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Rodin et l'art égyptien : la quête du beau éternel – Connaissance des Arts

Auguste Rodin fut un grand collectionneur d’antiques. Il rassembla notamment quelque mille cinq cents sculptures et objets égyptiens, qu’il destinait à son futur musée. L’exposition du musée Rodin se penche sur cette passion égyptienne du maître.
En ce dernier quart du XIXe siècle, l’Égypte est à la mode. Les grandes campagnes de fouilles, les Expositions universelles, l’ouverture du musée Guimet en 1888, sont quelques-uns des facteurs qui alimentent une égyptomanie, non plus réservée à une élite comme sous le Premier Empire, mais partagée par le plus grand nombre et même déclinée en productions populaires. Cependant, même pour les spécialistes, les productions de l’Égypte ancienne avaient principalement valeur de documents, et leur dimension artistique semblait faible aux yeux d’un public acquis aux canons de l’art grec. À l’opposé de l’égyptomanie ambiante, Rodin, quant à lui, porte sur l’Égypte un regard proprement esthétique.
À partir de 1893, dans sa villa des Brillants, à Meudon, Rodin constitue une collection d’antiques, petites sculptures, égyptiennes mais aussi grecques, romaines, médiévales, mêlées d’estampes japonaises, le tout disséminé dans l’atelier et contribuant à nourrir sa réflexion et sa pratique. C’est une collection à visée universaliste, qui reflète une sorte de dialogue des cultures, selon la vision alors nouvelle exemplifiée, notamment, par l’historien d’art Élie Faure. Avant de déclarer sa passion égyptienne, Rodin a d’abord été profondément marqué par la sculpture de Michel-Ange, puis par la statuaire gréco-romaine. Cette dernière était la référence essentielle et la pierre de touche de tout l’art occidental depuis la Renaissance. Le choix, de plus en plus marqué, de l’art égyptien comme objet de collection et comme référence esthétique, est donc un choix original. Seuls les artistes les plus novateurs de ce temps, de Gauguin, Matisse et Picasso à Emil Nolde et Paul Klee, se tournent alors vers l’Egypte et les arts dits primitifs, pour y puiser le ferment d’un nouveau langage plastique.
Auguste Rodin, Torse de jeune femme cambrée, grand modèle, 1909, plâtre, 85,8 x 46,3 x 32 x 6 cm © H. Lewandowski
Puis, à partir de 1910, l’artiste au sommet de sa gloire et de sa fortune commence à nourrir l’idée d’un futur musée. Il souhaite léguer l’intégralité de ses œuvres, de ses collections et de ses archives à l’État, sous condition qu’un musée soit créé en l’hôtel Biron, dont il était alors locataire. Porté par cette ambition, le collectionnisme de Rodin change de régime et de mode opératoire. Il se concentre sur l’Égypte et ses acquisitions deviennent plus importantes, en taille comme en quantité et en qualité : elles doivent être dignes du futur musée. Il ne se contente plus d’acheter chez les antiquaires parisiens, mais traite avec les principaux fournisseurs d’antiquités égyptiennes, les Joseph Altounian, Joseph Brummer, Oxan Aslanian et autres Armand Sbirian, qui sillonnent pour lui les sites archéologiques alors connus, achètent en masse des pièces qui transitent par Marseille puis arrivent à l’hôtel Biron, où Rodin fait son choix.
Bas-relief du temple d’Athribis à Wannina, Egypte, époque ptolémaique, calcaire, 46,5 x 92 x 7 cm © C. Baraja
Inventoriée lors de la donation à l’État, la collection égyptienne apparaît très éclectique : sculptures monumentales, bas-reliefs, stèles funéraires, vases en albâtre, vases canopes, masques, plaquettes en os, ivoires, bois, bronzes, verres, textiles… Elle comporte des pièces allant de l’Ancien Empire à l’époque romaine. Au fil d’un parcours muséographique conçu par l’artiste, celles-ci sont présentées dans de grandes vitrines, encadrées ou soclées par le sculpteur japonais Kichizo Inagaki à qui Rodin a confié le soin de mettre en valeur les qualités plastiques des œuvres. Au sein du musée, la collection doit servir, conformément à une longue tradition muséale, à « l’étude et l’enseignement des jeunes artistes et des travailleurs ». Mais elle sert aussi, dans l’esprit du sculpteur, à montrer une filiation entre l’art des origines, dont il admire la pureté des formes, et son propre travail tourné vers la quête de l’essentiel. Un gage de modernité, en quelque sorte.
Masque funéraire d’enfant, Egypte, époque romaine (30 av J.-C. -395 ap. J.-C.), plâtre © Angèle Dequier
Qu’est-ce qui attirait donc tant Rodin dans l’art égyptien ? Car la filiation est tout sauf évidente, entre l’art pharaonique hiératique, parfaitement lisse, idéalisé et répétitif, et la plastique tourmentée, les figures gesticulantes et le réalisme dramatique du sculpteur français. D’abord, redisons-le, Rodin porte un regard, non d’antiquaire mais de sculpteur et d’esthète sur ces œuvres qu’il admire. Un regard aiguisé qui décèle la qualité artistique et s’en exalte. « Quelle grandeur de vérité ! Ce n’est pas un chat, c’est toute l’espèce des chats ! Dans l’attache des membres, dans l’arc du dos, dans la charpente de la tête, il y a l’éternité d’un type vivant… » Ce que Rodin admire dans la statuaire égyptienne, c’est l’expression du vrai, la définition de « types vivants » dans la forme la plus simple, la plus pure, la plus fine aussi. Une forme, en somme, capable d’exprimer l’essence des choses, et créée pour l’éternité.
Chatte représentant la déesse Bastet, Egypte, époque ptolémaïque, bronze, H. 13,5 cm © C. Baraja
Il n’entend pas travailler « à la façon » des Égyptiens, mais dans le prolongement de leur art. Cette « leçon » égyptienne de la maturité de Rodin se vérifie au niveau des méthodes de travail : « Égyptien, nous dit Bénédicte Garnier, commissaire de l’exposition, Rodin semble l’être lorsqu’il explore l’adaptation du modèle au sujet ainsi que le principe de duplication et celui de répétition des figures, principes de l’art égyptien pharaonique […] Dans ces mêmes années 1890-1900, Rodin reprend des stéréotypes, en dessin comme en sculpture, avec en particulier l’usage des calques et des abattis ».
Auguste Rodin, Balzac monumental, 1898, plâtre patiné, 275 x 121 cm © C. Baraja
Cette leçon se vérifie aussi dans l’appropriation d’une conception plastique fondée sur la puissance expressive de la masse. Une œuvre comme La Pensée (1890) est clairement dérivée des statues cubes égyptiennes. Plus profonde encore, la façon dont le Balzac interprète l’archétype égyptien de la figure drapée dans un manteau d’où n’émergent que mains et visage. Le Balzac, considéré comme œuvre inaugurale de la sculpture moderne, tire de l’antique formule, comme de la puissance de sa masse saturée d’énergie contenue, sa prodigieuse éloquence. « On n’a pas voulu voir mon désir de monter cette statue comme un Memnon, comme un colosse égyptien », dira-t-il après le refus de l’œuvre par ses commanditaires. Et c’est bien à la manière d’un sphinx, ancré dans sa masse, les yeux dans l’éternité, que se dresse le géant de Rodin !
À LIRE
Le catalogue de l’exposition
Edition. Musée Rodin/In Fine éd. d’art

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