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Consentement : la littérature jeunesse brise les tabous – La Vie

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Face à la curiosité d’un petit, comment lui expliquer qu’il doit respecter l’intégrité de l’autre ? Comment lui apprendre, aussi, à dire « non » face à un geste déplacé ? Un apprentissage en douceur auquel s'attellent plusieurs albums jeunesse.     • GETTY IMAGES/ISTOCK
Trois ans. L’âge de la première rentrée à l’école, des premiers dessins tout seul, et des premières amitiés dans le bac à sable. L’âge de la propreté aussi, où l’enfant ne s’intéresse plus seulement aux couleurs, aux textures mais à son anatomie et à celle des autres. Les instituteurs connaissent bien cette crise diplomatique, typique de la maternelle, quand un petit garçon soulève la jupe d’une petite fille pour voir ce qui se trouve en dessous.
« Entre trois et six ans, les enfants ne font pas vraiment de distinction entre certains éléments du corps comme la couleur de peau et les parties intimes, explique Auréa Liaudet, psychologue à l’Enfant bleu, une association dédiée à la protection de l’enfance. Ils comprennent qu’ils ont des émotions et des sensations, mais ils ne savent pas encore structurer leur pensée. En fait, les enfants veulent voir le corps de leurs copains parce qu’ils se posent des questions sur leur propre corps. »
Face à la curiosité d’un petit, comment lui expliquer qu’il doit respecter l’intégrité de l’autre ? Comment lui apprendre, aussi, à exprimer son accord ou son désaccord, à dire « non » face à un geste déplacé ? Dans les maisons d’édition francophones, plusieurs albums jeunesse permettent aux parents et aux professionnels de l’enfance d’entamer cet apprentissage en douceur.
« Notre époque est toujours réticente à parler du consentement et de l’intimité avec les enfants, constate Florence Dutruc-Rosset, auteure de plusieurs œuvres sur cette thématique pour Bayard Jeunesse. Autrefois, il était tabou de parler de la mort et de la guerre aux petits, mais les albums jeunesse ont beaucoup évolué sur ces sujets. Ce n’est pas encore le cas pour parler du corps et l’intimité, alors que ça concerne les familles au quotidien. »
Dans les librairies, le petit livre pour enfants J’aime mon corps (1), publié par Bayard en avril 2021, réalise ainsi des ventes bien modestes (3 000 unités vendues en septembre 2022), au regard du message très fort qu’il véhicule. « J’aime mes bras, mes mains… » jusqu’à « mon sexe », « J’essaie de protéger mon corps (…) des blessures, des bobos », « Mon corps est à moi »… L’album cartonné, tout rose et illustré par un personnage de petite fille, permet d’aborder le consentement dès l’âge de 2 ans, dans un vocabulaire à la simplicité déconcertante.
À l’origine, le projet s’adressait à des communautés d’enfants marginalisés aux Philippines, et a été conçu dans la maison d’édition philippine Power in Her Story, avant d’être réédité en France par Bayard jeunesse. « Ce qui est fou avec cet album, c’est qu’il peut s’adresser à des petits dans toutes les situations sociales parce que son message est universel, défend Agnès Lechat, responsable éditoriale de l’album. Les ventes ne sont pas phénoménales, mais ce genre de livre se situe en dehors de nos circuits traditionnels. Il a une forte valeur symbolique, et il vise surtout à être un livre de référence dans les crèches ou les écoles pour aborder le consentement. »
L’objectif des éditeurs sur ce type d’albums est de publier des livres « de fonds », à la valeur intemporelle, au-delà du succès en librairie. Il faut aussi rappeler que dans l’édition jeunesse, le fait d’éditer un album prend environ un an, et ne peut pas s’accorder au tempo médiatique. En janvier 2021, la juriste Camille Kouchner publie ainsi la Familia grande (Seuil), un récit autobiographique qui dénonce des violences sexuelles commises au sein de sa famille durant son enfance. Ce récit, destiné aux adultes, s’attaque au tabou de l’inceste, et entraîne un vaste mouvement de libération de la parole dans les médias et sur les réseaux sociaux.
L’opinion publique prend alors conscience d’une réalité sidérante : à l’école, en moyenne, deux enfants par classe seraient victimes d’inceste. Alors que certains éditeurs jeunesse ont déjà beaucoup travaillé sur ce sujet de société, d’autres doivent encore baliser le terrain. Cette fois, il ne s’agit pas seulement d’expliquer aux enfants comment dire « non » à un camarade de classe un peu trop embêtant. Il s’agit de creuser sans tabou le vaste champ du consentement, et d’oser faire de la prévention sur les violences sexuelles.
« Après la parution de la Familia grande, notre maison a commencé à recevoir de nombreuses propositions de documentaires pour enfants sur la question, se souvient Marie Bluteau, éditrice à La Martinière Jeunesse. Mais, je ne me sentais pas de faire un ouvrage de commande, pour répondre à l’urgence de l’actualité. Ce genre de projet est très fort, je pense même que c’est viscéral. Il faut le sentir et faire une rencontre qui va de soi, qu’on ne force pas. »
À l’époque, Marie Bluteau choisit alors d’accompagner le projet de Mai Lan, une artiste habituellement connue dans le monde de la chanson pop. Dans le Loup (6), la jeune femme raconte, sous la forme d’une fiction pour les enfants de 4 ans, l’histoire d’une petite fille inspirée de sa propre enfance. Miette vit dans une maison joyeuse, colorée, mais un homme rôde, parfois sous la forme d’un loup. « Son œil devient perçant, et discrètement, à pas de loups, il vient embêter Miette », écrit l’auteure. « Forcément, j’ai été frappée par un tel texte, décrit Marie Bluteau. Pour moi, Mai Lan sait prendre les enfants par la main, elle leur parle d’un sujet très grave avec une délicatesse infinie. » L’artiste réalise elle-même les illustrations de l’album, et choisit la douceur du dessin à l’aquarelle.
Dans la littérature jeunesse, plusieurs auteurs ont saisi le pouvoir de la fiction et du conte pour aborder le consentement dans ses aspects les plus tabous. Avec la Princesse sans bouche (3), éditée par Bayard en novembre 2020, Florence Dutruc-Rosset réinterprète les mythes littéraires de Peau d’Âne et de Blanche Neige. C’est l’histoire d’une petite princesse, qui vit dans un royaume où le malheur plane, où un roi aigri (son père) a de « terribles pensées » dans la tête. Un soir, ce papa entre dans la chambre de sa fille : « Il la toucha comme aucun papa n’a le droit de le faire, d’une manière qui ne la respectait pas. » La petite princesse perd alors sa joie, sa voix, avant de réussir à exprimer sa douleur et entamer son chemin de résilience.
Réalisatrice de plusieurs livrets de prévention sur les violences sexuelles chez Bayard, Florence Dutruc-Rosset a travaillé son écriture pour aborder la question. « J’ai essayé d’écrire avec des termes qui parlaient aux enfants comme le mot respect par exemple, relate-t-elle. J’ai écrit, réécrit avant d’aboutir à ce texte… Forcément sur un tel sujet, on redoute la façon dont le livre va être réceptionné, alors que c’est essentiel d’en parler. »
Le conte permet ainsi de convoquer toute une mythologie très utile pour échanger avec les enfants sur la notion de violence, et mieux les armer. Dans l’album Petit Doux n’a pas peur (4), destiné aux 4 ans et plus, le personnage de Petit Doux est un nounours, une figure bien connue de la littérature jeunesse.
Un loup joue avec Petit Doux, et devient de plus en plus embêtant, jusqu’à faire du mal à son ami : ce loup représente aussi bien le compagnon de jeu étouffant que l’adulte agresseur. « Dans les contes pour enfants, le loup peut être à la fois un personnage sympathique et un véritable prédateur, analyse la psychologue Auréa Liaudet. C’est sans doute pour cela que plusieurs albums jeunesse représentent l’agresseur sous la forme d’un loup. Les personnes qui commettent des violences sont souvent des gens proches des enfants. Ils ont cette perversion d’être à la fois tendres et violents. »
Face à la dureté du sujet, y a-t-il un risque de traumatiser les petits et de faire germer dans leur tête l’idée que tous les adultes peuvent être des agresseurs ? Conscientes de cette crainte, les maisons d’édition jeunesse ne publient jamais une fiction sur les violences sexuelles sans introduire dans l’album une partie documentaire sur ce qui est « permis » et ce qui est « interdit ». Elle oriente aussi les enfants, les parents et les éducateurs vers des personnes-ressources, à contacter en cas de doute.
« Pour le Loup, nous avons mis un macaron sur la couverture qui signale le sujet de l’inceste, avant tout achat en librairie, explique Marie Bluteau. L’auteure de l’album, Mai Lan, a réalisé des vidéos de sensibilisation au sujet, et il y a un site internet dédié. Ce qui est intéressant, c’est que ce genre de livre crée tout un écosystème qui vit après la parution. »
Les albums le Loup et la Princesse sans bouche (7) ont ainsi été relus et validés par des psychologues, membres d’une unité médico-judiciaire et d’une association de protection de l’enfance. La double page documentaire est essentielle, mais les éditeurs le savent : elle est bien plus dure à écrire que le récit de fiction, car elle s’adresse à des parents souvent mal à l’aise avec le sujet.
Face aux craintes parentales, la psychologue Auréa Liaudet rassure : « Je pense que c’est important de parler du consentement aux petits dès l’âge de 2 ou 3 ans, estime-t-elle. Ça ne veut pas dire que les parents doivent aborder des notions de sexualité tout de suite. Il faut utiliser ce champ des possibles du consentement. Si on présente à un petit un livre sur une dispute un peu violente et que ça le fait beaucoup réagir, qu’il pose des questions, alors on peut dérouler le fil avec d’autres livres au ton plus grave, très progressivement. »
Pour dédramatiser, la psychologue recommande également aux parents de ne pas craindre de répondre « Je ne sais pas » lorsque l’enfant pose une question difficile. Les parents peuvent alors se tourner vers des médiateurs comme un psychologue, un médecin ou un éducateur, pour chercher les réponses aux interrogations que les livres suscitent chez les enfants.
De même, « il ne faut pas oublier que les petits n’ont pas nos complexes d’adultes sur la sexualité, rappelle Florence Dutruc-Rosset. Ils parlent de tout, ils n’ont aucun tabou. Ce sont plutôt les adultes qui les créent ! » Début 2022, l’auteure de la Princesse sans bouche est passée dans plusieurs classes d’école d’enfants de 5 à 6 ans pour présenter son livre. « Il y a eu une sorte de prise de parole collective et thérapeutique, se remémore Florence Dutruc-Rosset. Plusieurs élèves se sont mis à raconter des histoires de famille, parfois difficiles. À la fin de mon intervention, une petite fille est venue me voir. Avec ses mots à elle, elle m’a dit : “Merci madame, c’est important de dire les choses aux enfants ! “ »
Quelques livres pour aborder le consentement, pour les enfants de 3 à 6 ans
À partir de 3 ans :

(1) J’aime mon corps, de Nikki Luna et Julienne Davidas, Bayard Jeunesse, 90 €.
(2) Respecte mon corps, de Catherine Dolto et Colline Faure-Poirée, Gallimard Jeunesse, 6, 50 €.
(3) Et si on se parlait ?, d’Andréa Bescond et Mathieu Tucker, Harper Collins, 7, 50 €.
À partir de 4 ans :
(4) Petit Doux n’a pas peur, de Marie Wabbes, éd. La Martinière Jeunesse, 13, 90 €
(5) Zizis et zézettes, de Camille Laurans et Jess Pauwels, éd. Milan, 7, 90 €
À partir de 5 ans :
(6) Le Loup, de Mai Lan Chapiron et Coralie Dière, éd. La Martinière Jeunesse, 9, 90 €.
(7) La Princesse sans bouche (3), de Florence Dutruc-Rosset et Julie Rouvière, éd. Bayard Jeunesse, 13, 90 €.
À paraître en octobre 2022 : le Secret de Soro, de Charline Le Maguet, Bayard Jeunesse, 12, 90 €.
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