La production de crédit immobilier s'est établie à 21,8 milliards d'euros en juillet, contre 22,6 milliards en juin. La tendance est au ralentissement mais le niveau reste élevé. Les taux, eux, continuent leur progression, à 1,45 %.
Par Gabriel Nedelec
Les chiffres du crédit immobilier sont scrutés comme le lait sur le feu. Et ceux que la Banque de France (BDF) a publié mercredi ne donnent pas raison aux professionnels qui clament que le marché est à l'arrêt . Ils laissent cependant transparaître un début de « normalisation », reconnaît l'institution.
En juillet, l'encours des crédits a en effet progressé de 6,4 %. Un léger moins bien par rapport à juin (+6,6 %), mais ce qui reste un « niveau élevé » souligne l'institution. La production s'est pour sa part établie à 21,8 milliards d'euros, après 22,6 milliards en juin. « Cette production se rapproche de la moyenne sur cinq ans (20,3 milliards), reflétant le processus de normalisation en cours », souligne la Banque de France dans son communiqué.
Crédit immobilier : les taux poursuivent leur hausse inexorable
Cette normalisation s'explique notamment par la hausse progressive des taux, après une période de près de deux ans de taux extraordinairement bas. Les taux d'intérêt moyens enregistrés par la BDF ont atteint 1,45 % en juillet, après 1,35 % en juin. Cela reste des niveaux historiquement bas : la moyenne des quinze dernières années s'établit à 2,7 %.
Surtout, cela reste encore très loin de la pomme de discorde du secteur : le taux d'usure . Ce seuil, qui détermine le taux maximum auquel une banque peut prêter, fait l'objet d'un combat acharné de la part des professionnels du crédit, en particulier les courtiers. Selon ces derniers, la lenteur de sa progression, du fait de sa méthode de calcul, serait un vrai frein au marché du crédit dont les taux doivent rester en dessous. La production de crédit pourrait donc se retrouver à court terme bloquée par ce plafond.
Le sujet a pris de l'ampleur ces derniers jours, après que Bruno Le Maire, le ministre de l'Economie, a rappelé que l'accès des ménages à la propriété est un « impératif » du gouvernement. Bercy demande d'ailleurs aux banques de ralentir la hausse des taux auxquels elles prêtent – et donc de rogner leurs marges – afin que les prêts ne soient pas bloqués par le taux d'usure.
Crédit immobilier : Bercy met la pression sur les banques
Mais pour François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France, les chiffres ne reflètent pas une telle thèse. « Certains courtiers qui réclament ce relèvement de taux de l'usure avancent un taux d'éviction (des refus de crédit de la part des banques, NDLR) de plus de 40 % du crédit immobilier. Ces chiffres sont peu crédibles, balaye-t-il dans une interview publiée par « Ouest-France » mercredi soir. D'ailleurs, aucune association représentant les emprunteurs et les familles n'a demandé le relèvement du taux d'usure. Nous sommes là aussi pour défendre l'intérêt des ménages et des emprunteurs. »
Selon lui, ceux qui « réclament un relèvement supplémentaire du taux d'usure sont ceux qui veulent pouvoir prêter plus cher aux Français ». D'ailleurs, l'institution n'observe pas de sortie du marché des primo-accédants – des ménages souvent moins aisés -, ni des ménages modestes. « Nous restons néanmoins attentifs et si cela changeait, nous n'hésiterions pas à réagir », assure le gouverneur.
Crédit immobilier : pourquoi la hausse des taux s'opère progressivement
Reste que les signes de ralentissement sont indéniables. En mai, la production de crédit était de 26,8 milliards d'euros. Or, les prévisions de la Banque de France pour le mois d'août affichent une production à nouveau plus faible (20,6 milliards), et des taux encore en hausse (1,57 %). « C'est le chiffre de mai qui était exceptionnel ! Pour une raison assez logique, c'est que les Français attendaient une hausse des taux de crédit immobilier, et ils ont accéléré leurs projets », poursuit le gouverneur dans les colonnes de « Ouest-France ».
Gabriel Nedelec
Pratique
Services
Le Groupe
Tous droits réservés – Les Echos 2023