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Si nous lisons bien cette définition, nos enfants ne seront autonomes qu’à partir du moment où ils n’auront plus de comptes à nous rendre. Cela nous laisse quelques années devant nous! Mais ce que nous appelons «désir d’autonomie» est en fait un désir d’indépendance: manger, s’habiller, courir où, quand et comme ils le souhaitent. Ce sont ces manifestations d’indépendance qui les mèneront à la réelle autonomie. Ils ne peuvent pas faire le sacrifice de ces mini-victoires dans la prise de leurs décisions s’ils veulent s’affirmer. Mais pas question pour autant de sacrifier notre tranquillité et abdiquer notre autorité pour leur permettre de se prendre en charge… dans quelques années.
Sylvie a bien du mal à maîtriser sa petite Marie et à garder la maîtrise de… la télécommande: «Depuis quinze jours, Marie monopolise la télécommande, elle regarde ses dessins animés en boucle dès 7 heures le matin. Si j’éteins, elle se met à hurler et les voisins se plaignent.»
«Si notre enfant déclarait: “Je reste devant la télé jusqu’à 23 heures, sinon je hurle”, nous ne répondrions pas: “D’accord, tout plutôt que de déranger les voisins!” Il y a des seuils que nous ne voulons pas franchir. Il y a un moment où nous nous sentons obligés, donc capables, de dire non. Pourquoi 7 heures nous paraît-il tolérable et plus 23 heures? L’enfant cherche en permanence à gagner en indépendance, pour cela, il tente de prendre le pouvoir! C’est fondamentalement cela la prise d’autonomie. Cette petite fille se sert de la télécommande pour se mesurer au pouvoir maternel. Allons-nous laisser un tyran de 3 ans décider de l’organisation familiale?», nous interroge Anne Bacus.
Bien sûr que non, assure Cécile qui ne souhaite pas pour autant affronter la situation frontalement et préfère la «feinte»: «Je ne couche jamais Margot sans lui demander si elle en a envie. Elle a l’impression que c’est elle qui décide. Si je lui demandais: “Tu as sommeil?”, elle répondrait: “non!” Mais elle dit oui à notre cérémonial: d’abord un câlin, une histoire, choisir les peluches qui vont dormir avec elle…»
Mais est-ce vraiment une feinte ou une bonne stratégie éducative? «C’est très important de donner la possibilité de choisir à l’enfant, soit parce que nous savons que son choix va rejoindre notre souhait, soit parce que son choix n’a pas grande importance: “Tu préfères mettre ton pyjama rouge ou ton pyjama bleu?” Alors que si nous disons: “Au lit!”, sa réponse risque d’être “non”, car c’est la seule prise de position que nous lui permettons!», fait remarquer Anne Bacus.
Ce n’est pas parce que nous sommes de mauvais parents, manquant d’autorité, que notre enfant installe sans cesse de nouveaux rapports de force, c’est tout simplement sa façon d’apprendre jusqu’où il peut aller. Il pousse le bouchon de plus en plus loin, pour savoir: «Est-ce que j’ai le droit de faire ça?», «A quel moment, maman va-t-elle dire: Stop, c’est là que ton pouvoir s’arrête?» Lorsque nous allons le lui faire savoir, il va protester violemment, c’est sûr… et même nous assener un: «Maman pas beau!» ou un «J’t’aime pas», qui nous fendra le cœur, mais auquel nous répondrons: «Moi, je t’aime encore!»
Peut-être y a-t-il moyen de limiter, là aussi, ces démonstrations de frustration? Cécile, très préoccupée de gérer au mieux les dangers de la rue, a trouvé son mode opératoire: «Margot n’aime pas me donner la main, je ne l’exige pas. J’habite dans un endroit où les trottoirs sont larges et je me place toujours entre elle et la chaussée. Je lui apprends le petit bonhomme vert, le petit bonhomme rouge. Et cela marche, elle dit: “l’est pas vert!” quand nous attendons pour traverser.»
«Il faut toujours accompagner l’interdit “danger” d’un apprentissage», approuve Anne Bacus. «Si c’est l’interdit total, le jour où nous laisserons notre enfant seul, il ira sans doute les chercher: l’interdit suscite la transgression. Il est préférable de lui dire: “Tu as le droit de jouer avec les allumettes, mais au-dessus de l’évier et uniquement quand je suis là.” Il n’aura pas le sentiment de braver notre autorité et il aura appris à manier les allumettes.»
Nahema, qui a pris un congé parental pour s’occuper de Tom, voudrait bien qu’il ait l’autonomie «infuse»: «Je l’ai inscrit en halte-garderie parce que je redoute que l’entrée en maternelle soit un choc. J’ai fait plusieurs jours d’adaptation. Le jour où je l’ai laissé pour de bon, il s’est accroché à mon pantalon en pleurant. Je suis partie, j’ai fait le tour du bâtiment pour regarder par la fenêtre comment ça se passait… il hurlait. Je suis retournée le chercher, j’appréhende déjà, huit mois à l’avance, septembre prochain!»
Il se peut qu’un enfant vive mal la maternelle, comme il a mal vécu la halte-garderie, parce qu’il n’y est pas le centre du monde. Chez ses parents, chez sa nourrice, sa mamie… il a toujours été le petit roi. Dans une collectivité d’enfants, il lui faut trouver d’autres façons de s’affirmer que celles utilisées auprès des adultes, d’autres façons d’exprimer ses besoins, d’être reconnu et ce n’est pas simple. Il va tomber sur un os. Il était tellement entouré et le voilà démuni, sans notre protection. Il joue avec un jeu, on lui prend… il pleure.
«C’est en étant confronté au “no maman land” qu’il apprendra, qu’il mettra en place ses mécanismes de défense, saura s’affirmer… dire non au-dehors (et là, on peut se projeter à l’adolescence, où il est vraiment primordial de savoir dire non!). C’est en vivant que l’on apprend à vivre», conclut Anne Bacus.
Isabelle Gravillon
© Enfant.com
Yves est bouleversé par l’autonomie de Clara: «Elle a 2 ans. Elle est partie en vacances chez ses grands-parents dans la joie et bonne humeur. Elle n’a pas versé une larme. Ma femme a été un peu peinée qu’elle nous quitte avec autant de plaisir.»
«L’autonomie affective est la plus fondamentale de toutes les prises d’indépendance de l’enfant, car elle est le support même de l’autonomie dans son entier. Il y a celui pour qui rester derrière la porte des toilettes est une séparation insoutenable et celui qui s’en va comme Clara, en disant: “Tchao, bye-bye.” Le fait qu’il parte facilement ne veut pas dire qu’il ne nous aime pas. Ils sont tristes eux aussi d’être éloignés de nous, mais ils nous ont mis dans leur cœur! Papa et maman sont mis “au-dedans”, alors ils n’ont pas besoin d’être en permanence “au-dehors”, à côté d’eux», rassure Anne Bacus.
1. Dans les petites prises de position quotidiennes: il est bon qu’il sente qu’il a une marge de décision par rapport à notre autorité. Jouons la monnaie d’échange.: «Le soir, c’est toi qui décides si tu t’amuses ou si tu dors dans ta chambre, mais c’est moi qui décide qui peut toucher à la télécommande.»
2. Face à un «interdit danger» qu’il transgresse: dans ce type de situation, nous ressentons de la peur: il faut le lui dire… car nous exprimons souvent de la colère. Il y a confusion de sentiments. Il ne comprend pas pourquoi nous sommes en colère, il n’a aucune notion du danger: il a couru et s’est bien amusé… rien d’autre!
3. S’il joue les «fiers-à-bras»: il faut le freiner, c’est le cas de la rue à traverser… A d’autres moments, il faut l’accompagner dans son autonomie et en profiter pour l’éduquer: «Tu veux apprendre cela, d’accord, apprenons-le ensemble.»
4. S’il se laisse vivre: n’a pas envie de manger seul, d’être propre… il faut s’interroger sur son comportement, mais aussi sur le nôtre: «Est-ce sa place au milieu des frères et sœurs qui provoque ces attitudes?», «Est-ce ma relation avec lui qui fait qu’il n’a pas envie de grandir?»… Si nous trouvons la réponse, il faut faire en sorte que les choses changent. Ensuite, il faut présenter les nouvelles acquisitions comme un progrès: «Tu grandis et tu gagnes quelque chose»… pas comme une punition: «Maintenant ce n’est plus maman qui te lave!»
5. Pour le préparer à «affronter» les autres: plutôt que de lui expliquer comment se «battre», il est préférable de lui donner confiance en lui. A 2 ans et demi, ce n’est pas un drame s’il ne sait pas mettre ses chaussons… mais six mois plus tard, c’est un handicap, parce qu’il y a des échéances sociales: la maternelle est la première d’entre elles. Nous ne pouvons écarter tous les mauvais moments sur le chemin de notre enfant. Heureusement, parce que l’autonomie, c’est aussi le laisser prendre des risques.
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