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Les arts sous l'emprise des vampires – Le Point

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TERREUR POP. L’inquiétante confrérie de monstres hématophages est apparue en Europe au XVIIIe siècle. Retour sur une étrange histoire qui a captivé le cinéma et la littérature.
Temps de lecture : 8 min
On les croyait descendants de Vlad III (1431-1476), prince de Valachie auquel ses ennemis prêtaient la sinistre habitude d’empaler ses ennemis et, surtout, de boire leur sang… Les vampires ne sont, en réalité, pas d’origine roumaine ! Dans un essai* passionnant consacré à la figure de ces monstres, le sociologue Arnaud Esquerre nous dessine un tout autre arbre généalogique pour ces personnages hématophages que l’Anglais Bram Stoker (1847-1912) a popularisé avec son inoubliable Dracula.
À LIRE AUSSIArnaud Esquerre : comment se forgent les « vérités alternatives » Le terme de « vampire » fait son apparition dans la langue française en 1746 sous la plume d’Augustin Calmet, un abbé lorrain. Cet ecclésiastique en charge de l’abbaye de Senones, dans les Vosges, écrit, cette année-là, une « dissertation sur les revenants et vampires de Hongrie, de Bohême, de Moravie et de Silésie ».
Il y reprend une douzaine d’histoires, rapportées par la presse de l’époque. Des anecdotes propres à faire se dresser les cheveux sur la tête. On y lit que des défunts, « généralement des hommes d’origine paysanne y sont en effet suspectés d’assassiner leurs proches survivants : veuves, enfants, domestiques, voisins », écrit Arnaud Esquerre.
Un fait divers, survenu en 1725 dans la ville de Kisolova, en Serbie, et largement médiatisé dans le reste de l’Europe, assoit définitivement la légende de ces créatures de cauchemar. « Une enquête menée à l’initiative de l’administration militaire rapporte qu’à la suite du décès de neuf habitants en huit jours, un certain Peter Plogojovic, enterré peu avant, a été accusé de les avoir tués pendant leur sommeil, et sa tombe a été ouverte », raconte le sociologue. En 1731, à Medwegya, toujours en Serbie, une autre dépouille, d’un certain Arnont Paule, est pareillement exhumée et brûlée, car trois médecins affirment qu’il sort de sa sépulture, à la nuit tombée, pour massacrer les habitants.
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Le 7e art sous l’empire des Vampires

Des histoires semblables, on en voit émerger dans plusieurs pays d’Europe centrale à la même époque ; au point que l’ambassadeur de France à Vienne, François de Bussy, y consacre une dépêche en 1732. Rousseau et Voltaire se feront chacun leur tour un malin plaisir de tourner en ridicule « cette croyance qui n’a d’écho ni dans les récits bibliques ni dans la mythologie grecque ». Il n’empêche.
La rumeur ne cesse d’enfler. Les vampires ne sont pas seulement accusés de tuer les vivants à la nuit tombée. On leur attribue surtout une manière de faire particulièrement sinistre : ils mordent, de fait, la jugulaire de leurs victimes pour les vider de leur sang.
Ce modus operandi pousse d’ailleurs le naturaliste Georges-Louis Leclerc de Buffon (1707-1788) à baptiser « vampire » une espèce de chauve-souris qui vient d’être découverte en Amérique du Sud. L’animal se nourrit du sang des mammifères ? Ce nom lui va comme un gant. Cet élément ne va pas tarder à donner, à la légende initiale, un aspect exotique. Le vampire y gagnera sa cape noire qui lui permet de voler et de s’introduire chez les gens par la fenêtre ou la cheminée.
L’idée que des morts, revenus temporairement à la vie, puissent tuer des vivants en les saignant, au premier sens du terme, séduit, on s’en doute, les amateurs de littérature gothique. Parmi eux figure un jeune médecin : John William Polidori (1795-1821). Cet ami de Lord Byron et de Mary Shelley est le premier à consacrer une fiction à un vampire.
En juillet 1816, il invente le personnage de Lord Ruthven, un aristocrate à la beauté froide qui séduit et assassine des jeunes femmes en les mordant à la carotide. Cette nouvelle paraît en 1819 sous le titre The Vampire.
Le succès de ce premier texte fait des émules. Plusieurs fictions reprennent le stéréotype. Le vampire va atteindre une célébrité mondiale en 1897 avec le succès de Dracula, imaginé par Bram Stoker. Ce roman a pour protagoniste un comte de Transylvanie, dont le nom signifie « le fils du dragon », qui part à la conquête du Royaume-Uni. Ce n’est pourtant pas le seul livre fantastique à exploiter le thème d’un monstre de ce type, cette année-là.

Les arts sous l'emprise des vampires - Le Point
En 1897, le peintre Philip Burne-Jones expose un tableau (à gauche) qui inspire à son cousin, Rudyard Kipling, un poème, intitulé The Vampire (à droite). Lequel donnera l’idée à Porter Emerson Browne d’une pièce de théâtre pour Broadway. © DR

Florence Marryat (1833-1899) publie, quelques mois plus tard, The Blood of the Vampire, l’histoire d’Harriet Brandt, une séduisante métisse antillaise épuisant ses amants au cours d’étreintes où elle semble aspirer leur vitalité. Ce roman inspire à l’artiste Philip Burne-Jones le sujet d’un tableau qui fait scandale, la même année 1897, à Londres, car on croit y reconnaître une comédienne en vue avec laquelle le peintre a eu une aventure.
Rudyard Kipling, cousin de Burne-Jones, est si frappé par cette œuvre qu’il compose un poème (The Vampire). Lequel donne l’idée à Porter Emerson Browne d’une pièce de théâtre décrivant les mésaventures d’un diplomate tombant sous la coupe d’une femme fatale.
Ce spectacle, créé en 1909 sous le titre A Fool There Was, sera adapté pour le cinéma à la veille de la Première Guerre mondiale. Et ce mélodrame donnera naissance à un type de personnage féminin hollywoodien appelé à un grand avenir : celui de la « vamp ».

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En 1922, le comédien Max Shreck campe un comte Orlok plus vrai que nature dans le Nosferatu de Murnau. © DR

Le 7e art ne lâchera plus les personnages de vampires ! En 1922, Friedrich Wilhelm Murnau (1888-1931) se propose d’adapter le roman de Stoker. Mais faute d’avoir pu en racheter les droits, il demande à son scénariste, Henrik Galeen, de créer un personnage lui ressemblant en tout point.
Ce dernier n’est pas un novice en matière de film d’épouvante puisqu’en 1915, il a livré le script du Golem à Paul Wegener. Pour Murnau, il invente le personnage du comte Orlok, plus connu sous son surnom de Nosferatu.
L’histoire est bien connue. Nous sommes en 1838, dans la ville fictive de Wisborg, en Transylvanie. Un inquiétant aristocrate y poursuit de ses assiduités la belle Ellen. Il la traque de village en village, répandant dans son sillage le virus de la peste…
Incarné par Max Schreck, le personnage est d’autant plus inquiétant que le comédien fait courir la rumeur selon laquelle il ne peut jouer que la nuit. Il retire, en outre, systématiquement les crucifix des chambres d’hôtel où il séjourne.
Le réalisateur allemand Werner Herzog réalisera un remake de ce classique du cinéma expressionniste en 1979, avec Klaus Kinski et Isabelle Adjani dans les premiers rôles. Et Kinski s’amusera, comme Shreck, à terrifier l’équipe technique en laissant entendre qu’il est animé de pulsions cannibales.
Mais revenons au temps des pionniers. Après Murnau, c’est Tod Browning (1880-1962) qui réalise, en 1927, London After Midnight, avec Lon Chaney, qui incarnait, deux ans auparavant, Le Fantôme de l’Opéra. On y suit les tribulations d’un inspecteur de Scotland Yard enquêtant sur la mort suspecte d’un châtelain nommé Roger Balfour dans la maison duquel apparaît bientôt un hôte énigmatique, coiffé d’un grotesque haut-de-forme, vêtu d’une grande cape et arborant un sourire plein de dents. Évidemment : un vampire !
La même année, le producteur Horace Liveright a l’heureuse idée de porter sur la scène d’un théâtre de Broadway le roman de Bram Stoker. Hamilton Deane et John L. Balderston signent l’adaptation du livre. Ils suggèrent que le rôle soit confié à un réfugié hongrois dont l’accent prononcé leur semble particulièrement adapté au personnage. Son nom ? Bela Lugosi.
La pièce va tourner dans tout le pays. Y compris en Californie, en 1929. Là, la Fox entrevoit immédiatement le succès d’une version filmée de ce show « grand guignol ». Et c’est à Tod Browning, encore lui, qu’en est confiée la réalisation. Bela Lugosi reprend le rôle du comte Dracula. Le succès du long-métrage va le conduire à se glisser à quatorze reprises dans le costume du comte en cinquante ans de carrière. Il ne parviendra jamais à se défaire de cette image de vampire.
Le personnage va faire les beaux jours des séries B, qui se multiplient entre les deux guerres. Mais avant que ne se galvaude l’image de ce monstre, le grand Carl Theodor Dreyer (1889-1968), auréolé par le succès de La Passion de Jeanne d’Arc, sorti en 1928, consacre, lui aussi, son premier film parlant à cette figure du mal.
Dans Vampyr ou l’étrange aventure de David Gray, que le cinéaste danois tourne en France en 1932, il mêle les intrigues de deux romans de Sheridan Le Fanu, un auteur irlandais aujourd’hui oublié, qui a publié des dizaines de livres ayant pour cadre des châteaux hantés.
À la mort de Lugosi, en 1956, lorsque la Hammer Films Production, spécialisée dans les films d’horreur, entame une nouvelle série dédiée à Dracula, c’est Christopher Lee qui est « casté » pour endosser le costume. Sa haute stature (1,97 m) et son allure aristocratique lui permettront d’incarner ce sombre personnage à onze reprises ; son nom étant, autant que celui de Bela Lugosi, définitivement associé au monstre.
Le prestige du vampire va cependant s’écorner à mesure que se multiplieront les versions du mythe. Roman Polanski va en livrer une version comique en 1967 avec Le Bal des vampires, où deux chasseurs de monstres – le professeur Abronsius et son fidèle assistant Alfred – se retrouvent au château du comte Von Krolock où se prépare une fête mémorable…
En mai 1968, Jean Rollin en offre une version surréaliste avec Le Viol du vampire. Puis des déclinaisons érotiques, voire pornographiques. Bientôt copié par l’Espagnol Jess Franco, qui, engageant parfois Christopher Lee, va livrer des variations souvent olé olé des histoires de vampire.
Il faudra attendre 1994 pour que Neil Jordan redonne ses titres de noblesse au genre avec Entretien avec un vampire, où Tom Cruise et Brad Pitt rendent à nouveau glamour cette figure pourtant sadique. Le succès de ce film conduira à une nouvelle floraison de productions autour du sujet. Telle la série Buffy contre les vampires, qui comptera 144 épisodes entre 1997 et 2003.
Ou encore Twilight qui, après avoir été un succès de librairie, sous la signature de Stephenie Meyer au début des années 2000, révélera sur grand écran les talents de Kristen Stewart et Robert Pattinson entre 2008 et 2012.

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*Ainsi se meuvent les vampires. Essai sur la variation du sens, d’Arnaud Esquerre, éditions Fayard, 202 pages, 19 €.
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