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Banques centrales : les outils pour lutter contre le changement … – Polytechnique Insights

La pandémie de Covid, la crise liée à la guerre en Ukraine et les enjeux que pose le change­ment cli­ma­tique pla­cent les ban­ques cen­trales face à un défi com­plexe : pilot­er et maîtris­er une infla­tion qui ne cesse d’augmenter. La BCE a notam­ment comme objec­tif d’arriver à une infla­tion à 2 % à moyen terme – alors que l’on atteint aujourd’hui les 3 % en Europe – mais sans frein­er les investisse­ments néces­saires à la tran­si­tion énergétique.
Or, d’une part l’ampleur des investisse­ments néces­saires au regard des objec­tifs cli­ma­tiques est colossal.
Notre bud­get car­bone mon­di­al restant, qui représente les émis­sions de CO2 com­pat­i­bles avec l’Accord de Paris, serait de 580 GtCO2 pour une prob­a­bil­ité de 50 % de main­tenir le réchauf­fe­ment en dessous de 1,5 °C selon les esti­ma­tions du rap­port du GIEC2. En moyenne, les émis­sions anthropiques annuelles mon­di­ales sont de l’ordre de 40GtCO23. À ce rythme, ce bud­get car­bone serait épuisé en moins de 15 ans. D’autre part, les sources de l’inflation sont aujourd’hui mul­ti­ples, de la désor­gan­i­sa­tion des chaînes de valeur pen­dant la pandémie au déséquili­bre entre l’offre et la demande en sor­tie de crise. À ceci se rajoute la hausse des prix de l’énergie liée à la guerre en Ukraine et les poli­tiques de tran­si­tion énergé­tique qui ali­mentent une « infla­tion verte » (« green­fla­tion »4). 
Est-il pour autant légitime que les ban­ques cen­trales s’emparent du sujet de la lutte con­tre le change­ment climatique ?
C’est une ques­tion que soule­vait déjà Mil­ton Fried­man en 1970 à pro­pos de la respon­s­abil­ité envi­ron­nemen­tale et sociale des entre­pris­es, lorsqu’il ques­tion­nait la légitim­ité poli­tique des chefs d’entreprises à fournir des biens publics6. Or, en matière de lutte con­tre le change­ment cli­ma­tique, nous faisons face à une dou­ble défail­lance à inté­gr­er le risque cli­ma­tique : défail­lance des marchés mais aus­si défail­lance des gou­verne­ments7.
Les attentes à l’égard des acteurs économiques et financiers et des régu­la­teurs sont légitimes. Mais cela ne sig­ni­fie pas pour autant que les ban­ques cen­trales doivent se sub­stituer aux gouvernements.

La néces­sité de mobil­i­sa­tion des ban­ques cen­trales dans la lutte con­tre le change­ment cli­ma­tique est dou­ble : le change­ment cli­ma­tique est une men­ace à la fois pour l’activité économique, mais aus­si pour la sta­bil­ité finan­cière, il fait donc par­tie inté­grante du man­dat de la Banque centrale.
C’est d’ailleurs ain­si que débute le rap­port TCFD10 de la Banque de France et l’ACPR en 2022 :
« Con­tribuer à éval­uer, réduire et gér­er l’impact des risques cli­ma­tiques sur l’économie réelle et le sys­tème financier fait à nos yeux par­tie inté­grante du man­dat des ban­ques cen­trales et des super­viseurs, tant au titre de la stratégie moné­taire que de la sta­bil­ité finan­cière. La Banque de France s’est ain­si investie de manière pré­coce pour la prise en compte des enjeux cli­ma­tiques par la com­mu­nauté des ban­quiers cen­traux et des super­viseurs. À l’international, elle a notam­ment, dès 2017, fait par­tie des mem­bres fon­da­teurs du NGFS11, le Réseau des ban­ques cen­trales et des super­viseurs pour le verdisse­ment du sys­tème financier, qui compte aujourd’hui 121 mem­bres, et dont elle assure le secré­tari­at mondial. »
Le risque cli­mat en finance se définit selon deux com­posantes prin­ci­pales : d’une part le risque physique, d’autre part le risque de tran­si­tion12. Le risque physique représente les coûts économiques et financiers subis en rai­son de la grav­ité et la fréquence crois­sante des aléas cli­ma­tiques physiques. Le risque de tran­si­tion, quant à lui, résulte des change­ments de poli­tiques gou­verne­men­tales, des change­ments tech­nologiques et des change­ments de com­porte­ments des investis­seurs et consommateurs.
La tran­si­tion vers une économie à faible émis­sion de GES néces­site des tran­si­tions rapi­des et de grande enver­gure dans les domaines de l’énergie, de l’aménagement du ter­ri­toire, de l’urbanisme, des infra­struc­tures et des sys­tèmes indus­triels. 830 mil­liards d’euros par an seraient néces­saires pour assur­er cette tran­si­tion13.
830 mil­liards d’euros par an seraient néces­saires pour assur­er la tran­si­tion vers une économie à faible émis­sion de GES.
Cer­tains secteurs peu­vent per­dre une grande par­tie de leur valeur, voire être amenés à dis­paraître dans les décen­nies à venir (on par­le alors d’actifs échoués). Les études14 esti­ment qu’une poli­tique visant à lim­iter le réchauf­fe­ment cli­ma­tique à 2 °C impli­querait que 35 % des réserves de pét­role, 52 % des réserves de gaz et 88 % des réserves de char­bon devi­en­nent inex­ploita­bles. Dans ce con­texte, faut-il alors con­tin­uer à inve­stir des cap­i­taux dans la recherche et l’exploitation de ces réserves ? Ces investisse­ments risquent de devenir non util­is­ables, très onéreux, et pos­si­ble­ment totale­ment dépréciés.
Tous ces change­ments peu­vent génér­er des pertes iden­ti­fi­ables au tra­vers des risques financiers tra­di­tion­nels : de crédit (emprun­teurs sen­si­bles au sujet), de marché (val­ori­sa­tion des act­ifs), de liq­uid­ité (accès au finance­ment ban­caire) ou opéra­tionnel (risque de con­for­mité et réglementaire).
En matière d’inflation – man­dat fon­da­men­tal de la Banque Cen­trale –, les risques physiques liés au change­ment cli­ma­tique entraî­nent des chocs d’offre négat­ifs (destruc­tion de cap­i­tal, réduc­tion de l’offre de tra­vail, incer­ti­tudes sur la pro­duc­tiv­ité) qui réduisent la pro­duc­tion poten­tielle, aug­mentent les écarts de pro­duc­tion et les pres­sions infla­tion­nistes. Une aug­men­ta­tion de la fréquence et de la grav­ité de ces chocs d’offre négat­ifs pour­rait entraîn­er une volatil­ité accrue de l’inflation glob­ale et, dans cer­taines cir­con­stances, pour­rait affecter les antic­i­pa­tions d’inflation15
L’ACPR (Autorité de con­trôle pru­den­tiel et de régu­la­tion), a con­duit en 2021 un exer­ci­ce pilote cli­ma­tique (stress test) qui met en évi­dence l’exposition au risque cli­ma­tique en France de 9 groupes ban­caires et 15 groupes d’assurance, qui représen­tent à eux seuls 85 % du total du bilan ban­caire et 75 % du total du bilan des assureurs en France. Cet exer­ci­ce mon­tre que, pour le secteur de l’assurance, le coût des sin­istres cli­ma­tiques devrait être mul­ti­plié par 5 ou 6 entre 2020 et 2050 dans cer­tains départe­ments (à l’ouest de la France notamment).
Le coût des sin­istres cli­ma­tiques devrait être mul­ti­plié par 5 ou 6 entre 2020 et 2050.
Les prin­ci­paux aléas con­tribuant à cet accroisse­ment de la sinis­tral­ité sont liés au risque de sécher­esse et d’inondation, et à l’accroissement du risque de tem­pêtes cycloniques dans les ter­ri­toires d’outre-mer. Si ce risque devait être com­pen­sé par une hausse des coti­sa­tions, les primes d’assurance devraient alors aug­menter de 130 à 200 % sur 30 ans soit 3 à 3,7 % par an16.
Afin d’intégrer le risque cli­ma­tique dans le suivi de la sta­bil­ité finan­cière, dans la super­vi­sion pru­den­tielle et dans la ges­tion de porte­feuille, la banque cen­trale dis­pose de plusieurs out­ils (voir par exem­ple les recom­man­da­tions du NGFS, 201917) :
La stratégie cli­ma­tique de la Banque de France et de l’ACPR s’incarne ain­si dans toutes les mis­sions de l’institution (stratégie moné­taire, sta­bil­ité finan­cière, ser­vices à l’économie et à la société et per­for­mance durable). Cinq actions cli­mat stratégiques sont dédiées à des chantiers pri­or­i­taires : adapter les opéra­tions de poli­tique moné­taire aux risques cli­ma­tiques, ampli­fi­er la prise en compte du risque cli­ma­tique par le secteur financier, éval­uer l’intégration des risques cli­ma­tiques dans la cota­tion des entre­pris­es, s’engager active­ment vers la neu­tral­ité car­bone et vis­er la sobriété numérique dans tous les usages18.
À l’École polytechnique Patricia Crifo est la directrice du Master « Economics for Smart cities and Climate Policy », de l’IdR Finance Durable et Investissement Responsable (TSE-Ecole Polytechnique) et la directrice adjointe du centre Energy4Climate.
professeur d’économie à l’École polytechnique – CREST (IP Paris)
conseiller économique à Natixis
responsable du département d’économie de l’Institut Polytechnique de Paris et prix du meilleur jeune économiste de France 2020
professeur à l’École polytechnique et chercheur au Centre de Recherche en Gestion (I3-CRG)*
chercheur au laboratoire CNRS i³-CRG* et professeur de l’École polytechnique (IP Paris)
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