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Confrontées à un changement de paradigme en matière de recrutement, de fidélisation, mais aussi de performances, les entreprises sont poussées à se saisir de la question du bien-être des salariés. Les notions de sens, de santé mentale et de qualité de vie au travail (QVT) en sont les piliers, le management, la clé de voûte. À Bordeaux, So Many Ways, Lumm et XXL Happyness les accompagnent sur ces sujets. Rencontre.
© Shutterstock
94 % des salariés français estiment que « se sentir bien dans son travail permet de se sentir bien dans sa vie en général », selon le baromètre du bien-être mental en entreprise du premier semestre 2022 réalisé par Alan et Harris Interactive (1). Or, 90 % d’entre eux, tous métiers et âges confondus, estiment également que « les difficultés psychologiques sont de plus en plus répandues au travail ». Après deux années marquées par les crises sanitaire et économique, ce sont les conditions dans lesquelles les salariés exercent leur métier qui sont pointées du doigt : « fatigue » (66 %), « stress » (55 %), « perte de sens (43 %) », « manque de considération par leur hiérarchie » (88 %) ou encore « difficultés à maintenir un équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle » (41 %) sont autant d’écueils rencontrés en entreprise. Parallèlement, 92 % des salariés se déclarent « en quête de sens » selon l’étude Audencia/Jobs that make sense de décembre 2021, et 50 % se posent des questions sur un changement potentiel, quand 42 % ont déjà entrepris leur transition professionnelle.
92 % des salariés se déclarent en quête de sens
« Le rapport au travail a changé et cela a beaucoup d’incidence sur l’entreprise, qui se questionne, s’adapte, innove, notamment à travers la mise en place du travail hybride ou de la semaine de 4 jours. En réalité, nous sommes passés d’un modèle d’organisation standardisé à un modèle personnalisé, qui nécessite de faire cohabiter différentes expériences de travail dans l’entreprise. Ce n’est pas simple », observe Anaïs Georgelin, fondatrice de So Many Ways, spécialisée dans l’analyse du rapport du travail, qui possède un bureau à Bordeaux. Si elle est complexe, l’adaptation des entreprises à cette réalité n’en est pas moins inévitable, avec des risques économiques bien réels. Ainsi, 75 % des salariés auraient envie de démissionner selon le baromètre Alan/ Harris Interactive, 73 % ressentent une perte d’engagement et 60 % subissent une perte de concentration et de productivité.
Anaïs Georgelin, So Many Ways © DR
« Le but de l’entreprise, quand elle s’intéresse au bien-être de ses salariés, est de répondre à des enjeux d’attractivité et de fidélisation des talents, mais aussi de générer de la performance », estime Anaïs Georgelin, pour qui la crise sanitaire et les problèmes de recrutement ont obligé les organisations à se saisir de ces questions. 75 % des salariés estimant que l’amélioration de leur bien-être mental au travail renforcera leur fidélité à l’entreprise, en tenir compte est devenu crucial : « pour la génération Z, cela fait partie des facteurs les plus importants dans le choix d’une entreprise, tout comme la RSE (Responsabilité sociétale des entreprises, NDLR), devant le salaire », confirme Julien Alart, cofondateur de la start-up bordelaise Lumm, dédiée à la santé mentale des salariés et à la prévention des risques psycho-sociaux en entreprise. Le gain est double pour les organisations, puisqu’« investir dans une démarche de Qualité de vie au travail (QVT) peut représenter un retour sur investissement de 235 % », affirme Cindy Dauvin, dirigeante de XXL Happyness, société de conseil bordelaise spécialisée dans la mise en place de démarches QVT et RSE.
75 % des salariés ont envie de démissionner
Le sens, la santé mentale et la qualité de vie au travail : trois piliers du bien-être dont se sont saisies ces 3 entreprises basées à Bordeaux. Et qui répondent à un véritable besoin exprimé par les salariés, 72 % d’entre eux réclamant « des outils et formations pour mieux réagir aux difficultés psychologiques », ainsi que « des actions concrètes pour se sentir mieux sur leur lieu de travail », selon le baromètre Alan/ Harris Interactive. Et à une obligation légale, la loi Santé au travail de 2021, entrée en vigueur en mars 2022, ayant rendu obligatoire la mise en place d’un programme annuel de prévention des risques professionnels en entreprise, afin d’améliorer « la qualité de vie et les conditions de travail (QVCT) » des salariés.
C’est en constatant le changement à l’œuvre dans le rapport des Français au travail qu’Anaïs Georgelin, elle-même déçue du monde professionnel et des entreprises sociales, où elle a rencontré « les pire pratiques managériales », crée dès 2015 l’association So Many Ways, qui devient en 2018 une entreprise, installée à Paris et Bordeaux. Son but : « donner les clés aux collaborateurs afin qu’ils soient capables d’aligner à un instant T leur réalité professionnelle avec leurs besoins prioritaires, et ainsi de s’épanouir », explique-t-elle. Pour cela, elle cartographie au préalable avec les Ressources humaines les dispositifs déjà proposés par l’entreprise et ce qui pourrait répondre à ces besoins, comme la mise en place d’une démarche RSE, le télétravail ou des congés spécifiques.
So Many Ways © DR
Appuyée par un chercheur en psychologie sociale du travail et des organisations, aujourd’hui à plein temps dans l’entreprise, So Many Ways a mené une enquête de terrain, à laquelle ont déjà participé plus de 15 000 personnes depuis 2015. Une démarche continue qui lui a permis de modéliser 5 modes de rapport au travail, et d’élaborer un questionnaire permettant à chaque individu de se positionner, chacun étant un panaché à différents degrés de ces catégories. En mode ascension, « le collaborateur a une vision traditionnelle de la réussite et conçoit le travail comme un moyen d’acquérir une position sociale, en gravissant les échelons, en gagnant plus d’argent… » ; en mode équilibre, « il voit le travail comme un moyen de gagner sa vie, et surtout de vivre à côté » ; en mode impact, « son travail doit lui permettre de contribuer aux enjeux sociaux et environnementaux de la société » ; en mode introspection, « le travail doit être un moyen d’épanouissement et de développement personnel » ; et enfin en mode transformation, « le travail est vu comme un moyen d’inventer demain, de contribuer à l’innovation et à la transformation de l’organisation, de l’entreprise elle-même ». Les dispositifs tels que « la semaine de 4 jours répondent par exemple aux salariés qui sont plutôt en mode équilibre, pas du tout à ceux qui sont en mode ascension », note Anaïs Georgelin.
Mise en place en amont des entretiens annuels professionnels ou dans le cadre d’un accompagnement à la mobilité, la plateforme digitale So Many Ways, commercialisée depuis février 2022, permet aux collaborateurs « d’être acteurs du changement et partie prenante de leur prochaine étape professionnelle. Ils participent à façonner leur emploi, c’est le job crafting », explique la fondatrice, dont l’objectif, à terme, est de recueillir le maximum de données afin de retracer l’historique du rapport des Français au travail, et de publier un baromètre annuel, par secteur et par tranche d’âge. « Nous voulons suivre la manière dont les salariés repensent la place du travail dans leurs vies, comment cela bouscule leur vision de la réussite, et comment le sens est devenu un élément central de leur bien-être », conclut-elle.
Spécialité : sens et rapport au travail
Date de création : 2015
Fondatrice : Anaïs Georgelin
Activité : études, formation et création de logiciel SaaS
Effectifs : 15 personnes, dont 6 à Bordeaux
Modèle économique : abonnement SaaS et prestation de services
Exemples de clients : VYV, Boulanger, Accenture…
Fondée à Bordeaux en avril 2021 par Julien Alart et Alexis Barthélémy, la start-up Lumm veut pour sa part « faire de la santé mentale un sujet non tabou dans l’entreprise, et même un pilier de l’organisation et d’une croissance saine », affirme Julien Alart, qui comme son ami et associé a travaillé durant une dizaine d’années pour les GAFAM, « où la santé mentale fait partie du quotidien des salariés ». Lumm a ainsi créé une plateforme digitale accessible à tout moment, sur laquelle les salariés peuvent trouver du contenu, des exercices de méditation, des parcours d’accompagnement et de développement avec des coaches, mais aussi des séances de soutien avec des psychologues. « Nous travaillons notamment sur la gestion du stress, la relation aux autres, l’organisation, la confiance en soi ou encore la capacité à gérer l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle », décrit Julien Alart, qui compte une quarantaine de psys et coaches dans son réseau.
Nous voulons faire de la santé mentale un sujet non tabou, et même un pilier de l’organisation et d’une croissance saine (Lumm)
Lumm © DR
Concrètement, après avoir établi un baromètre de la santé mentale dans l’entreprise, reposant sur un questionnaire mis au point « avec un comité scientifique qui possède les connaissances académiques », Lumm propose un plan d’action individuel et collectif qu’elle ajuste au fur et à mesure grâce à une prise de pouls régulière de l’humeur des salariés. « Les grands principes pour améliorer la santé mentale sont tout d’abord d’accepter, en tant qu’entreprise, d’écouter les salariés. Il faut aussi admettre que le bien-être mental des collaborateurs dépend de leur bien-être professionnel, mais aussi personnel. Enfin, il faut avoir à l’esprit que les salariés ne sont pas tous capables d’en parler. Il faut donc mettre à la disposition de tous une solution externe, un tiers de confiance neutre qui assure la confidentialité et l’anonymat et permettra aux salariés de s’exprimer », prévient le dirigeant. Le but étant de nouer le dialogue. Là aussi, grâce au recueil des données et à leur analyse, la plateforme est en mesure « d’avoir une compréhension fine et instantanée d’un sujet très difficile à appréhender pour les entreprises », et ainsi d’identifier des signaux, même faibles, pour prévenir les risques psycho-sociaux.
Spécialité : santé mentale
Date de création : 2021
Fondateurs : Julien Alart et Alexis Barthélémy
Activité : création de logiciel SaaS, formation et analyse de données
Effectifs : 12 à Bordeaux
Modèle économique : abonnement SaaS (avec séances de psy prépayées)
Exemples de clients : Luni, Pitaya…
Troisième pilier du bien-être des salariés, la Qualité de vie au travail (QVT) souffre quant à elle « de nombreux clichés et ne se limite pas à l’installation d’un babyfoot ou de chaises colorées », s’irrite Cindy Dauvin, dirigeante de XXL Happyness, qu’elle a créé en 2019 à Bordeaux. Après un diagnostic gratuit qui vise à identifier les besoins de l’entreprise et les attentes des collaborateurs, interrogés via un questionnaire développé là aussi avec des psychologues du travail, XXL Happyness fait des préconisations en fonction des budgets alloués et met des actions en place. Son pôle bien-être propose des cours de sport, de relaxation, de méditation, des massages assis ou des « corners petits déjeuner healthy avec des produits livrés par des producteurs locaux » ; son pôle événementiel, qui repose sur un réseau de 120 partenaires dans toute la France, organise des séminaires ou des événements pour « fédérer les équipes et créer du lien » autour de 70 activités telles que des olympiades, un Koh-Lanta géant ou des ateliers de mixologie… ; et enfin, son pôle RSE valorise et met en place des actions « montrant que l’entreprise et ses salariés prennent soin de la planète », détaille Cindy Dauvin.
Investir dans une démarche de Qualité de vie au travail peut représenter un retour sur investissement de 235 % (XXL Happyness)
Ensuite, l’application « Josiane » prend tous les trois mois « la température de l’humeur des collaborateurs, pour mesurer si les actions mises en place fonctionnent », explique la dirigeante. Qui s’est inspirée de son expérience professionnelle à Paris et à Londres durant laquelle elle a constaté que « la bienveillance et la liberté donnée aux équipes », ainsi que le fait de nouer des liens entre elles, « généraient de meilleures performances ». La démarche QVT implique ainsi « de donner régulièrement la parole aux collaborateurs, de savoir les écouter et les prendre en considération, à travers un management bienveillant, car ce sont eux la richesse de l’entreprise », estime Cindy Dauvin, qui assure constater de premiers résultats en seulement 6 mois et envisage d’ouvrir des franchises de XXL Happyness ailleurs en France d’ici 2024.
Quel que soit le prisme, le management est l’une des clés de voûte du bien-être des salariés. « La démarche QVT ne peut pas être qu’un pansement », prévient Cindy Dauvin, qui fournit un accompagnement et un coaching dédié aux problèmes de management, avec des ateliers de résolution des conflits et d’intelligence collective où chacun doit pouvoir s’exprimer. La plateforme Lumm met également à la disposition des managers des contenus supplémentaires « afin de les aider à développer leur intelligence émotionnelle et leur capacité à gérer des équipes », précise Julien Alart, qui propose aussi des consultations spécifiques avec des psychologues et des coaches opérationnels pour résoudre rapidement des problématiques rencontrées par les managers. Les évolutions du monde du travail et de notre rapport à celui-ci ont en effet entraîné une modification du rôle du manager : « désormais, il n’a plus la possibilité d’être un mauvais manager. Et il doit adapter son type de management aux salariés : plutôt mentor, coach ou paternaliste… », énumère Anaïs Georgelin. C’est pourquoi en amont des dispositifs destinés aux salariés, « So Many Ways forme une nouvelle génération de managers qui doivent être porteurs de sens. Nous les aidons à trouver de nouveaux leviers d’action managériaux ».
XXL Happyness © DR
« Les codes du monde du travail ont changé », conclut Anaïs Georgelin. De nombreuses entreprises peinent aujourd’hui à recruter quand certains métiers et secteurs entiers, tels que l’hôtellerie- restauration ou les professions du soin, ont perdu énormément d’employés avec la crise sanitaire et doivent se réinventer. De plus, la saison qui vient, de la rentrée au mois de décembre, « étant une période très chargée pour les entreprises et pouvant avoir des impacts sur la santé mentale des salariés », observe Julien Alart, le moment est idéal pour penser, organiser et améliorer le bien-être de ses salariés !
Nous aidons les managers à développer leur intelligence émotionnelle
Spécialité : qualité de vie au travail et RSE
Date de création : 2019 Fondatrice : Cindy Dauvin
Activité : sport et bien-être, événementiel, démarche RSE, formation
Effectifs : 10 à Bordeaux
Modèle économique : prestation de services
Exemples de clients : ManoMano, Asobo Studios, Gedimat, BPCA, GRDF/ERDF, la CPAM…
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