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Claire a enfilé son jogging et relevé sa chevelure blonde en queue de cheval. Après sa séance de sport, elle traverse les couloirs flambant neufs du tout nouveau centre AVanCer pour rejoindre une jolie pièce vitrée avec vue sur le jardin verdoyant. C’est l’heure de son atelier d’art thérapie.
Depuis quelques semaines, la vie de Claire a changé. Son corps a repris des forces, ses gestes sont plus assurés. « Je sens une vraie évolution, sourit la quadra. Avant, je faisais deux kilomètres sur le vélo électrique. Aujourd’hui, j’atteins presque les sept kilomètres ! »
Claire fait partie des toutes premières personnes à bénéficier de l’accompagnement du programme mis en œuvre par le groupement de coopération sociale et médico-sociale Arrpac (Accompagnement, réadaptation, répit, post AVC et cérébro-lésés) depuis le 7 juin dernier dans un bâtiment loué au sein du centre Vinatier (Bron). Dans ces locaux de 1 000 m2, cette démarche expérimentale vise à aider à surmonter les conséquences des accidents vasculaires cérébraux. Une première en France.
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Car bien souvent, les victimes d’AVC sont confrontées à une grande solitude. « Après mon accident, il y a un an, j’ai été hospitalisée en soins intensifs et en réanimation, raconte Claire. On m’a gardée 17 jours à l’hôpital et on m’a renvoyée chez moi où j’ai dû me débrouiller toute seule. On se sent un peu abandonné… Quand on arrive dans une structure comme ça où tout le monde vous épaule, vous donne des conseils, ça change votre vie. Même pour le moral, c’est hyper important. »
Ce tout nouveau dispositif financé par l’Agence régionale de santé (ARS) et la Métropole de Lyon a pu voir le jour grâce à la volonté infaillible et à la force de persuasion de Nicole Sallet, 79 ans, elle-même victime de deux AVC en 2010. L’ancienne directrice de l’école Rockefeller (institut de formation en soins infirmiers) a tenu bon en dépit des refus, des contretemps et des années qui passent.
« C’est une personne exceptionnelle », confie le professeur Norbert Nighoghossian, spécialiste de l’AVC à l’hôpital Pierre-Wertheimer qui a voué sa carrière à l’étude de cette pathologie. « Elle a un sens de l’autre. Des personnes comme ça, il n’y en a pas 50 000 en France. »
Une vraie reconnaissance pour celle qui a lancé un projet scruté de toute part par les professionnels de la santé et les institutions. « Quand on sort d’une hospitalisation après un AVC c’est le désert, pose Nicole Sallet. Or, l’arrivée au domicile est quelque chose de très fort au niveau de la manifestation de la pathologie dans ses éléments les plus profonds. Vous rentrez chez vous et c’est là qu’on voit émerger des handicaps invisibles, des situations qui font que l’incompréhension s’installe et que la fatigue de l’aidant arrive rapidement… »
C’est en 2012, suite à ses deux graves accidents et du temps passé au contact des victimes, qu’elle décide d’agir, constatant que certaines sont sans famille et vont passer le reste de leur vie dans des Ehpad, parfois très jeunes. Après de longues réflexions et tractations, l’association Arrpac voit le jour en 2014 pour répondre à un appel à projets de l’ARS. Son président actuel, le professeur Gilles Rode, est le doyen de la faculté de médecine Lyon Est.
L’initiative portée par la structure ressort triomphante après que le jury l’a jugée « innovante en santé publique ». Dix ans de combat et de persuasion ont toutefois été nécessaires pour concrétiser le projet, convaincre les autorités, trouver les financements, dénicher un local adapté…
Mais le jeu en valait la chandelle. Le programme — entièrement gratuit pour les habitants de la métropole — ambitionne de décloisonner le sanitaire et le social en rassemblant une équipe pluridisciplinaire de professionnels : infirmière, enseignante d’activité physique adaptée, médecin, psychologue, neuropsychologue, psychomotricienne…
Le centre qui fonctionne sous forme d’accueil de jour permet à ses bénéficiaires de jouir d’un accompagnement global avec tout un éventail d’activités et d’ateliers (sport, art thérapie, psychomotricité, etc.) proposés à raison de deux ou trois demi-journées par semaine sur une durée d’au moins huit semaines.
Selon les chiffres de Santé publique France de 2019, 30 % des victimes d’AVC décèdent dans l’année qui suit.
L’AVC touche 150 000 personnes par an (soit une personne toutes les quatre minutes), qui sont à 56 % des femmes et 44 % des hommes. Une augmentation des cas chez les jeunes apparaît, 10 % des cas d’AVC touchant des personnes entre 18 et 50 ans.
L’AVC est la troisième cause de mortalité dans la population générale et une cause majeure des handicaps acquis durant la vie.
30 % des victimes meurent dans les 30 jours qui suivent leur AVC et un tiers garde un handicap.
Trois types de programmes sont proposés au centre de l’Arrpac : 8 semaines, 12 semaines ou 16 semaines ; des durées expérimentales et vouées à changer en fonction des évaluations universitaires.
« Ici, les gens redeviennent acteurs, commente Valérie Debrouver, directrice du centre. S’il y avait un mot pour résumer ce qui se passe ici c’est “mouvement”. À tous les niveaux, physique comme psychique, on remet du mouvement. L’idée, c’est de faire du pluridisciplinaire. Pour un atelier de cuisine thérapeutique, par exemple, il y a une première étape avec l’infirmière sur l’équilibre alimentaire, puis une phase informatique pour aller chercher la recette sur internet, un travail cognitif pour dresser la liste des courses, la réalisation du plat et enfin le côté social dans le fait de manger ensemble… »
Pour aller plus loin, l’accueil de jour a aussi mis en place un accompagnement spécialement dédié aux aidants, trop souvent oubliés du système de soin. Un programme accessible sur la base du volontariat pour recréer du lien entre la victime d’AVC et la personne qui l’épaule au quotidien, en dehors du cadre habituel.
« Les aidants viennent ici faire les activités qu’ils ont choisies, détaille Nicole Sallet. Les victimes d’AVC et leurs accompagnants auront ainsi un nouveau point commun, un nouveau sujet de discussion : ils auront vécu séparément des choses dans le même lieu et avec les mêmes professionnels. Pour moi, c’est un moyen de recréer un échange, du lien, une communication. »
La structure doit désormais faire ses preuves. Une évaluation indépendante va ainsi mesurer l’impact du programme tant sur la récupération physique que sur l’amélioration des facteurs socio-économiques. « L’intérêt du centre est évident. Maintenant, on doit montrer son efficacité », indique Valérie Debrouver qui espère que le programme parviendra à limiter les risques de récidive et de réhospitalisation.
En attendant, Nicole Sallet peut arpenter les multiples espaces de l’établissement le visage éclairé par un sourire de satisfaction. Elle avoue être parfois « émue » lorsqu’elle voit des changements concrets se dessiner chez les participants du programme. Mais la grande dame conserve toujours l’humilité et la classe qui la caractérisent. « Ce qui a été fait là me paraît normal, je n’y vois rien d’exceptionnel, confie-t-elle. J’aime entreprendre. Je crois que c’est, pour moi, un moyen de vivre. »
Membre de l’Arrpac, Norbert Nighoghossian est professeur à l’hôpital Pierre-Wertheimer et spécialiste lyonnais de l’AVC.
Quelles sont les causes de l’AVC ?
Norbert Nighoghossian : « L’AVC a deux grandes causes : les plaques athéromateuses, qui sont des plaques de graisses rendant les artères malades, ou le caillot de sang qui se forme et se bloque au niveau du cerveau.
Après un AVC, que faire et quels risques ?
L’AVC est une cause majeure de handicap, car même quand on récupère, on garde des séquelles. Avoir des aidants, avoir des aménagements chez soi est indispensable pour la plupart des patients. Après la rééducation à l’hôpital, de nombreuses difficultés interviennent car le patient est sorti du cadre médical. C’est là que Mme Sallet a un énorme mérite. Le projet qu’elle porte va permettre des évaluations psychologiques et de motricité, et va prévenir les récidives d’AVC qui sont fréquentes.
Est-ce qu’on peut prévenir les AVC ?
Oui, on peut éviter de nombreuses pratiques qui augmentent les risques. Il faut contrôler sa tension, pratiquer de l’activité physique, arrêter le tabac, veiller à une alimentation diététique et éviter le cholestérol. De petites attaques peuvent parfois se produire : ce sont des AVC qui se règlent seuls. Un caillot crée un bouchon dans l’artère qui se débouche toute seule. Mais après ça, il faut faire un bilan cardiaque et cérébral en imagerie immédiatement. Cet accident transitoire est généralement annonciateur d’un futur AVC.
Nicole Sallet et la directrice du centre ont la volonté de décloisonner les mondes sanitaire et médico-social, trop souvent opposés : partagez-vous ce désir ?
Certainement. Le projet de l’Arrpac porte une action de santé publique et sociale qui dépasse l’hôpital. Cela permet de ne pas rompre le lien avec les malades. Ainsi, ils ne sont pas abandonnés. Les associations sont les bienvenues et ce centre va être un maillon indiscutable dans la prise en charge des victimes d’AVC. Le but n’est pas de remplacer les médecins. Il y a un enjeu de réinsertion sociale qui n’est pas concurrent ».
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