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Par : Paula Andrés | EURACTIV.com | translated by Anna Martino
02-02-2023
Concrètement, lorsqu’un agriculteur ne respecte pas une ou plusieurs exigences de cette législation européenne, les autorités nationales peuvent décider de réduire, voire supprimer dans les cas les plus graves, les subventions de la PAC.
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Cette année, certains États membres commenceront pour la première fois à lier les subventions agricoles de l’UE aux normes sociales et du travail, les autres États devraient suivre le mouvement en 2025. Cependant, l’absence d’un système de sanction harmonisé suscite des interrogations.
Le début de la période de financement 2023-2027 de la Politique agricole commune (PAC) s’accompagne de nouveaux critères liant les subventions au respect de normes sociales et de travail minimales, afin d’encourager la mise en place de bonnes conditions de travail dans les exploitations.
Concrètement, lorsqu’un agriculteur ne respecte pas une ou plusieurs exigences de cette législation européenne, les autorités nationales peuvent décider de réduire, voire supprimer dans les cas les plus graves, les subventions de la PAC qui lui sont accordées.
Cette « conditionnalité sociale », actuellement facultative, deviendra obligatoire pour tous les États membres de l’UE à partir de 2025. La France, l’Italie et l’Autriche ont volontairement choisi d’introduire cette mesure dès 2023.
Toutefois, le niveau des sanctions imposées est décidé au niveau national et jugé « très faible » et « inacceptable » par certaines parties prenantes, qui appellent la Commission européenne à parvenir à un système de sanction coordonné et harmonisé à travers l’Union.
« La conditionnalité sociale peut contribuer à améliorer les normes de travail dans l’un des secteurs les plus précaires de l’économie. Proposer des niveaux de sanction ridicules peut sérieusement compromettre son grand potentiel », estime la Fédération européenne des syndicats des secteurs de l’alimentation, de l’agriculture et du tourisme (EFFAT).
Pour l’EFFAT, le pilier social de la PAC peut « changer la donne », mais pour l’instant, il « manque de pragmatisme » et d’une « plus grande harmonisation » entre les États membres.
Interrogé à ce sujet par EURACTIV, un fonctionnaire de l’UE a cependant souligné que « la conditionnalité sociale ne vise pas à modifier la législation sociale européenne existante, y compris la manière dont elle est mise en œuvre par les États membres dans l’esprit des responsabilités partagées ».
Cela peut donc « conduire à un certain degré d’hétérogénéité du traitement des agriculteurs dans l’UE […], ce qui se reflétera également dans la mise en œuvre de la conditionnalité sociale », a ajouté le fonctionnaire.
Néanmoins, la Commission examinera l’impact de la conditionnalité sociale sur les conditions des travailleurs dans un rapport public en 2027.
Les membres de la commission de l’Agriculture du Parlement européen (AGRI) ont appelé à une action concertée pour améliorer la santé mentale des agriculteurs de l’Union européenne alors que les pressions s’intensifient sur un secteur déjà mis à rude épreuve.
Avec plus de 10 millions de personnes employées dans l’agriculture européenne, principalement en tant que travailleurs saisonniers, journaliers ou dans d’autres statuts précaires, pas moins de 61,2 % des travailleurs agricoles de l’UE exercent un emploi informel.
Malgré cela, la conditionnalité sociale s’est avérée être une question épineuse lors des dernières négociations sur la PAC entre les États membres de l’UE et le Parlement européen. Et elle continue à l’être.
L’eurodéputé libéral Jérémy Decerle a déclaré que, bien qu’il s’agisse d’une belle réussite pour la défense des droits sociaux, « ce type de modèle de conditionnalité n’a de sens que dans la mesure où il n’ouvre pas la porte à davantage de distorsions entre les États membres ».
Une application « disparate » et « inégale » des sanctions n’aura de sens que « si la convergence sociale cesse d’être une priorité de l’UE », a-t-il ajouté.
Par exemple, l’application des sanctions et la fréquence des inspections sont des compétences nationales et relèvent donc des Etats membres.
Selon l’eurodéputé socialiste Paolo De Castro, qui est en faveur de la conditionnalité sociale, l’harmonisation européenne « doit être un processus progressif ».
« Au cours du trilogue, nous avons réalisé qu’en raison des conditions différentes dans les différents États membres, ce n’était pas faisable », a-t-il poursuivi, « ceci est donc le meilleur résultat que nous pouvions obtenir ».
M. De Castro espère que « lors de l’éventuelle révision de la PAC actuelle, nous parviendrons à introduire ces points ».
Le mal-être chez les agriculteurs était à l’ordre du jour d’une table ronde ce mercredi 15 juin, organisée par plusieurs acteurs du monde agricole.
Les États membres de l’UE devront créer leur propre cadre national sur la manière de mettre en œuvre la conditionnalité sociale — sanctions, contrôles et niveaux de vigilance.
Dans le cas de la France, l’un des pionniers, les règles de sanction des infractions seront bientôt transposées dans le droit national.
Toutefois, « certaines des ambitions initialement envisagées se sont heurtées à des difficultés de mise en œuvre », a déclaré Joseph Lechner, président du Groupe des employeurs des organisations professionnelles agricoles de l’UE (GEOPA-COPA) et membre de la commission Emploi de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA).
« Par exemple, la conditionnalité sociale en France sera mise en œuvre avec un décalage temporel entre le contrôle et la réduction des aides (par exemple, un contrôle en 2024 pourrait conduire à une réduction des aides de la PAC versées en 2025 ou 2026) », a expliqué M. Lechner.
En outre, il a souligné que la FNSEA a signalé aux autorités françaises que certaines sanctions sont « disproportionnées » et s’ajouteraient aux amendes déjà prévues par le Code du travail français.
M. Lechner a rappelé que la mise en œuvre volontaire par des pays comme la France nécessitera « accompagnement, souplesse et pédagogie » et que « les pouvoirs publics devront veiller à ce que les nouveaux contrôles n’entraînent pas une augmentation de la charge administrative pour les agriculteurs ».
Selon lui, la poursuite du dialogue, l’évaluation et les améliorations main dans la main avec les partenaires sociaux sont encore nécessaires pour « se diriger vers une plus grande harmonisation et une application équitable du mécanisme à travers l’UE ».
[Édité par Anne-Sophie Gayet]
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