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Désaffection des élèves pour les matières scientifiques : A qui la … – La Presse de Tunisie

Les défis qui se dressent devant notre système d’enseignement sont tellement nombreux qu’il est difficile de les relever. Les difficultés, qui en découlent, s’accumulent et rendent la tâche, toujours, plus difficile. Les ingérences inacceptables des structures syndicales dans les divers processus de restructuration rendent toute solution impossible. C’est cet inquiétant diagnostic qui peut être dressé et qui ne laisse entrevoir aucune issue possible à cette situation enchevêtrée, voire absurde. Notre école ne peut plus rester l’otage d’intérêts étroits liés à des calculs politiques, idéologiques ou corporatistes. Il est temps de mettre fin à ce jeu auquel se livrent certaines parties pour mettre la main sur un secteur vital et hautement stratégique, à savoir l’enseignement et l’éducation.
L’enjeu est, donc, clair. Les convoitises sont nombreuses, et nombreux sont ceux qui cherchent à s’infiltrer dans les rouages des centres de décisions. Les étapes d’évaluation, comme le bac, permettent aux uns et aux autres de marquer une pause et de mieux comprendre la situation. C’est, justement, au cours de cette édition du bac 2022 qu’il a été constaté que des carences sont de plus en plus visibles et, par conséquent, de plus en plus alarmantes.
Il ne s’agit plus de la baisse continue du niveau de nos élèves ou de celui de notre enseignement ou de nos enseignants, mais, surtout, de la désaffection des filières porteuses par les lycéens. Il est vrai que le phénomène n’est pas nouveau. Le constat en a été fait depuis plusieurs années. Toutefois, la dangerosité vient du fait qu’il s’aggrave au fil des années. Concernant les filières scientifiques (sciences expérimentales et mathématiques), les statistiques sont catastrophiques. Le ministre de l’Education l’a bien noté. Les sections maths et sciences expérimentales ne représentent que 6% des effectifs des lycéens qui se sont présentés à l’examen du bac. L’année précédente, ils étaient 7%. Et l’on pense que la courbe ne s’arrêtera pas là. Par contre, d’autres filières, comme les lettres, l’économie-gestion totalisent environ 54% des effectifs des candidats au bac.  L’explication de ce phénomène n’est pas simple, puisqu’elle est multidimensionnelle. Le ministre de l’Education en a évoqué, en effet, quelques-unes. Il y aurait, selon lui, la difficulté que rencontrent les élèves à suivre l’enseignement des matières scientifiques, ainsi que les méthodes utilisées par les enseignants. Il y a, également, la question de la langue d’enseignement.
Ces grandes lignes ne permettent que de donner un bref aperçu sur le vécu quotidien de nos élèves dès les premières années d’école. L’absence complète d’étapes d’évaluation des acquis des élèves durant les 13 ans de scolarité (sauf au bac) peut être considérée comme une raison majeure de la baisse de qualité de l’enseignement dispensé dans nos établissements.
En outre, le recrutement massif de milliers de diplômés sans aucune préparation, ni formation pédagogique et scientifique adéquate constitue une autre raison essentielle de la faillite du système dans son ensemble. Sous la pression insoutenable des syndicats, notre école s’est transformée en un lieu pour embaucher ceux qui sont à la recherche d’un gagne-pain sans le moindre souci pour les retombées catastrophiques qu’il pourrait entraîner. Malheureusement, ce travail de sape continue et risque même de s’amplifier.  Les syndicats en question cherchent avant tout à satisfaire les diplômés chômeurs sans avoir le moindre égard aux dangers que représentent ces recrutements inappropriés.
Un autre facteur non moins important reste à signaler. C’est celui des langues utilisées dans l’enseignement. A plusieurs reprises, nous avons relevé ce dysfonctionnement qui caractérise notre système éducatif. L’utilisation de deux langues pour enseigner les mathématiques ou les matières scientifiques est à l’origine de la crise de l’apprentissage.
Quand un élève passe 9 ans de sa vie à étudier les maths ou les sciences en arabe, puis on lui propose de tout effacer et de reprendre le tout en français, c’est, tout simplement, aberrant et absurde. L’introduction de la langue arabe ou la politique de l’arabisation s’est imposée à nous dans un contexte qui n’a rien à voir avec la formation de nos générations futures. La polémique stérile engagée autour de notre identité soi-disant arabo-musulmane n’est rien par rapport à l’avenir de notre pays. C’est une question secondaire. L’arabe, dont on nous parle, n’est utilisé par personne. On apprend à un élève tunisien la grammaire et les règles d’une langue qu’il n’utilise pas dans sa vie de tous les jours. Même les autres pays, qui se disent arabes, ne comprennent pas les dialectes parlés dans les autres pays “frères”.
Bref, l’arabe peut continuer à garder son statut officiel sans pour autant constituer un obstacle insurmontable devant les apprentissages. D’ailleurs, la terminologie utilisée est d’une bizarrerie inouïe pour nos élèves (maths, sciences).
Quant au recours à la langue française pour enseigner ces matières, il est tout à fait logique, d’autant plus que cela se poursuivra dans le secondaire et dans le supérieur. Pourquoi, alors, cette perturbation de l’esprit de nos élèves.
Il n’y a aucun complexe à se faire à ce propos. Car, comme l’a souligné le ministre de l’Education, l’élève éprouve des difficultés pour comprendre un sujet au bac. La raison en incombe entre autres à la maîtrise de la langue. Pas uniquement la langue française, mais aussi l’arabe.
L’autre aspect qui pourrait expliquer cette inquiétante désaffection des filières scientifiques par nos élèves est celui qui est en lien avec les méthodes d’apprentissage et la compétence de nos enseignants. Sur ce point, le ministre de l’Education a affirmé, dans une de ses dernières déclarations, qu’il existe des défaillances. La façon avec laquelle certains enseignants de maths donnent des cours est rebutante.
Nous pensons, pour notre part, qu’aucun effort n’est fait pour motiver les élèves ou leur faire comprendre les objectifs de l’apprentissage des maths. On est, même sûr, que la plupart de nos enseignants de maths n’en savent rien ou n’en ont cure. Ces enseignants ont d’autres chats à fouetter.
Les cours particuliers sont devenus, ces dernières années, un fléau national. Tous nos enfants n’arrivent plus à acquérir les connaissances ou les compétences requises en se contentant, uniquement, des leçons dispensées en classe. De façon délibérée ou non, ces leçons accusent des lacunes flagrantes d’où la nécessité de les combler par ces cours d’appoint devenus de plus en plus indispensables. Et ne voilà-t-il pas que la machine des cours particuliers est mise en branle.
Aujourd’hui, ce phénomène est d’une gravité telle qu’il requiert des mesures plus qu’urgentes. Depuis des années, des ministres de l’Education avaient annoncé de telles mesures sans pour autant qu’il y ait rien de concret sur le terrain. L’impact de ces cours sur le rendement des enseignants ne peut être que négatif, puisque ces derniers vont consacrer le plus clair de leur temps à cet enseignement parallèle au lieu de s’investir dans leur noble mission. Du coup, ce sont les élèves qui ont la possibilité de s’inscrire à ces cours qui auront le plus de chance de réussir, tandis que les autres seront dégoûtés de ces matières, en raison des difficultés à en suivre les démonstrations et les abstractions. Aussi, trouve-t-on des professeurs de maths ou de physique-chimie en première ligne dans cette course effrénée aux cours particuliers. A tel point que cette occupation empiète, dangereusement, sur leur véritable mission. Certains de ces enseignants affichent complet pour la prochaine année scolaire. Ils sont parvenus à constituer des groupes d’élèves à qui ils vont assurer des séances payantes pouvant représenter plusieurs fois le salaire de l’enseignant.
Sans rejeter, totalement, ces pratiques que certains parents recherchent, il serait légitime de revendiquer du professeur de maths, de physique-chimie ou d’autres matières de remplir pleinement sa mission et d’accorder la priorité absolue à la classe. Un suivi méthodique de la part des inspecteurs est vivement souhaité. De même qu’une invitation sincère aux syndicats de mettre la main à la pâte pour protéger la qualité de l’enseignement dispensé dans nos établissements.
Equipe Rédaction, La Presse de Tunisie
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