentiment de colère. On verra si cela suffit pour pousser le mouvement. Et in fine ce sont les salariés qui voteront,» explique le coordinateur CGT pour le groupe, Eric Sellini. Le mouvement de grève à l’appel de la CGT les sites TotalEnergies de Normandie, Donges, La Mède, Feyzin (le dépôt, la raffinerie étant à l’arrêt pour raison technique) et Flandres (dépôt). La CGT n’a pas signé l’accord sur les salaires conclu vendredi dernier entre la direction et deux syndicats majoritaires.
Entre Emmanuel Macron et les salariés, un immense gouffre. C’est toujours plus facile de refaire l’histoire après coup. Mais, tout de même, si l’on redéroule le film de ces dernières semaines on comprend vite pourquoi on en est arrivé là, englué dans ce mouvement de colère que l’exécutif peine à arrêter. L’appel à la grève de ce mardi 18 octobre est le résultat prévisible d’une conception verticale du pouvoir et d’une forme de déni, qui n’ont fait que s’aggraver ces dernières semaines. L’édito d’Alexandra Schwartzbrod.
Nucléaire, hydraulique… L’énergie étend le domaine de la lutte. Le secteur de l’énergie traverse des zones de turbulences. Et elles sont aussi sociales depuis plusieurs semaines. Selon la Fédération nationale des mines et de l’énergie de la CGT, la centrale nucléaire de Penly (Seine-Maritime) est devenue ce mardi matin le 11e site en grève, certaines retardant des opérations de maintenance, d’autres ayant un impact sur la production d’énergie, comme à Gravelines, la plus grande d’Europe de l’Ouest, ou depuis ce mardi matin dans la centrale de Bugey. Les usines hydrauliques amplifient de leur côté leur mouvement, trois sites dans la vallée de l’Ain et en Isère ayant une baisse de production, selon la FNME-CGT. «La centrale EDF de Cordemais a rejoint l’action de grève nationale interprofessionnelle à l’appel de la CGT, affirme à Libération un représentant syndical du site. Usine de traitement des déchets à Saint-Ouen, Compagnie parisienne de chauffage urbain, Enedis, GRDF… Diverses entreprises sont elles aussi en mouvement ce mardi. «Tous les secteurs de l’énergie sont mobilisés ce mardi sur les questions salariales, mais aussi sur les retraites et contre la répression syndicale», résume à Libé Julien Lambert, de la FNME-CGT. Par Damien Dole
Dans un lycée parisien, un élève demande qu’on «écoute la jeunesse d’aujourd’hui». Le blocage se poursuit dans le calme au lycée général Hélène-Boucher, dans le XXe arrondissement. Les forces de l’ordre se sont positionnées à l’entrée de l’établissement pour assurer le filtrage. Une trentaine d’élèves, debout sur les poubelles alignées devant l’entrée, brandissent des pancartes : «Notre planète se meurt», «Contre le pouvoir, pour notre avenir». Nathalie, chauffeuse de bus et parent d’élève, est venue soutenir les lycéens : «Je suis sur le piquet de grève depuis 4 h 30 ce matin. Il faut écouter la jeunesse d’aujourd’hui, elle a plein de choses à nous dire.» Les élèves appellent à se joindre à la manifestation prévue aujourd’hui à 14 heures au départ de place d’Italie. Par Marine Bourrier
«Agacée», mais «ils ont le droit de faire grève, vu certains bénéfices réalisés». Sur le quai de la ligne E, le télétravail semble avoir eu raison de l’affluence habituelle. Mais pour la poignée de voyageurs qui n’ont pas eu d’autres choix que d’utiliser la ligne, «c’est très très compliqué». Sara, 37 ans, n’avait pas d’autre alternative : son chef a refusé le distanciel. En panne d’essence, elle est partie à 7 heures de Saint-Gratien (Val-d’Oise). «Il est 8 h 47 et je ne sais pas quand je vais arriver», désespère-t-elle, avec un sourire de circonstance. En voiture, la psychologue aurait rejoint Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), où elle doit enchaîner «les comptes rendus et les réunions», en à peine trente minutes. Les grèves successives de ces deux dernières semaines ? «Curieux», estime-t-elle, tout en «comprenant le fond du problème», elle qui a une sœur chez TotalEnergies. «Toutes ces revendications m’ont semblé légitimes», poursuit-elle, avant d’avouer être «agacée» par «l’accumulation essence et transports». Surtout qu’elle sort d’une journée à rallonge la veille, et plusieurs heures à arpenter les transports en commun entre Créteil, Bondy et le Blanc-Mesnil. Sara ne fait jamais grève mais soutient les grévistes : «Ils ont le droit, vu certains bénéfices réalisés par les groupes. Un peu de partage, ça ne fait pas de mal.» Par Romain Métairie
Makhlouf, agent de sécurité de nuit de 59 ans, sort du travail. Il est reparti de Bonneuil à 7 heures et rentre à Aulnay-sous-Bois. (Stéphane Lagoutte/Myop pour Libération)
Ivan, 20 ans, est étudiant. Il vient d’Epinay-sur-Seine et se rend à Villetaneuse (Seine-Saint-Denis). (Stéphane Lagoutte/Myop pour Libération)
En temps de pénurie, l’homme est-il un loup pour l’homme ? S’il est naturellement égoïste et peut donner libre cours à ses plus bas instincts à la première pénurie, l’homme n’est pas le seul coupable. Selon Gilles Vervisch, professeur de philosophie, c’est le système qu’il faut changer, celui qui consiste à vouloir «épargner», «capitaliser», surproduire. Notre tribune.
Les lycéens dans la danse. Un blocus filtré est en cours depuis le petit matin au lycée général Hélène Boucher, dans le XXe arrondissement de Paris. Une quarantaine d’élèves sont regroupés derrière une barricade de fortune constituée de poubelles. Les inscriptions «Jeunesse en galère, lycéens en colère» et «ACAB» sont affichés sur des banderoles. Elliott, qui a participé à l’organisation du blocus, égrène les raisons de cette action : «L’éducation est un droit. On est ici pour lutter contre la précarité étudiante, la réforme des lycées professionnels, l’inaction climatique et les violences policières.» Les élèves qui le souhaitent peuvent tout de même entrer dans l’établissement. Par Marine Bourrier
Les cheminots sur les rails d’une grève prolongée ? A Saint-Denis comme à gare du Nord, les cheminots ont voté la grève dès ce lundi, à la veille de la mobilisation interprofessionnelle, avec la question des salaires au centre des AG. En cas de réussite de la mobilisation ce mardi, certains pourraient être tentés de prolonger le mouvement avec les vacances de la semaine prochaine en ligne de mire, afin d’obtenir gain de cause. Interrogé sur une éventuelle poursuite de la grève à la SNCF, le dirigeant de la CGT Philippe Martinez a toutefois affirmé ce mardi matin sur RTL ne pas avoir donné de consigne : «Ce sont les salariés en grève qui décideront. Comme chez TotalEnergies».
Gare du Nord ce matin. (Stéphane Lagoutte/Myop pour Libération)
Les syndicats, meneurs d’enjeux. «Prendre les Français en otage», «cégétisation du débat politique»… Ce sont des mots, des expressions, qui semblaient remisés depuis quelques années. Un lexique du «monde d’avant», en quelque sorte, qui fait son retour ces jours-ci. Et dit bien combien l’atmosphère sociale en France a changé en l’espace d’un mois. Malgré un soutien tardif aux raffineries, la CGT, Solidaires, FO et la FSU portent la grève de ce mardi, amplifiée par les réquisitions dans les dépôts. Notre analyse.
«Moi, si je veux une augmentation je vais procéder autrement». Ce mardi, Luxen a anticipé. Cet étudiant de 22 ans, en alternance dans l’informatique, a pris un train plus tôt que d’habitude au Plessis-Robinson (Hauts-de-Seine), où il vit, histoire de s’éviter des galères dans la jungle des transports parisiens. Le jeune homme devrait s’en tirer avec une quinzaine de minutes de débours seulement, en arrivant au boulot à Bondy (Seine-Saint-Denis). «J’ai l’habitude des transports ici», souffle-t-il. Les revendications sur la hausse des salaires, sur le droit à faire grève, il soutient et comprend «lorsque ça concerne l’essence et les raffineries». Moins lorsqu’il s’agit d’évoquer la généralisation du mouvement : «Moi, si je veux une augmentation je vais procéder autrement, en discuter directement avec mes supérieurs. Là, ça pénalise tout le monde.» Par Romain Métairie
Darmanin «demande aux employeurs de négocier». Bien conscient que «les stations essences ne fonctionnent pas normalement» ce mardi matin, le ministre de l’Intérieur avance sur RTL les deux mêmes réponses que le gouvernement depuis plusieurs jours sur cette crise des carburants : «Il faut qu’on y réponde en ouvrant les stocks stratégiques, ce qu’a fait la Première ministre, et aussi en demandant aux employeurs de négocier. Tous les employeurs ne l’ont pas fait de la même manière. Il faut que ces négociations salariales se terminent le plus vite possible. La Première ministre met largement la pression sur ces employeurs». Darmanin admet toutefois qu’il «ne [peut] pas s’engager» sur une date de sortie de crise.
La macronie en galère Total. Un mois après le début des arrêts de travail dans les raffineries, l’exécutif tente de rattraper le retard pris dans la gestion du conflit sur le carburant. En procédant aux réquisitions, il en est devenu l’un des acteurs. Et le chef de l’Etat guette les autres foyers inflammables : la journée d’action interprofessionnelle prévue ce mardi et, à l’Assemblée, un recours au 49.3 sur le projet de budget imminent. Notre récit.
Malgré les galères de transport, les usagers «soutiennent le mouvement». Il est un peu plus de 7 heures ce mardi matin à la gare du Nord. Ambre est partie aux aurores de Bagnolet (Seine-Saint-Denis), direction Bures-sur-Yvette (Essonne), mais elle sait déjà qu’elle ne sera pas à l’heure à 8 h 15 pour le travail. En temps normal, cette médiatrice culturelle, 23 ans, met 1 h 15 en guise de trajet. Là, avec seulement 1 train sur 3 prévus pour la journée sur la ligne du RER D, «ça risque d’être plus aux alentours de 2 heures». Malgré tout, Ambre dit «comprendre totalement» le mouvement social de ce mardi, et celui en cours depuis deux semaines dans le secteur pétrolier. Son regard balaie le quai semi-désert, à cette heure très matinale. «Aujourd’hui, ça semble être le seul moyen de faire quelque chose pour obtenir des avancées», estime-t-elle, masque bleu sur le visage, tout en scrutant le tableau d’affichage des trains. Elle se dit «étonnée» que la RATP ne soit pas «assez impliquée» dans cette grève interprofessionnelle. «Est-ce que ce sont les conséquences de la grève de 2019 ?», s’interroge-t-elle. «En tout cas, je soutiens le mouvement». Par Romain Métairie
A la gare du Nord ce mardi matin, Ambre, médiatrice culturelle de 23 ans, vient de Bagnolet et se rend à Bures-sur-Yvette. (Stéphane Lagoutte/Myop pour Libération)
Demandez le programme. A Paris, la manifestation s’ébranlera à 14 heures de la place d’Italie (XIIIe arrondissement), en direction de la place Vauban (VIIe). Un autre cortège, pour protester contre la réforme des lycées professionnels, défilera du métro Saint-François-Xavier (VIIe) au métro Sèvres-Babylone (VIe-VIIe). La police anticipe respectivement 15 000 et 2 000 personnes pour les deux manifestations dans la capitale, et les autorités s’attendent à voir les «ultrajaunes» et «l’ultragauche» essayer de constituer un cortège devant le carré syndical. Le 29 septembre dernier, entre 13 500 et 40 000 personnes – suivant la police et les organisateurs – avaient battu le pavé parisien pour la précédente journée de manifestation interprofessionnelle.
Parole de grévistes. Certains font grève pour la première fois, d’autres retrouveront ce mardi le bitume qu’ils ont souvent parcouru à l’occasion de précédents mouvements sociaux : Libération donne la parole à six salariés en grève pour réclamer une «augmentation des salaires».
Des cortèges à travers toute la France. Près de 150 points de rassemblement sont prévus en France, selon la CGT, qui organise cette journée avec les syndicats FO, Solidaires et FSU et les organisations de jeunesse Fidl, MNL, Unef et la Vie lycéenne. Les manifestants défileront pour «l’augmentation des salaires et la défense du droit de grève», selon les termes du communiqué intersyndical publié la semaine dernière. La précédente journée de mobilisation interprofessionnelle, le 29 septembre, avait rassemblé 118 500 personnes selon la police (250 000 et 40 000 selon les organisateurs). Le sujet des retraites, sur fond de réforme macronienne, s’était invité dans cette marche pour les salaires. Notre reportage.
Macron met la pression. Coincé dans ce sujet inflammable depuis de longs jours et soucieux de régler les difficultés d’approvisionnement en carburant des Français «le plus vite possible», le président de la République a convoqué ce lundi en fin d’après-midi une réunion à l’Elysée. Possible signe de l’urgence, les ministres ont appris par une annonce de l’AFP un peu plus tôt qu’ils étaient sommés de se rendre au palais, selon le site l’Opinion. «Le président de la République en a appelé à l’esprit de responsabilité de tous et a mis en exergue les conséquences insupportables pour ceux qui souffrent quotidiennement de cette galère», a raconté un participant à cette réunion, sous couvert d’anonymat.
L’état des lieux dans les huit raffineries françaises. La grève dans les raffineries françaises de TotalEnergies a été reconduite sur cinq sites par la CGT lundi tandis que, du côté d’Esso-ExxonMobil, elle a été levée jeudi et vendredi. Libé fait le point sur la situation des raffineries mobilisées.
© Libé 2022
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