18 Septembre 2022
Rédigé par François Meyer Actunautique.com
Le chantier de Périgny est à l'origine de certains des plus illustres modèles de voiliers de grande croisière qui aient été mis à l'eau.
Meltem, Maramu, Super Maramu, Santorin, ces noms de vents désignent principalement des ketchs (des voiliers à deux mâts dont le mât arrière est moins haut que le mât avant), dont les gréements étaient faciles à fractionner pour affronter tous les types de temps en sécurité.
A l'origine du chantier, Henri Tonet, dit Amel, un personnage dont la biographie vaudrait un ouvrage à elle seule, un patron de chantier exigeant, presque aveugle et aimant naviguer à la voile.
De son héritage, découlent directement certaines des caractéristiques des voiliers Amel d'aujourd'hui. Mais on ne construit pas de voiliers "vintage" à Périgny. La nouvelle gamme Amel, des sloops ultra-modernes de de 50 et 60' combinent remarquablement l'héritage du passé avec l'adoption de techniques et d'équipements contemporains.
Henri Amel voyait mal. Cette infirmité, qui ne l'empêchait nullement de traverser les océans pour parfois livrer ses bateaux, avait modelé de grands principes architecturaux sur ses bateaux.
Le cockpit central et la casquette
Profondément décaissé, placé au milieu du bateau, protégé par une casquette rigide et un pare-brise, le cockpit de l'Amel 60 se présente comme une timonerie ouverte sur l'arrière.
Dans un cockpit central, le barreur de gros temps ne risque pas d'être emporté par une lame pas plus que la descente ne risque l'envahissement par forte mer arrière. Sur les nouveaux Amel, toujours fidèles au cockpit central et à sa protection, la porte de descente est située à 8 mètres de l'arrière du bateau ! Peu de chance qu'une déferlante parvienne jusqu'ici et si elle y parvenait, un caniveau est situé juste avant le seuil de la porte de descente, une porte de descente solide qui mérite son nom.
Depuis le poste de barre, doté d'un siège de pilotage confortable et d'une électronique archi-complète on accède à toutes les manœuvres, propulseurs rétractables inclus. Bien que le niveau d'équipements électriques, comme les commandes de voiles, aient considérablement évolué, le concept de cockpit central très protégé est toujours bien présent sur ces sloops.
Tout comme le sont les solides balcons inox qui ceinturent ces navires d'avant en arrière et offrent une prise en main parfaite dans les déplacements et une sécurité anti-chute d'un niveau incomparable avec celui d'une simple filière.
Le revêtement de pont
Autre innovation Amel toujours bien présente à l'extérieur : le revêtement de pont moulé et teint dans la masse. Un pont en bois (toujours disponible en option) nécessite une maintenance soignée. C'est de ce soin qu'est né le verbe "briquer", on frottait les ponts, du temps de la marine à voile, avec une brique en terre cuite pour lui conserver son lustre !
À l'époque du fondateur, on posait encore les ponts collés et vissés. Des milliers de vis traversaient alors le gel coat. Amel avait alors introduit cette technique de moulage dans la masse pour éviter tout défaut d'étanchéité en rapport avec ces ponts en bois.
Revêtus de ce revêtement, les ponts Amel n'ont toujours pas besoin de maintenance.
Les anciens voiliers Amel étaient réalisés en un épais composite de fibre de verre moulé au contact. Les coques atteignaient souvent des épaisseurs de 20 mm. Varangues et renforts étaient stratifiés à la coque tout comme l'étaient les cloisons. Parmi ces dernières, cinq sont des cloisons étanches que le chantier préfère désormais nommer cloisons à retardement d'envahissement.
Pour finir, le pont était intégralement stratifié à la coque pour former un ensemble monobloc et raide, garantissant une solidité très importante en cas de choc, mais aussi un assurant aux propriétaires Amel que toutes les portes s'ouvrent même le bateau fortement gité.
Les Amel d'aujourd'hui reprennent l'ensemble de ces caractéristiques à l'exception de la constreuction monobloc contact, une technique désormais obsolète et remplacée par un moulage par infusion et résine époxy, une technique combinanht résine étanche et sa dispersion parfaite au sein des tissus de verre qui composent la coquer.
Les cloisons stratifiées
Là où la plupart des voiliers de voyage se contentent d'une cale moteur, les Amel ont toujours offert aux mécaniciens et aux propriétaires une véritable salle des machines. Située sous le plancher du cockpit central, cette salle regroupe le moteur et son système de purification du carburant et le générateur. Ces machines sont isolées de l'espace habitable. Aussi, dans l'hypothèse hautement improbable d'un départ de feu, l'incident resterait strictement circonscrit à ce volume.
Le volume de cette salle des machines permet aussi de travailler sur son moteur chaud sans pour autant être assis à califourchon ou accroupi sur la culasse ou encore plié en deux depuis un accès par une cabine latérale.
Les voiliers Amel modernes se sont débarrassé de la transmission "U-drive" qui caractérisait les modèles anciens pour une classique ligne d'arbre, plus facile à entretenir, ou que l'on se trouve dans le monde.
Henri Amel avait introduit le mât à enrouleur sur ses bateaux, une invention maison révolutionnaire qui impliquait, à l'époque, un système, 100 % propriétaire.
Les dernières versions d'avant la disparition du fondateur, Santorin et Super-Maramu étaient équipées d'un grand mât (avant) sur enrouleur électrique ainsi que d'un génois et d'une trinquette sur enrouleurs électriques. Seul le mât d'artimon (arrière) restait manuel.
Les nouvelles versions sloop ont conservé cette fonctionnalité, mais en sélectionnant un système de la gamme d'un accastilleur, de nature à favoriser la tenue en stock de pièces de rechange dans les décennies à venir. Décennies, car les Amel sont toujours amoureusement entretenus par leurs propriétaires et quand en surgit un, à bon prix, mais nécessitant des travaux, il s'arrache littéralement tant la valeur de ces voiliers se maintient sur le marché de l'occasion.
Le mât en question présente un profil à quatre chambres, une pour la voile, une pour les drisses et deux pour les gaines électriques, une architecture visant à éviter toute interaction désagréable avec le système d'enroulement de la grand-voile.
Tout à l'avant, le double guindeau est toujours de la partie avec ses deux puisards et ses deux mouillages complets.
L'accès à la cabine se fait en empruntant trois marches à pente douce, on les descend en avant ou en arrière. Une fois en bas, de très larges vitrages de coque éclairent le bateau, on ne descend plus "à la cave" comme sur les anciens Amel et la menuiserie frappe par son aspect. Un aspect à la fois élégant mais surtout solide. Aucune chance d'arracher la table de son pied si on venait à s'y raccrocher dans un coup de gîte !
Le bois massif est encore partout présent, pas un angle ou un bord d'attaque qui n'en soit fait.
À l'intérieur d'un croiseur pourtant très luxueux comme cet Amel 60, on retrouve aussi des toiles anti-roulis dans les cabines et des détails marins intelligents.
Ainsi le tiroir des verres et tasses se verrouille avec une barre empêchant toute ouverture inopinée du loquet ou l'équipet voisin du tableau électrique qui contient, arrimés à une paroi, les deux outils nécessaires à l'ouverture du tableau.
L'astucieux système de blocage de l'ouverture du meuble à verres et tasses (H) et les outils d'ouverture du tableau électrique (B)
Sur un catamaran de croisière, nous avons compté jusqu'à 60 passe-coques… Un passe-coque, sa vanne, son raccord constituent autant de faiblesses. Il faudrait fermer chaque vanne avant de quitter le bateau. Sur tous les voiliers de série, c'est possible, mais il va falloir tout démonter à l'intérieur pour les atteindre. En navigation, la défaillance d'un passe coque est à ce point fréquente qu'on emporte des pinoches pour y parer.
Chez Amel, les choses sont très différentes. Héritage direct de la longue tradition de construction de voiliers hauturiers du chantier, leur nombre est fortement limité.
Ainsi, il n'y en a qu'un seul pour ce qui concerne les entrées d'eau ! Toutes les entrées d'eau, refroidissement moteur, groupe, climatisation, prises d'eau de mer, dessalinisateur sont regroupés en amont d'un passe coque unique, géant, et de sa vanne d'isolement, un passe coque démuni de coude que l'on peut imaginer déboucher de l'intérieur, d'un simple coup de balai !
Côté sortie d'eau, seuls 6 passes-coques, tous facilement accessibles traversent la coque.
L'ensemble des eaux grises -douches, lavabo et éviers- sont repris dans un puisard en fond de cale, fermé d'un couvercle étanche, et remontées, par une pompe, vers l'extérieur par un seul orifice, là ou sur un bateau conventionnel, on en compterait une dizaine, juste pour ces fonctions.
L'unique passe coque d'entrée d'eau de mer (H) et le puisard à eaux grises (B)
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