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Récit« Russie-Ukraine, la guerre des récits » (2/3). « Le Monde » revient sur la façon dont les mémoires des deux pays s’affrontent. Deuxième volet, la famine qui décima des millions de paysans ukrainiens, un drame emblématique, dissimulé par le pouvoir soviétique et minimisé par Vladimir Poutine.
Il y avait foule, gare des Brotteaux, pour accueillir dans sa bonne ville le président Herriot. Il faut dire qu’en ce 13 septembre 1933 l’inamovible maire de Lyon, chef du Parti radical et ancien président du Conseil, rentrait d’un voyage peu ordinaire. Quelques jours plus tôt, à l’invitation du gouvernement soviétique, il avait traversé l’URSS, d’Odessa à la Baltique. Depuis la révolution d’octobre 1917, c’était la première fois qu’un dirigeant politique de cette stature avait l’occasion de visiter la patrie du communisme, sur laquelle circulaient depuis des mois d’inquiétantes rumeurs.
Dès sa descente du train, la question qui brûlait toutes les lèvres lui est posée : y a-t-il une famine en Ukraine ? La réponse d’Edouard Herriot est tout sauf spontanée : « J’ai traversé l’Ukraine. Eh bien ! Je vous affirme que je l’ai vue comme un jardin en plein rendement, un beau jardin aux terres noires et grasses que couvraient, sur des étendues considérables, des moissons magnifiques. On assure, me direz-vous, que cette contrée vit à ces heures une époque attristée ? Je ne peux pas parler de ce que je n’ai pas vu. Pourtant, je me suis fait conduire dans des endroits qu’on disait éprouvés. Or, je n’ai constaté que la prospérité. »
Dans son récit Tout passe (dans Œuvres, Robert Laffont, 2006), le grand écrivain soviétique Vassili Grossman fera une allusion dévastatrice à cet épisode : « Un jour, je me rappelle, un vieil homme a apporté au président du kolkhoze un bout de journal, qu’il avait ramassé en chemin. Un Français était venu chez nous, un ministre connu, et on l’avait amené dans la région de Dniepropetrovsk où sévissait la plus effroyable des famines, une famine pire encore que la nôtre. Là-bas, les hommes mangent de l’homme. On a donc amené le ministre dans un village, au jardin d’enfants du kolkhoze, et là il a demandé : “Qu’est-ce que vous avez mangé au déjeuner ? Et les enfants ont répondu : “Du bouillon de poule, des pirojki et des croquettes de riz.” Dire que j’ai lu ça de mes propres yeux. Ce bout de journal, je le vois encore. Mais qu’est-ce que c’est que ça ? On tue froidement des millions de gens et on abuse, on trompe le monde entier ! Du bouillon de poule qu’ils écrivent ! Des croquettes ! Alors qu’ils mangeaient des vers de terre… »
Edouard Herriot est resté deux semaines en URSS, dont cinq jours dans la riche Ukraine (du 26 au 30 août 1933) et, alors même que durant les mois précédents, 3 à 5 millions de personnes y étaient mortes de faim, il n’a donc rien vu. Dans une enquête minutieuse et accablante (Le Voyage de monsieur Herriot, L’Harmattan, 2018), l’historienne Iryna Dmytrychyn met en lumière les moyens déployés par Staline pour dissimuler la tragédie ainsi que la part d’aveuglement qu’il a fallu au Français pour accepter, au nom de la raison d’Etat, de détourner le regard quand ce qu’il voyait ne cadrait pas avec la narration officielle. Les rues des villes « nettoyées » des cadavres et de toute trace de misère, les magasins soudain remplis, les hôtels repeints à la hâte (au point que l’odeur incommode les visiteurs)… Rien ne manque, et le summum est atteint à Kiev, lorsque Edouard Herriot pénètre dans la cathédrale Sainte-Sophie, au moment d’un office : « C’est dimanche. Le vieil archevêque, en vêtement d’or bordé de rouge, immobile, (…) préside avec impassibilité la cérémonie, tandis que des chants s’élèvent, suivis avec recueillement par quelques pauvres femmes sous des arcades sombres », décrira-t-il plus tard, encore envoûté par la scène.
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