Calculer ses coûts de revient relève d'une gymnastique mathématique assez simple. Mais trop de gens ne vont pas au bout de cette démarche. Résultat, un prix de vente inadéquat.
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“Calculer ses coûts de revient nécessite de décortiquer tout le processus qui a abouti à la prestation”, résume la coach Carine Dognin. A priori, il s’agit d’un exercice comptable “bête et méchant”. Il suffit de lister toutes les dépenses effectuées pour vendre son produit et son service. Pourtant, nombre de solos ne suivent pas la démarche dans son intégralité, par manque de méthode. “Par exemple, pour de la vente de produits, ils se contentent de calculer leurs coûts de production (matières premières et main-d’oeuvre…), alors qu’il leur faudrait aussi prendre en compte les coûts commerciaux liés à la distribution du produit”, illustre Franck Brault, de Simon-Kucher & Partners. Mais les erreurs sont parfois encore plus grossières : ainsi on omet les temps dits “improductifs”, de type prospection téléphonique, déplacements, préparation des commandes, etc.
Une fois ces coûts déterminés, qu’en fait-on ? “Le principe de base est de ne jamais fixer un prix de vente qui leur soit inférieur, sinon cela signifie que l’on va perdre de l’argent, explique un expert du réseau d’expertise comptable CER France. Mais fixer son prix de vente avec ce seul paramètre est une erreur. Le coût de revient n’est qu’un élément parmi d’autres : il faut aussi tenir compte du positionnement stratégique, du prix de la concurrence…” Un subtil mélange, en somme. Carine Dognin implore les solos de sortir de leur logique de salariés : “Lorsque, après calcul de leurs coûts de revient, certains constatent qu’ils vont devoir vendre leur prestation au minimum à 40 euros de l’heure, ils ont du mal à accepter ce prix, qu’ils jugent énorme.” Ils ne raisonnent pas encore en entrepreneurs.
“Même le métier de consultant est plus capitalistique qu’on ne le croit, avertit Pascal Py, du cabinet d’efficacité commerciale ForVentOr. Le temps de démarcher le client, d’être reçu, de réaliser la mission, de facturer, d’encaisser, il s’écoule un minimum incompressible de six à douze mois.” Se lancer sans un pécule pour tenir, c’est l’échec assuré.
A chaque secteur sa logique. “J’ai conseillé à une jeune femme qui vend sur internet les tableaux de divers artistes de multiplier ses prix par trois, raconte Catherine Pompeï, auteur de “Consultants : trouvez vos premières missions” (éd. Dunod). Ses ventes ont décollé. Tout simplement parce que, sur le marché de l’art, le consommateur n’aime pas acheter à bas prix. Je vous donne cet exemple car il est très parlant, mais chaque secteur a sa logique et s’en détacher est risqué.”
Pour Frédéric Vendeuvre, d’Halifax Consulting, “sans partir dans des tarifs démentiels, si l’on propose vraiment une offre à valeur ajoutée susceptible à terme de faire gagner beaucoup d’argent à notre client, on a tout intérêt à gonfler son prix et à sortir de la logique “coûts de production + ma petite marge = mon prix de vente””. De toute façon, on a intérêt à alourdir un peu le prix de vente, ne serait-ce que pour se laisser une marge de négociation (surtout quand on ne sait pas défendre ses prix !). La suggestion de Franck Brault, chez Simon-Kucher & Partners : “Prenez le prix que vous trouvez raisonnable et ajoutez-y 10 ou 15 %.”
“Derrière la peur d’être trop cher, il y a souvent un manque de confiance en soi, évoque Carine Dognin. Et pour cause… Tant de livres ou de magazines assènent des conseils du type “apprenez à vous vendre”.Mais ce n’est pas soi-même que l’on vend lorsqu’on est solo, ce sont des compétences ou un produit ! Dissociez-vous de votre offre. Mettez-vous dans cette disposition mentale quand vous savez que vous allez aborder la question du prix. Alors, vous vivrez ce moment de manière beaucoup plus décomplexée.”
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